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Actualités - BIOGRAPHIES

Décès - Le président du Conseil supérieur chiite emporté par un cancer à l’âge de 66 ans - Chamseddine, homme de modération et fédérateur

On l’a pratiquement vu dépérir sous nos yeux, au cours des derniers mois, et plus particulièrement ces deux dernières semaines. Souffrant d’un cancer aux poumons pour lequel il avait été hospitalisé à deux reprises en France, le président du Conseil supérieur chiite Mohammed Mehdi Chamseddine (66 ans) est décédé hier soir. Chamseddine avait regagné le Liban il y a moins de deux semaines après avoir été hospitalisé à Paris. De très nombreux dignitaires religieux et personnalités politiques avaient tenu, à son retour, à lui rendre visite. Le patriarche maronite, dont les rares déplacements sont soumis à un protocole minutieux, avait tenu à venir le saluer. Figure emblématique de la communauté chiite, cheikh Mohammed Mehdi Chamseddine présidait aux destinées du Conseil supérieur chiite depuis la disparition, en 1978, de son fondateur, l’imam Moussa Sadre. Ce n’est qu’en 1994 qu’il avait accepté d’être confirmé à la présidence de cet organisme. Né à Nadjef (Irak) ayant suivi des études religieuses, à Nadjaf, à Qom, en Iran et au Liban Mohammed Mehdi Chamseddine était l’une des plus fortes figures de la communauté chiite, un homme qui a vécu intensément les convulsions de la guerre libanaise, et qui en avait tiré de surprenantes leçons. Démocratie du nombre Après s’être fait le champion de la «démocratie du nombre», de longues années durant, Mohammed Mehdi Chamseddine en était venu à repenser cette formule, à la lumière de l’expérience de la guerre et des développements qui avaient suivi. Cette conviction avait mûri au fil des années, et à la suite des nombreux sommets religieux libanais qui s’étaient tenus durant les années de guerre, aussi bien au Liban qu’à l’étranger, notamment au Koweït (1989). L’entente islamo-chrétienne était devenue sacrée pour lui. Depuis deux ans, il avait commencé à mettre en garde contre la remise en question des équilibres communautaires au Liban. Le président du Conseil supérieur chiite avait explicitement demandé, à plusieurs reprises, au cours de l’année écoulée, que l’on renonce à la clause de l’accord de Taëf prévoyant l’abolition du confessionnalisme politique. Son insistance sur ce thème ressemblait au testament politique d’un homme qui savait qu’il n’avait plus beaucoup de temps à vivre. Modération Pour beaucoup de Libanais, Mohammed Mehdi Chamseddine en était venu au fil des années à incarner la modération au sein de sa communauté comme au niveau national. Ce sens de la modération et cette diplomatie, il les avait d’abord mis au service du Liban et de l’intégration nationale, au sortir d’une période de guerres au cours de laquelle le tissu social et confessionnel du Liban s’était déchiré, et où des générations de Libanais chrétiens et musulmans grandissaient étrangères les unes aux autres, dans une méfiance réciproque alimentée par le non-dit de la guerre. Sa modération, Chamseddine l’a également mise au service de sa propre communauté, polarisée par l’émergence de deux organisations aux références différentes, le mouvement Amal et le Hezbollah. Placés face à face, le Hezbollah, projet politique de société islamique, d’inspiration iranienne, et le mouvement Amal, organisation militaro-politique agissant dans la mouvance syrienne, en étaient arrivés dans de nombreuses régions de présence commune, à de sanglants affrontements. Chamseddine saura s’imposer comme une figure arbitrale et contribuera à mettre fin à l’effusion de sang. Beaucoup le considèrent donc comme le véritable fédérateur de sa communauté. Le rapprochement avec Jean-Paul II Toutefois, l’évolution de la pensée politique de Chamseddine et sa modération n’ont jamais affecté une hostilité résolue à une modernité à l’occidentale, qui ne l’a jamais quitté. Profondément croyant, il avait en aversion l’humanisme séculier agnostique qui a submergé l’Occident,et le relativisme éthique qui le caractérise. Cette aversion le rapprochait de Jean-Paul II, qu’il avait rencontré lors d’une visite à Rome, et auquel il savait gré d’avoir invité les communautés musulmanes au Synode sur le Liban qui s’était tenu à Rome. Pour tenter de mettre sa communauté à l’abri de telles influences, il avait notamment pris l’initiative de fonder une Université islamique, à Ouzaï, et s’était mis en réseau avec de nombreuses institutions pédagogiques à travers l’Organisation de la conférence islamique, où il était tenu en haute estime. Voilà, en quelques traits rapides, l’homme que la mort a emporté hier soir, après une lutte courageuse, mais inégale contre le cancer. Personnalité peu commune, empreinte de modération, unanimement respectée, Mohammed Mehdi Chamseddine laissera un vide difficile à combler.
On l’a pratiquement vu dépérir sous nos yeux, au cours des derniers mois, et plus particulièrement ces deux dernières semaines. Souffrant d’un cancer aux poumons pour lequel il avait été hospitalisé à deux reprises en France, le président du Conseil supérieur chiite Mohammed Mehdi Chamseddine (66 ans) est décédé hier soir. Chamseddine avait regagné le Liban il y a...