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Actualités - REPORTAGES

HISTOIRE - Alexandre le Grand occupe Tyr, la contrée envahie cesse d’être indépendante - La Phénicie hellénisée resserre ses liens - avec le monde méditerranéen -

Un double problème se pose en préambule lorsqu’on aborde l’examen de la vie et des actes d’Alexandre le Grand. Les points d’interrogation portent sur deux questions. Comment et à la suite de quelle évolution, un immense empire, tel que la Perse des Achéménides, doté d’aussi puissants moyens matériels, a-t-il pu s’écrouler dès le premier contact avec un envahisseur fort de la seule volonté indomptable de dominer le monde ? Quelles furent les conditions objectives qui firent d’un pays rude et pauvre tel que la Macédoine, à la fois le terrain propice à l’épanouissement d’un génie encore à la recherche de sa juste mesure, et le tremplin d’une gloire dont l’aveuglant éclat demeurera à jamais inégal ? La réponse à ces questions présuppose une prise de connaissance des structures internes et externes de ces deux États. Quoiqu’il en soit dans la 2e moitié du IVe siècle les peuples phéniciens étaient déjà conquis par la civilisation grecque et attendaient impatiemment le moment propice pour se débarrasser du joug perse. Entre-temps Philippe le Macédonien envahissait les cités grecques en vue de les unir. Alexandre, succédant à son père, poursuivit le même but. Pour assurer l’expansion des Grecs en Méditerranée, il déclara la guerre aux Perses. Il traversa les détroits et remporta la bataille au sud des Dardanelles en 334 avant Jésus-Christ. Il arriva en Asie Mineure et rencontra, en 333, le roi des Perses Darius III, au détroit d’Issus. Alexandre gagna la bataille et captura la mère de Darius III et ses femmes ; mais Darius s’enfuit vers l’Euphrate. Alexandre le laissa courir car son but principal était d’occuper les côtes phéniciennes pour éloigner les Perses de la Méditerranée, briser la force maritime des Phéniciens et empêcher ceux-ci d’attaquer la Grèce durant son absence dans les pays asiatiques. C’est pourquoi il se dirigea vers le pays de Canaan où le peuple phénicien l’accueillit non comme un envahisseur mais plutôt comme un libérateur. Il occupa, sans coup férir, Arwad et Byblos, et laissant là le pouvoir à son frère de lait Parménion, il se dirigea vers Damas où Darius cachait ses trésors. Parménion était l’hôte de deux frères notables de Sidon. Le roi de Sidon étant à la tête de la flotte perse, Parménion proposa aux deux frères de devenir rois. Ceux-ci refusèrent et laissèrent le trône à un descendant du roi en exercice Abed Elonin. Ensuite, Alexandre se dirigea vers Tyr. Les Tyriens envoyèrent un diadème en or au conquérant grec en le reconnaissant comme vainqueur. Mais celui-ci ne fut pas satisfait ; il voulait briser la force maritime des Phéniciens pour les empêcher d’arriver en Grèce et pour ouvrir aux Grecs un domaine de commerce plus large. Ce geste amical le prit au dépourvu, il n’avait plus d’autre alternative que d’y répondre de même. Se considérant le descendant d’Hercule, il manifesta donc le désir de faire des sacrifices dans le temple de Melqart ; les Phéniciens fermèrent alors les portes des murailles de la ville pour qu’il ne puisse pas y accéder. Ne pouvant conquérir Tyr du côté de la mer, Alexandre reprit l’entreprise de Nabuchodonosor qui consistait à relier la ville à la terre. Il commença à jeter dans la mer des blocs de pierre pour construire une digue. Mais les Phéniciens, avec une audace extrême, la détruisaient au fur et à mesure et combattaient férocement les assaillants. Entre-temps, les flottes phéniciennes revenaient à Sidon. Alexandre mit la main sur elles et fit venir une autre flotte de Chypre. Il ordonna ensuite à cette armada, de faire semblant d’attaquer l’île de l’ouest. Et pendant que les Tyriens étaient occupés à repousser la flotte, Alexandre parvint à achever la construction de la digue. Il attaqua alors Tyr de tous côtés et finit par la prendre en 333. Il ordonna alors à ses soldats de massacrer tous les habitants de la ville. Le siège avait duré sept mois. Ainsi Tyr cessa d’être indépendante et devint une petite partie d’un empire très vaste que le Macédonien conquit en quelques années. Avec la chute de Tyr et la conquête grecque commence une longue période de treize siècles interrompant le cours de la vie proprement nationale de la Phénicie. Les destinées impériales de la Grèce et de Rome auront ainsi raison, pour un certain temps, de notre destinée nationale, mais ce sera pour nous lier plus étroitement au monde méditerranéen et, en définitive, pour enrichir notre patrimoine. Alexandre ne survécut que dix ans à la conquête de Tyr. À sa mort, ses généraux se partagèrent son empire : l’Asie échut à Séleucus et l’Égypte à Ptolémée. Séleucus s’intitula roi de Syrie. Mais il n’avait de la Syrie que le nom. Sa capitale était Antioche, à la limite de l’Asie Mineure. Son empire couvrait l’Asie Mineure, les îles de la mer Égée et tout l’Orient jusqu’aux frontières de l’Inde. Le nouveau maître répandit dans les régions de son royaume non encore hellénisées des milliers de colons macédoniens et thraces. Les villes prirent des noms grecs. Le P. Lammens, qui a soutenu de son autorité la chimère d’une Syrie limitée par «le Taurus, l’Euphrate, le désert et la Méditerranée», commente en ces termes la fondation du royaume de Syrie : «Pour la première fois, ce titre venait rappeler aux indigènes la parenté de tous les membres de la famille nationale, suggérer l’idée de se grouper officiellement, sous une même dénomination politique à côté des autres États orientaux. Et cette révélation, ils la devaient à l’étranger». Ce qui est à retenir de la citation, c’est l’aveu que le royaume de Syrie fut une révélation venue de l’étranger et apparaissant pour la première fois au IIIe siècle av. J-C, soit plus de trente siècles après l’apparition de la Phénicie. En second lieu, l’argument tiré de l’existence de ce royaume ne prouve rien, parce qu’il prouve trop : ce n’est pas la Syrie visée par le P. Lammens que ce titre groupait officiellement, c’était tout simplement toute l’Asie occidentale à l’exclusion précisément, au début tout au moins, de la Phénicie. En effet, le partage qui s’opéra à la mort d’Alexandre semble n’avoir pas réglé explicitement le sort de notre littoral, d’où une série de conflits entre les Ptolémées d’Afrique et les Séleucides pour la possession de la rive orientale de la Méditerranée. La Phénicie souffrit énormément de cette situation, puisqu’elle servit de champ de guerre aux deux empires. D’autre part, la perte complète de son indépendance et la domination grecque sur tout l’Orient hellénisèrent le pays. La culture grecque, imbue d’ailleurs de l’influence phénicienne, était devenue la plus parfaite de l’Antiquité et allait imprégner très fortement la civilisation latine. La Phénicie se voyait entraînée ainsi dans le monde gréco-romain. La langue grecque concurrença la langue phénicienne et, depuis lors, le peuple libanais parlera généralement plusieurs langues à la fois, ce qui lui servira dans son rôle d’intermédiaire.
Un double problème se pose en préambule lorsqu’on aborde l’examen de la vie et des actes d’Alexandre le Grand. Les points d’interrogation portent sur deux questions. Comment et à la suite de quelle évolution, un immense empire, tel que la Perse des Achéménides, doté d’aussi puissants moyens matériels, a-t-il pu s’écrouler dès le premier contact avec un envahisseur...