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Actualités - ANALYSE

SOCIÉTÉ - Certains annoncent l'apocalypse pour demain ... La "fin des temps" , un mystère de liberté au coeur de l'Histoire

Les fins, les dates symboliques, ont de tout temps frappé l’imagination des peuples, et la fin d’un millénaire ne pouvait pas y manquer. D’autant plus que notre époque est celle d’une mutation technologique qui a provoqué une immense entropie sociale, un affolement de toutes les aiguilles, aux conséquences encore non maîtrisées. Il suffit de constater que la moitié des mariages en Europe finissent par un divorce pour se dire que quelque chose ne va pas. Alors même que des Docteurs Folamour essaient de cloner l’être humain, la cellule familiale explose au point qu’il y va presque de la survie de l’espèce. Désemparée, l’humanité cherche ses certitudes n’importe où, et c’est sur ce type de terreau culturel, social et humain que fleurit une multitude de prophéties sur la fin du monde. Certains, même, l’annoncent pour demain, 25 juillet. La croyance en une fin du monde existe dans de nombreuses cultures. Mais croire à la fin du monde peut revêtir deux formes distinctes, une forme vulgaire et une forme religieuse. Sous sa forme vulgaire, c’est une croyance à l’anéantissement physique du monde, à une espèce d’autodestruction qui entraînera la disparition de l’espèce humaine. Mélange de destruction des dinosaures et de disparition de l’Atlantide. Nous sommes là dans un millénarisme bon marché, une espèce d’anticipation d’une catastrophe qui emportera le monde. La grande peur du nucléaire – une peur justifiée par un risque réel –, fait partie de ce type de fin. C’est de cet ordre que relèvent les prédictions catastrophiques du couturier Paco Rabanne (couturier et philosophe, depuis quand ? Déshabiller les femmes, prendre le contrôle de nos désirs ne lui suffit-il donc pas, qu’il doive prendre aussi le contrôle de notre imaginaire et de nos fantasmes de survie ?) Un mystère insondable Mais croire à la fin du monde fait aussi partie de la foi religieuse. C’est croire en un «jugement dernier» que Dieu prononcera sur l’humanité en général et sur chaque être humain en particulier. Pour la religion chrétienne, nous touchons à la fin des temps. Pour un chrétien, la «fin des temps», c’est le délai indéfini qui sépare la naissance du Christ, sa première venue, de son second avènement, quand il reviendra en majesté, pour juger les vivants et les morts. Pour ne pas galvauder la «fin des temps», ni confondre l’Apocalypse de saint Jean et les élucubrations de Paco Rabanne, il faut prendre le temps de la réflexion. Croire que Dieu, dans sa Toute-Puissance, a fixé une limite au temps, c’est croire à un mystère insondable, difficilement accessible à la raison. Réfléchir à la fin des temps c’est donc réfléchir sur la notion de temps, et sur celle de liberté. Et ensuite sur leur interaction. Posons-en quelques jalons. La notion de temps d’abord. Sous sa forme la plus simple, la plus palpable, le temps, c’est une quantité de cycles : ceux de la terre, du soleil, de la lune, des saisons, des années. Nous sommes là dans le temps cyclique, le temps qui, comme un cercle, se referme sur lui-même, se renouvelle. Dégénérescence et mort Ce genre de notion de temps est étroitement associé à la notion de dégénérescence et de mort. La nature meurt avant de renaître. Le printemps s’établit sur les ferments de l’hiver, et l’homme s’en va à sa demeure d’éternité. Ce type de notion temporelle est celui qui nourrit l’imagination des poètes. Lamartine et son Lac ne sont pas loin. La croyance en la réincarnation et en la transmigration de l’âme, la nécessité psychologique de croire qu’on survivra à l’anéantissement physique, poussent également l’esprit dans cette direction. Explorer ce monde invisible sans guide, c’est s’engager dans une aventure qui peut être sans retour. Mais si certaines cultures ont pensé à des cycles cosmiques mystérieux dans lesquels l’histoire de l’univers, et en particulier