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Actualités - CHRONOLOGIE

Harb et Husseini défendent le président du Conseil et accablent Hariri

Le gouvernement fait face à une campagne systématique de démoralisation de l’opinion, visant à saper la confiance que les Libanais placent en son action. Toutefois, entre son action et son discours, il existe un déficit, que le gouvernement doit savoir combler, en apprenant à communiquer et à définir clairement ses objectifs et les moyens qu’il prend pour les atteindre. Ces réflexions ont constitué le thème central du vibrant plaidoyer en faveur du gouvernement et du régime en place prononcé par M. Boutros Harb, hier, dans l’hémicycle. M. Harb a considéré comme «très regrettable (…) la campagne de déformation systématique menée contre le gouvernement». Grâce à son talent d’orateur, le député de Batroun est parvenu à sortir de leur apathie les députés présents, qui ont suivi son intervention avec attention. M. Harb a fait un grand heureux en la personne du chef du gouvernement, qui arborait au sortir du Parlement un large sourire faisant contraste avec la grise mine qu’il faisait les jours précédents. Pour mettre en valeur l’action du gouvernement, M. Harb a fait le procès du gouvernement de M. Rafic Hariri, qui l’a précédé. Cet exercice de style était également un exercice de mémoire. Le député a rappelé le mépris total de la loi, de l’opinion, des institutions et de la plus élémentaire prudence dont a fait preuve M. Hariri, dans l’espoir de faire décoller l’économie. Un pari que, selon M. Harb, l’ancien Premier ministre a perdu, et qui a plongé le pays dans un endettement si périlleux qu’il n’y aura pas assez de l’effort de tout un peuple, pendant de longues années, pour éviter l’effondrement monétaire. «Quand M. Hariri est arrivé au pouvoir, le Liban avait 1,5 milliard de dollars de dettes. Quand il a quitté le pouvoir, cette dette avait atteint les 18,5 milliards», a rappelé fort M. Harb, qui a dénoncé «le mépris nourri par l’ancien gouvernement pour l’intelligence des Libanais, leur mémoire, leurs souffrances et leurs désillusions». «Que du jour au lendemain, les rôles soient renversés et que le loup se change en brebis ne saurait modifier les données», a souligné M. Harb. La troïka «Nous espérions que la néo-opposition qui, dans un passé proche, exerçait encore despotiquement le pouvoir examinerait la politique financière du gouvernement et le projet de budget, critiquerait ou corrigerait ce qu’elle jugerait bon de corriger (…) Il n’en a rien été, a poursuivi M. Harb. Ce débat s’est transformé en un champ de bataille totalement étranger à un débat de politique générale bien compris. De graves accusations allant au-delà de la politique générale du gouvernement et portant sur le régime politique ont été lancées. On a pleuré la démocratie, les libertés publiques et l’État de droit et des institutions. Le pays a été présenté sous les traits d’un État policier répressif, un État de surveillance policière où les responsabilités sont dissimulées, où les pouvoirs sont concentrés entre les mains d’un homme ou d’une équipe de l’ombre, sans visages, sans prérogatives et n’ayant donc pas à répondre de ses actes». «La vérité est tout autre», a poursuivi le parlementaire. «La vérité, c’est que la néo-opposition a quitté le pouvoir après avoir conduit le pays au bord de l’effondrement monétaire, économique et social, du fait de sa mauvaise politique. La vérité est que le régime parlementaire et la démocratie se sont effondrés quand cette opposition a pris le pouvoir au Liban et que le régime est devenu celui du clientélisme et d’une troïka qui s’est dressée sur les dépouilles de la Constitution». Et M. Harb de parler de la manière cavalière dont les Conseils des ministres se tenaient affirmant que les décisions du gouvernement étaient parfois modifiées à l’insu des ministres. Il a évoqué le divorce qui existait entre le chef du gouvernement et le ministre des AE, dont le rôle était confisqué, a-t-il soutenu. Il a soulevé la question de la corruption et de la double allégeance des ministres et hauts fonctionnaires émergeant sur les bordereaux de M. Hariri, la dilapidation des biens publics et le coût exorbitant atteint par la reconstruction, la suspension de l’effet de lois ou de règlements ne convenant pas aux intérêts du moment, le non-respect des organismes de contrôle ou des décisions du Conseil d’État, les poursuites engagées contre des quotidiens ou des journalistes, les arrestations pour délit d’opinion, le détournement des médias au profit du pouvoir, par promesses ou menaces, l’attribution de licences d’exploitation de télévision sur la seule base de l’appartenance politique, les écoutes. «Notre pari sur le nouveau régime et sur son premier gouvernement repose essentiellement sur l’espoir d’un redressement de la situation dont nous souffrions», a souligné M. Harb, qui considère normal que «toute action bute sur des obstacles et des difficultés», mais que cela ne signifie pas que «l’espoir doive être abandonné, surtout au regard du poids de l’héritage politique et économique assumé». Husseini prend la défense du régime Déterminé et sûr de lui, l’ancien président de la Chambre, M. Hussein Husseini, a, à l’instar de M. Harb, pris hier la défense du nouveau régime et du gouvernement