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Actualités - REPORTAGES

CRIME DE SAIDA - Moustafa Saad a remis au juge Oueïdate les informations en sa possession Addoum : " Il s'agit d'une analyse politique non d'éléments concrets"

«Il fallait que je parle. La mort du président Hassan Osman m’a beaucoup affecté et je me sentais un peu responsable de sa disparition». Après un entretien d’une heure avec le juge d’instruction Raymond Oueidate, chargé par les autorités d’enquêter sur l’assassinat des quatre magistrats au Palais de justice de Saïda le 8 juin dernier, le député Moustafa Saad se sent un peu soulagé. Interrogé par L’Orient-Le jour, il précise qu’il ne sait pas si le juge tiendra compte des éléments qu’il lui a transmis concernant une éventuelle implication «de grands services dans la tuerie de Saïda», «mais, au moins, j’ai fait mon devoir». Les autorités judiciaires ne semblent toutefois pas accorder une grande importance «aux révélations» du député Saad, qui avaient eu l’effet d’une bombe dimanche dans les milieux politiques et populaires. Si le juge Oueidate refuse de faire le moindre commentaire, le procureur général Adnane Addoum, qui s’est entretenu avec le magistrat, qualifie carrément les allégations de Saad «d’analyse politique, nullement étayée par des éléments concrets». Addoum affirme que le député a tiré ses propres conclusions «et il est libre de le faire puisque nous sommes dans un pays démocratique». Quant au livre de Robert Hatem, alias Cobra, que Saad demande à la justice de considérer comme une note d’information dans l’affaire qui le concerne (Cobra a cité l’attentat contre Saad parmi les tentatives d’assassinat qu’il attribue à l’ancien ministre Élie Hobeika), Addoum précise : «Cet ouvrage est interdit au Liban. Comment voulez-vous que nous le considérions comme une note d’information ?». Il demande enfin de ne pas faire le lien entre le crime de 1985 et celui de 1999, ajoutant que rien ne doit perturber le cours de l’enquête sur l’assassinat des quatre magistrats qui doit rester secrète. Pourtant, le député de Saïda établit un lien entre la tentative d’assassinat dont il a été victime en 1985 et qui lui a coûté la vue et la mort des quatre juges le 8 juin dernier en pleine audience du tribunal. Sans le dire clairement, il laisse entendre que «les services de sécurité» seraient les auteurs des deux crimes (même si, en 14 ans, leur composition a bien changé) et qu’en tuant le magistrat Hassan Osman et ses compagnons, on aurait surtout voulu empêcher ce dernier de publier son acte d’accusation dans l’affaire de la tentative d’assassinat contre lui. «Je n’accuse pas. Je mets les éléments que je possède à la disposition de la justice. C’est elle qui décidera en définitive la piste à choisir», précise le député. Et Addoum déclare à ce sujet qu’avant d’être publié, l’acte d’accusation doit être soumis au parquet pour qu’il émette son avis. «Or cela n’a pas été fait dans l’affaire Saad, ce qui signifie que l’acte d’accusation n’était pas achevé». Sur la teneur des éléments qu’il aurait transmis au juge Oueïdate, M. Saad reste évasif. «Ils appartiennent désormais au juge. C’est à lui de décider s’il souhaite les divulguer». Détails troublants Ce qu’on sait toutefois, c’est que M. Saad relève certains détails qui lui paraissent troublants. On sait ainsi que le premier président des cours d’appel du Liban-Sud Hassan Osman avait été chargé d’enquêter sur la tentative d’assassinat contre le député Saad en 1985, l’affaire ayant été déférée devant la Cour de justice. Selon certaines sources, le magistrat instructeur avait ainsi prévu d’entendre en qualité de témoin un haut responsable des services de renseignements de l’armée à l’époque du crime, mais ce dernier ne s’était jamais présenté au rendez-vous. Les mêmes sources rapportent que le président Osman tenait toutes ses auditions dans cette affaire au Palais de justice de Beyrouth, dans le bureau d’un collègue, pour des raisons de sécurité. Et, selon Moustafa Saad, il avait achevé son enquête et était sur le point de publier l’acte d’accusation, dans lequel il comptait inculper certains civils et militaires, lorsque les criminels l’ont fauché dans son prétoire ainsi que ses compagnons. Mais de là à établir un lien entre le crime de 1985 et celui de 1999, il y a un grand pas que, pour l’instant, les autorités judiciaires refusent de franchir. Et si Saad a déclaré dans la conférence de presse tenue dimanche à son domicile que «d’importants services sont derrière l’assassinat des quatre magistrats à Saïda», les autorités judiciaires préfèrent ne pas s’aventurer dans cette direction, poursuivant leurs investigations dans la plus grande discrétion. Quant à l’enquête sur la tentative d’assassinat de Saad, elle sera prochainement confiée à un nouveau juge d’instruction car, comme le déclare Addoum : «Ce n’est pas parce qu’un magistrat est mort que l’affaire dont il était en charge est classée». Reste à savoir pourquoi M. Saad a attendu un mois avant de lancer «sa bombe». «Je me trouvais aux États-Unis pour y suivre un traitement médical, répond le député. Je suis rentré depuis une semaine et il m’a fallu quelques jours pour me reposer et rassembler mes informations…». Rappelons que le président du Conseil M. Sélim Hoss est entré hier en contact avec le procureur Addoum et avec le député Moustafa Saad afin de se tenir informé des derniers développements dans cette affaire extrêmement délicate. Enfin, le député Saad a annoncé hier son intention d’adresser une question au gouvernement sur la non-diffusion par l’Agence nationale d’information de sa conférence de presse de dimanche. Et au-delà de l’enquête sur les assassinats, c’est, une fois de plus, le problème de la «sélection» (voulue ou non) des informations paraissant dans l’Ani, qui se pose. Qui fait le tri ? La question mérite une réponse rapide.
«Il fallait que je parle. La mort du président Hassan Osman m’a beaucoup affecté et je me sentais un peu responsable de sa disparition». Après un entretien d’une heure avec le juge d’instruction Raymond Oueidate, chargé par les autorités d’enquêter sur l’assassinat des quatre magistrats au Palais de justice de Saïda le 8 juin dernier, le député Moustafa Saad se sent un peu...