Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINIONS

Bloc-notes La religieuse, le strip-tease et le commissaire Ce fut la reine des strip-teaseuses. Comprenez-moi, elle n’était pas la star d’un «Crazy Horse» beyrouthin, ma tante Marie, dame puis sœur de Nazareth mais, bien qu’officiellement chargée par sa supérieure, pendant un temps, des «anciennes élèves», les circonstances (1) l’avaient amenée à prendre sous sa protection des effeuilleuses de Raouché. Elle entrait ainsi, tête haute et sourire pur, chez Antoine Dahdah, alors directeur de la Sûreté générale, pour plaider le cas d’une fille : «Écoutez, Antoine, c’est une très brave fille, elle va à la messe, elle aime le Liban, elle est payée à la soirée, dispensez-là de partir à l’étranger, même à Chypre, d’ailleurs, je n’ai jamais compris vos règlements. Antoine, je sais que vous faites votre devoir mais, pour une fois...». Et ainsi, de fois en fois, Dolorès, Christina et les autres échappaient à la loi, à l’insu de tout le monde, et surtout de l’austère supérieure du couvent. À propos d’austérité, cette sœur de mon père me dit un jour : «Je suis allée voir G. (la femme d’un homme politique) qui, tu sais, vit dans un autre monde. Alors, j’ai transposé. Je lui ai parlé des tableaux vivants, lui rappelant les fins d’années scolaires. Voilà, lui dis-je, il s’agit de cela. Eh bien, ça a marché. Viviane a pu aller voir son fils qui est en France, en nourrice». Alors on ment, Marie ? «Non, chérie, comme me l’a appris mère P., on “extrapole”, et tu sais comme mère P. est pieuse !». Elle allait ainsi, «couverte» par les anciennes élèves, de rencontre en rencontre, habillée en civil depuis Jean XXIII, avec des fringues de seconde main achetées au bas du souk Sursock et des chaussures dont le prix lui fit un jour mener une grève pour insuffisance d’argent de poche. Grève suivie, réussie, populaire. Et, malgré le strip-tease, ses activités de marieuse de couples illégitimes en Italie, tout ce qui devait faire sa «connaissance de la vie», comme on dit, tante Marie atteignit l’âge de quatre-vingts ans sans savoir ce qu’«homosexuel» voulait dire. Nous crûmes la mettre au parfum, mais elle nous cloua le bec : «Vous et vos histoires extraordinaires !». (1) Ces circonstances sont réservées aux conversations privées. Ma tante n’est autre, en fait, que la très populaire «Téta Marie» des années 60.
Bloc-notes La religieuse, le strip-tease et le commissaire Ce fut la reine des strip-teaseuses. Comprenez-moi, elle n’était pas la star d’un «Crazy Horse» beyrouthin, ma tante Marie, dame puis sœur de Nazareth mais, bien qu’officiellement chargée par sa supérieure, pendant un temps, des «anciennes élèves», les circonstances (1) l’avaient amenée à prendre sous sa...