et a fait assumer au président Rafic Hariri la responsabilité des difficultés que traverse le pays. Dernier député à prendre la parole lors du débat budgétaire, M. Husseini a prononcé un discours improvisé de plus d’une heure et quart, défendant d’une manière méthodique aussi bien les options du gouvernement que les personnes des présidents Émile Lahoud et Sélim Hoss. M. Husseini fait assumer d’emblée au gouvernement précédent le retard dans le vote du projet de budget. «Contrairement aux dispositions de la Constitution, dit-il, l’ancienne équipe ministérielle n’a pas transmis à la Chambre le projet de budget, en octobre dernier, prétextant que le nouveau régime pourrait réviser le texte». Pour l’ancien chef du Législatif, «dès le début, il est apparu que le nouveau régime avait une opération de sauvetage à accomplir, indique-t-il. Les chiffres sont très importants. Ils prouvent l’ampleur du problème provoqué en grande partie par la mauvaise gestion des gouvernements qui se sont succédé ces six dernières années». Selon M. Husseini, l’augmentation exponentielle de la dette ces six dernières années est due à des «divergences fondamentales dans la vision concernant l’entente nationale». Se lançant dans un long exposé historique sur la guerre du Liban, M. Husseini rappelle que les pays arabes s’étaient engagés à verser la somme de 2 milliards de dollars lors du sommet de Bagdad pour contribuer à la reconstruction. «Après la fin des combats, dit-il, non seulement ils n’ont pas payé la somme promise, mais ils se sont aussi abstenus de verser les 1,6 milliard de dollars de contribution au fonds arabe et international pour la reconstruction du Liban. L’erreur du premier gouvernement de Hariri a été de ne pas réclamer les sommes promises et de négliger la concrétisation du fonds de reconstruction. Au contraire, M. Hariri s’est comporté comme si le Liban était en pleine prospérité et le budget de 1993 était trois fois plus important que celui de l’année précédente. C’est comme cela que le long processus d’endettement a commencé». M. Husseini reproche aux gouvernements Hariri d’avoir totalement contrevenu pendant six ans aux exigences de l’entente nationale «pour laquelle le Liban a payé un très lourd tribut : 220 000 martyrs». «Le grand défi aurait été de rester fidèles aux clauses du document d’entente nationale de Taëf pour éviter au pays une nouvelle guerre, affirme l’ancien président de la Chambre. Ce ne sont pas les 30 000 milliards de livres de dette qui constituent le véritable problème du Liban mais le fait d’avoir perdu six années sans respecter et appliquer les exigences de l’entente, seule susceptible d’édifier des institutions solides et un État moderne». Justice et immunité M. Husseini reproche notamment à M. Hariri de ne pas avoir élaboré et mis en œuvre un règlement interne pour le Conseil des ministres qui aurait permis, selon lui, d’éviter des problèmes semblables à la crise dite «du communiqué des sources ministérielles». «De toute façon, ajoute-t-il, trop de tapage a été fait autour de cette affaire. Du temps de M. Hariri, n’y avait-il pas des communiqués publiés à des heures indues par le bureau de presse du président du Conseil ?» M. Husseini s’en prend aussi à ses collègues qui se sont succédé ces quatre derniers jours à la tribune du Parlement pour critiquer la justice. «Cela constitue une violation du principe de la séparation des pouvoirs, souligne-t-il. Comment peut-on se permettre de faire le procès de la magistrature à partir de cette tribune ? Cette situation est malsaine. C’est vrai que nous croyons à l’innocence de certaines personnes actuellement jugées. Je suis de ceux qui pensent que l’ancien mohafez de Beyrouth Nicolas Saba n’est pas coupable. Mais cela m’autorise-t-il à me mêler des affaires de la justice ?». M. Husseini insiste beaucoup sur le fait qu’une justice indépendante est la pierre angulaire pour l’édification d’institutions solides. «Bien que la Constitution stipule le renforcement de l’indépendance de la magistrature, aujourd’hui, ce pouvoir est contrôlé par le Conseil des ministres qui procède aux nominations, aux permutations, aux hausses de salaires (…) dit-il. Nous devons impérativement faire le nécessaire pour faire respecter la Constitution». M. Berry intervient à cet instant pour informer les députés qu’un projet de loi relatif à la réforme de la justice sera examiné la semaine prochaine par la commission de l’Administration et de la Justice. M. Husseini prend ensuite la défense personnelle du chef du gouvernement, M. Sélim Hoss, qu’il qualifie «d’un des principaux artisans de l’entente nationale». «Toutes les accusations portées contre M. Hoss relèvent de la diffamation et de la calomnie», dit-il d’une voix vibrante d’émotion. M. Husseini conclut en affirmant que la présence du général Émile Lahoud à la tête de l’État et de M. Sélim Hoss à la tête du gouvernement «représente une chance historique pour le Liban».
Le gouvernement fait face à une campagne systématique de démoralisation de l’opinion, visant à saper la confiance que les Libanais placent en son action. Toutefois, entre son action et son discours, il existe un déficit, que le gouvernement doit savoir combler, en apprenant à communiquer et à définir clairement ses objectifs et les moyens qu’il prend pour les atteindre. Ces...