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Actualités - CHRONOLOGIES

Liban-France - Des dizaines de projets de coopération sous étude - Hariri : Les rapports Beyrouth-Paris vont retrouver leur dynamisme

En dépit de l’importance des dossiers économiques ou de développement à l’ordre du jour des pourparlers ministériels franco-libanais qui s’ouvriront aujourd’hui à Paris, la visite officielle du chef du gouvernement Rafic Hariri en France reste essentiellement politique. L’importance de la délégation officielle qui accompagne M. Hariri à Paris témoigne d’ailleurs de l’intérêt que le président du Conseil accorde à cette visite – la première d’un chef du gouvernement libanais en France depuis 1997 – qu’il veut surtout symbolique : elle doit marquer un réchauffement des relations franco-libanaises qui s’étaient refroidies au cours des deux dernières années, notamment sur le plan politique. Et lorsque, dans l’avion privé qui nous a emmenés hier à Paris, nous interrogeons Rafic Hariri sur les dossiers économiques qui seront examinés avec les dirigeants français, il répond par le sourire, puis par quelques généralités avant de tabler sur le politique, le principal objectif de son séjour de 72 heures dans la capitale française. Il explique ainsi à L’Orient-Le Jour que s’il a choisi de conduire une délégation de neuf ministres à Paris, au lieu de trois ou quatre comme il le fait normalement dans ses déplacements à l’étranger, c’est «pour conférer une dimension politique à la visite et pour donner une impulsion nouvelle aux relations» entre Paris et Beyrouth. Il est plutôt discret le chef du gouvernement : il tente de justifier le refroidissement des rapports libano-français par la rareté des échanges de visites entre les deux pays. Mais de sources diplomatiques françaises, on explique que les autorités françaises avaient été vexées par le fait que le général Émile Lahoud n’ait pas répondu à l’invitation que son homologue français Jacques Chirac lui avait adressée juste après son élection à la présidence de la République. Beyrouth n’a pas ensuite fourni un effort pour amorcer un rapprochement en direction de la France, précise-t-on de mêmes sources, ajoutant que l’actualité politique n’a pas non plus joué en faveur d’un rapprochement : Paris était occupé à préparer la présidence de l’Union européenne – qu’il devait assumer par la suite – ainsi que plusieurs sommets, dont celui de la francophonie à Moncton (Canada), alors que le Liban avait les yeux braqués sur le Sud que les forces israéliennes devaient évacuer par la suite. Selon les mêmes sources, le gel des relations politiques franco-libanaises n’a pas affecté le volume de l’assistance française, alors que dans les milieux proches du gouvernement, on a estimé qu’au contraire la coopération libano-française s’en est ressentie. «Les rapports entre les deux pays vont retrouver leur dynamisme», promet M. Hariri, qui doit exposer, demain jeudi, les perspectives d’investissements au Liban à un groupe d’hommes d’affaires français. Les sujets qu’il soulèvera aujourd’hui avec son homologue français Lionel Jospin, puis avec le président Chirac sont nombreux. Au menu, il y a bien sûr les préparatifs du sommet de la francophonie qui se tiendra en octobre au Liban, le programme mis en place par le Liban en prévision de la conclusion d’un accord d’association avec l’UE, quelques questions se rapportant à l’actualité libanaise, selon des sources de la délégation libanaise et surtout, surtout, les perspectives de paix régionale après l’élection d’Ariel Sharon à la tête du gouvernement israélien. Plus que jamais aujourd’hui, le président du Conseil pense que l’armée ne doit pas être envoyée au Liban-Sud. La France ne fait-elle pas partie des pays qui plaident en faveur d’un redéploiement des forces régulières à la frontière avec Israël ? «Mais qu’on me dise par quel autre moyen je peux amener Sharon à la table des négociations», s’exclame-t-il. Pour lui, il ne fait pas de doute que la société israélienne n’est pas encore prête pour une paix dans la région. «Israël veut la sécurité et non pas la paix», estime-t-il, soulignant qu’en dépêchant l’armée au sud du pays, le Liban serait en train de jouer le jeu de l’État hébreu, en lui offrant la sécurité qu’il quête. M. Hariri fonde son argumentation sur le fait que la présence des forces régulières à la frontière implique un maintien du statu quo actuel, ce que le Liban rejette «du moment que la réalisation de la paix est, pour lui, un choix stratégique». C’est ce discours qu’il tiendra, dit-il, au cas où la question du Liban-Sud sera soulevée avec les dirigeants français. Reste un point : celui d’éventuels incidents de sécurité à la frontière, qui pourraient être le fait de Palestiniens «ce facteur d’instabilité», pour reprendre d’anciens propos du chef de l’État. M. Hariri est catégorique, «il est difficile que l’opération (militaire tentée récemment par deux Palestiniens à la frontière) se