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Actualités - REPORTAGES

La Russie veut tenter une nouvelle médiation Belgrade mise sur Tchernomyrdin

Le langage des armes cèdera-t-il ne serait-ce qu’un pouce de terrain aux démarches politiques pour tenter de résoudre la crise des Balkans ? C’est la question qui se pose ici à Belgrade après une semaine d’enfer au cours de laquelle les initiatives diplomatiques se sont effacées devant la logique de la guerre. Les regards se dirigent de nouveau vers Moscou où le président Boris Eltsine entame aujourd’hui des concertations avec les hauts responsables russes, notamment avec l’ancien Premier ministre Viktor Tchernomyrdin à qui il a confié la tâche difficile de trouver une issue pacifique au conflit entre la Yougoslavie et l’Otan. Bien qu’ils évitent de faire le moindre pronostic sur les chances de succès de la médiation de M. Tchernomyrdin dont on ne connaît pas encore le plan, les responsables yougoslaves n’ont pas émis des réserves sur le choix de la personne de l’ancien Premier ministre russe. Les Yougoslaves ont informé M. Tchernomyrdin de leur vision de toute solution pacifique à la crise et des limites des concessions qu’ils sont prêts à présenter pour faciliter sa mission. La position de Belgrade a été communiquée au médiateur russe lors d’une longue réunion qu’il a eue vendredi avec l’ambassadeur de Yougoslavie à Moscou Borislav Milosevic, frère du président Slobodan Milosevic. La campagne militaire de l’Otan qui dure maintenant depuis 26 jours n’a visiblement pas fait céder les Yougoslaves sur l’essentiel, à savoir leur refus de toute présence militaire internationale au Kosovo. «La Yougoslavie est prête à toutes les concessions sauf celles qui sont susceptibles de remettre en cause sa souveraineté nationale et son intégrité territoriale», nous a déclaré le directeur du Département des relations publiques au ministère fédéral des Affaires étrangères, M. Rade Drobac. «De même que nous refusons catégoriquement l’occupation par des armées étrangères d’une partie de notre territoire», a-t-il ajouté. Cent cinquante mille soldats au Kosovo Au stade actuel des opérations militaires, la position de la Yougoslavie demeure inchangée. Toutefois, Belgrade se dit disposé à permettre «le retour immédiat» des réfugiés et à accorder une très large autonomie au Kosovo. Pour la Yougoslavie, la sécession du Kosovo ou la présence de forces étrangères dans cette province «signifie la fin certaine du pays». «Si elle perd le Kosovo, la Yougoslavie actuelle sera divisée en quatre entités, affirme Rade Bozovic, doyen de la faculté des lettres et des langues orientales. Le Monténégro proclamera son indépendance, donc plus d’accès à la mer ; la Voïvodine, dont la population est à majorité hongroise et qui est le grenier de la Yougoslavie, voudra aussi se séparer. Sans compter le Sandjak qui est peuplé de musulmans». C’est cela qui explique l’intransigeance de Belgrade et son attachement presque obsessionnel au Kosovo, où sont déployés 150 000 hommes en armes, selon le major-général Nebojsa Pavkovic, commandant de la IIIe armée yougoslave qui opère dans la province. Cette intransigeance n’a pas découragé M. Tchernomyrdin qui a intensifié ses concertations ces dernières 48 heures. Samedi, il s’est entretenu avec le chef de la diplomatie russe, Igor Ivanov, avec le vice-président de la Douma, Sergei Baburin, et avec des comités d’experts militaires et politiques spécialistes des Balkans. Il a également discuté de la crise yougoslave avec les ambassadeurs des États-Unis, de France et d’Allemagne à Moscou. Mais pourquoi Tchernomyrdin réussirait-il là où l’actuel Premier ministre Evgueni Primakov a échoué ? «Primakov jouit d’une grande popularité en Russie alors que le personnage n’inspire pas beaucoup confiance à Washington, indique un diplomate arabe en poste à Belgrade. Son éventuel succès dans le règlement de la crise des Balkans l’aurait transformé en candidat quasi imbattable aux élections présidentielles russes. C’est pour cela que les États-Unis ont étouffé dans l’œuf sa démarche. C’est pour cela aussi qu’ils l’ont pratiquement humilié en lancant l’attaque contre la Yougoslavie le 24 mars dernier, le jour même de sa visite prévue à Washington. L’avion de Primakov avait fait demi-tour au-dessus de l’Atlantique pour protester contre le fait qu’il n’ait pas été informé de la date du début de l’offensive». Par contre, Tchernomyrdin est un libéral qui prône une transformation en profondeur de la Russie sur le modèle occidental. Son éventuel succès dans le règlement de la crise yougoslave renflouerait sa carrière politique qui a reçu un coup très dur à cause de la crise financière d’août dernier. Une réussite le remettrait en scelle pour la course aux présidentielles.
Le langage des armes cèdera-t-il ne serait-ce qu’un pouce de terrain aux démarches politiques pour tenter de résoudre la crise des Balkans ? C’est la question qui se pose ici à Belgrade après une semaine d’enfer au cours de laquelle les initiatives diplomatiques se sont effacées devant la logique de la guerre. Les regards se dirigent de nouveau vers Moscou où le président Boris...