de l’homme, se répéterait constamment, il existe aussi un type de temps linéaire. Un temps qui a un début, un milieu et une fin. La notion chrétienne du temps est plutôt de ce type, et elle est étroitement associée à celle de liberté. S’il y a une fin à l’histoire, et un jugement, c’est qu’il y a un sens à l’histoire et un mystère de liberté étroitement associés à un déterminisme qui n’est pas prédétermination pure puisqu’ouvert sur la liberté. Le temps linéaire, ce n’est pas la disparition des déterminismes psychosomatiques, sociaux, culturels, voire astraux, mais c’est ce que notre liberté en fait. Le livre de l’Apocalypse, qui décrit les fins dernières de l’homme, n’empiète pas sur sa liberté, mais trace le cadre dans lequel elle va s’exercer. Le temps linéaire, c’est le temps de la cocréation de sa vie, l’antithèse du destin. C’est un temps à plusieurs dimensions où le temps circulaire et le temps linéaire interagissent et créent l’imprévu. La notion chrétienne du temps L’idée centrale de la notion chrétienne du temps c’est qu’il y a un mystère de liberté au cœur de l’Histoire. Que l’on pense à la prophétie de Fatima (1917) : «Si l’on fait ce que je vais vous dire, beaucoup d’âmes se sauveront et on aura la paix. La guerre va finir. Mais si l’on ne cesse pas d’offenser Dieu, sous le règne de Pie XI, une autre, pire, commencera». La Vierge parlait de la Seconde Guerre mondiale. Le «si» est capital.Il conditionne un événement à notre liberté. C’est un modèle qui a toujours eu cours dans l’Ancien Testament. Dieu met toujours des «si» à ses avertissements, tout comme il en met à ses promesses. L’Incarnation n’aurait pas eu lieu sans le «oui» librement assumé de la Sainte Vierge. Mais alors comment concilier le fait que l’homme soit créé libre et la réalisation d’une prédiction ? Le monde est-il une pièce de théâtre dont nous sommes les acteurs inconscients ? C’est méconnaître la nature véritable de la prophétie chrétienne.Avant d’être voyance ou prédiction, elle est liberté s’adressant à une autre liberté, Dieu s’adressant aux hommes pour leur exprimer un amour exigeant, dévorant, exclusif, réfractaire à tout ce qui est opposé à sa nature. C’est dans la prescience que Dieu découvre parfois l’avenir à ses prophètes, non pour déterminer cet avenir, mais pour nous révéler notre désobéissance et sa mansuétude. L’Ancien Testament ne parle-t-il pas d’un Dieu qui, à l’intercession du prophète, «se repent du mal» qu’il méditait contre son peuple rebelle. La fin de l’histoire est impensable Il y a une troisième notion du temps, qui est celle du non-temps ou de la répétition éternelle d’un état intérieur de grâce ou de disgrâce, de justice ou de péché. Passé le seuil de la mort, l’homme se retrouve dans une autre dimension, dont nous savons peu de choses. Comme l’ont noté certains philosophes, Nicolas Berdiaev en particulier, la fin de l’histoire est proprement «impensable», car elle se déroule dans une autre dimension, sous peine de n’être plus une fin. Ce temps est celui des fins dernières, le temps de l’eschatologie. Pour en parler, l’Église se montre extrêmement prudente, et s’en tient à ce que le Christ lui a appris, qui est d’une immense richesse, mais dont certains sont hélas tentés de mépriser la simplicité. Eschatologie, connaissance des fins dernières, jugement dernier, d’excellentes présentations de ces sujets épineux peuvent être trouvées dans le catéchisme de l’Église catholique dont Jean-Paul II a veillé à la publication. On peut aussi s’aider d’un bon dictionnaire de la Bible, antidote aux théories inventées de toutes pièces qui pullulent sur les rayons des librairies.
Les fins, les dates symboliques, ont de tout temps frappé l’imagination des peuples, et la fin d’un millénaire ne pouvait pas y manquer. D’autant plus que notre époque est celle d’une mutation technologique qui a provoqué une immense entropie sociale, un affolement de toutes les aiguilles, aux conséquences encore non maîtrisées. Il suffit de constater que la moitié des mariages en...