répète». Une stratégie de coopération Voilà pour le politique. Les questions de coopération technique – et elles sont nombreuses – seront soulevées aujourd’hui et demain par les ministres Fouad Siniora, Mohammed Abdel-Hamid Beydoun, Khalil Hraoui, Élias Murr, Jean-Louis Cardahi, Bassel Fleyhane, Négib Mikati, Michel Pharaon et Ghassan Salamé avec leurs homologues français. Le travail à abattre sur ce plan est énorme et les discussions de ces deux journées vont principalement servir à préparer le terrain à une plus importante coopération future sur laquelle le Liban compte particulièrement pour asseoir sa politique de développement et de redressement économique. La France est après tout le premier investisseur occidental au Liban (les Arabes investissent dans l’immobilier, et les Français dans les projets de développement) et le deuxième fournisseur du pays après l’Italie. Les ministres libanais et français procéderont à un échange de vues sur les dizaines de dossiers préparés par le Liban et envoyés il y a quelques jours, par le truchement de l’ambassade de France à Beyrouth, aux départements français concernés afin qu’ils puissent en prendre connaissance avant d’en discuter avec les responsables libanais. Le but des discussions est de définir une stratégie de coopération commune. «Nous proposons nos projets et la France choisira ceux qu’elle considérera comme étant prioritaires», nous explique M. Mikati. L’importance de certains projets soumis réside dans le fait qu’ils constituent la base de l’opération de privatisation envisagée par le gouvernement notamment dans les domaines des transports, des télécommunications et de l’énergie. Zoom sur quelques dossiers qui seront examinés au cours des prochaines quarante-huit heures. Le département de M. Mikati est porteur de huit projets couvrant les domaines de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, de l’aviation civile, des transports ferroviaires, routiers et urbains ainsi que le secteur portuaire. Ils ont été essentiellement choisis pour leur vocation économique. Le ministre des Transports en discutera demain avec son homologue français, mais les pourparlers seront entamés aujourd’hui au niveau des groupes de travail. Le ministre espère pouvoir conclure de nouveaux protocoles avec la France pour financer certains projets de développement. Soit dit en passant, la délégation libanaise souhaite obtenir le déblocage de 290 millions de francs accordés au Liban dans le cadre d’anciens protocoles financiers et dont le pays ne s’était pas servi dans les délais réglementaires. Et la mise en garde du président de la Banque mondiale contre la poursuite de la politique d’endettement ? «Il y a des investissements qu’on ne peut pas ne pas faire», répond M. Mikati. Sans compter que certains projets ont une rentabilité économique et sont de nature à réduire les factures payées par l’État pour certains services. Il cite en exemple la privatisation de l’OCFTC, à l’ordre du jour des discussions de Paris ou encore celle des transports urbains. Un autre projet auquel M. Mikati semble attacher une grande importance : le développement d’une trentaine de ports de pêche sur tout le littoral libanais par le biais de joint-ventures avec des sociétés françaises. Au niveau des télécommunications, les efforts se concentrent sur une réorganisation de ce secteur avec la collaboration de l’Agence de régulation française (office qui contrôle tous les opérateurs). Un projet de loi sur les télécommunications – à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil des ministres – prévoit la création d’un opérateur et d’un régulateur des télécoms «comme partout dans le monde». «Qu’on privatise ce secteur ou pas, il faut que ce système soit mis en place», insiste M. Cardahi, qui doit aussi discuter avec les autorités françaises de la création d’un centre de gestion des spectres de fréquence, dont le contrat est en voie d’établissement avec la compagnie Thomson, qui fournira les équipements. «Nous comptons solliciter l’aide de l’Agence de régulation française pour la formation des cadres, entre autres, car la création de ce centre est essentielle pour la mise en place, plus tard, d’un régulateur». Dans les rangs des ministres, on se garde bien de se perdre en conjectures sur les résultats des pourparlers, mais l’on ne cache pas que l’étape française, la dixième dans le cadre de la tournée mondiale du chef du gouvernement, qui s’est déjà rendu en Libye, au Maroc, en Égypte, aux Émirats arabes unis, en Iran, au Koweït, en Jordanie, au Japon et en Arabie séoudite, sera la plus marquante.
En dépit de l’importance des dossiers économiques ou de développement à l’ordre du jour des pourparlers ministériels franco-libanais qui s’ouvriront aujourd’hui à Paris, la visite officielle du chef du gouvernement Rafic Hariri en France reste essentiellement politique. L’importance de la délégation officielle qui accompagne M. Hariri à Paris témoigne d’ailleurs...