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Actualités - CHRONOLOGIES

DESIGN - Attachement au patrimoine comme au style contemporain - Sophie Skaf : l’objet, le meuble, comme mode d’expression

Architecte de formation (elle a fait ses études en France, a suivi un cursus spécial de restauration, et traité dans son projet de diplôme le centre-ville de Beyrouth), Sophie Skaf retourne au Liban en 1994, en plein chantier de reconstruction. Elle s’attelle directement à des entreprises de rénovation et de restauration : des demeures anciennes, l’iconostase d’une église orthodoxe, un musée de ville à Byblos, «La fondation Louis Cardahi», projet dans lequel elle va insérer pour la première fois «une touche design», comme elle dit. «En mettant du sable, prélevé sur le chantier, entre les deux plaques de verres d’une balustrade ceignant une passerelle». Multipliant les activités, elle participe, avec une collègue, Neemat Sfeir, à un concours international d’architecture lancé par la «Société Générale» sur le thème de l’habitation grand standing. «Nous avons eu le troisième prix international, donc le premier prix national, puisque les deux premiers lauréats étaient respectivement américain et anglais». Et collabore aussi un moment avec la paysagiste Renée el-Khazen. «Le paysagisme doit être, à mon avis, une priorité pour l’architecte. L’intégration du bâtiment dans son environnement est évidemment très important. Dans le sens où il doit toujours y avoir un dialogue extérieur et intérieur, un équilibre yin et yang». À la même période, on lui confie la scénographie d’une exposition de calligraphie, présentée à la Résidence des Pins, dans le cadre du SAD (Salon des artistes décorateurs). «Mettre les objets dans un contexte particulier, les valoriser, est une démarche qui m’a toujours intéressée», dit-elle. Cette expérience va conforter son attirance vers l’objet et le meuble, et l’aiguillonner vers le design. En particulier le design de mobilier et celui d’auteur. «Le premier est une discipline de conception basée sur le modernisme fonctionnel. Tandis que le second fait parfois passer la fonction au second plan, pour privilégier l’expression créative». Elle commence ainsi à concevoir, parallèlement à son travail d’architecte, des meubles : tables, chaises, bancs, paravents, etc. Et, de plus en plus concernée par ce domaine, elle se joint à Yasmina Skaff pour fonder, en 1995, «Table Rase», une société qui s’occupe de promouvoir les jeunes designers locaux, aussi bien au Liban qu’à l’étranger. «Aujourd’hui, au bout de cinq ans, à travers des concours, des conférences, des expositions et surtout un dialogue entre designers et industriels, nous touchons à notre but. Qui est celui de faire éditer les objets de nos créateurs. Malgré la situation économique difficile et l’inexistence d’une industrie de design, nous avons de la matière grise à exporter». Dans cet objectif, «Table Rase» a participé, en tant que commissaire délégué, à la deuxième biennale internationale de design de Saint-Étienne (qui s’était tenue du 7 au 15 octobre 2000), où elle a présenté les créations de 9 professionnels et 12 étudiants de la première promotion de design de l’Alba. Et parmi les œuvres qui ont retenu l’attention, les organisateurs ont signalé la série de cendriers à cigares (baptisée «Vuelta Abajo», du nom de la région de plantations de tabacs de La Havane) et celle des meubles «cicatrices», toutes deux signées Sophie Skaf. L’idée des cendriers à cigares lui est venue alors qu’elle coupait un melon en deux. «J’avais trouvé la forme idéale pour garder le cigare en position horizontale. Il fallait juste l’adapter en travaillant surtout la densité du matériau. C’est parti d’un cendrier en plomb, puis en vieux pavé du centre-ville, avant d’aboutir à un troisième en bois de palissandre». Attachée au patrimoine autant qu’attirée par le style contemporain, Sophie Skaf amalgame ces deux concepts, un peu paradoxaux, dans ses créations. Dans le meuble «cicatrice» – né de la lecture d’un article sur les plaies du Beyrouth de l’après-guerre paru dans Le Monde –, elle a voulu exprimer cette vision des stigmates de la guerre à travers un objet. Cela a donné des sortes de sellettes en bois laqué, dont les jointures sont de trois sortes : scellement, vis et agrafes en acier. Ni vraiment un meuble ni une sculpture, cet objet, «design d’auteur» par excellence, peut être adapté aussi bien en mobilier qu’en élément d’une installation. Mais qui restera, quelle que soit sa destination finale, un objet mode… d’expression.
Architecte de formation (elle a fait ses études en France, a suivi un cursus spécial de restauration, et traité dans son projet de diplôme le centre-ville de Beyrouth), Sophie Skaf retourne au Liban en 1994, en plein chantier de reconstruction. Elle s’attelle directement à des entreprises de rénovation et de restauration : des demeures anciennes, l’iconostase d’une église...