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Actualités - REPORTAGES

Euro-Méditerranée - Saïdi aujourd'hui à Stuttgart Une dimension économique à la participation libanaise

Les ministres des Affaires étrangères des quinze pays de l’Union européenne et de douze pays du sud de la Méditerranée (dont le Liban) se retrouveront jeudi et vendredi à Stuttgart pour décider du sort qu’ils feront au projet de partenariat euro-méditerranéen dont les fondements ont été posés à Barcelone, en 1995. C’est le ministre de l’Économie et du Commerce et de l’Industrie, M. Nasser Saïdi, qui présidera, avec le secrétaire général des Affaires étrangères, M. Zafer el-Hassan, la délégation libanaise à cette conférence. Le ministre doit quitter aujourd’hui Beyrouth pour la grande métropole allemande. Débordé, le chef du gouvernement Sélim Hoss, qui aurait dû participer aux travaux en sa qualité de ministre des Affaires étrangères, estime que le Liban est dignement représenté par la délégation officielle. Le niveau de représentation du Liban place d’emblée les discussions sur le partenariat à un niveau socio-économique qui est, somme toute, le moins compliqué et celui qui concerne directement et immédiatement les dirigeants des différents pays candidats. Des accords de participation doivent en effet être signés entre l’Union européenne et chacun des pays du sud de la Méditerranée. Le Liban et l’UE examinent toujours les conditions d’adhésion du Liban à ce processus. La signature de l’accord de participation pourrait intervenir en l’an 2000. Les pourparlers avec l’UE portent principalement sur la libéralisation totale des échanges économiques, ce qui demande du Liban un réaménagement radical de sa fiscalité et de son économie. Plus facile à dire qu’à faire, feront remarquer, à raison, les spécialistes. Les risques, en effet, sont énormes pour l’industrie et l’agriculture. Faute d’une mise à niveau adéquate – et on en est encore aux premiers pas –, une libéralisation des échanges signifierait pour ces deux secteurs une mort certaine. Par ailleurs, la libéralisation des échanges revient pour le Liban à renoncer à ses rentrées douanières. Donc, à leur trouver un substitut. Le principal étant l’instauration d’une taxe sur le valeur ajoutée (TVA). Au Liban, se serait là une véritable révolution, surtout si l’on sait que les recettes douanières représentaient en moyenne 50 % du montant du budget, durant les trois dernières années (2 104 milliards de livres, en 1998). Qu’est-ce qui oblige donc le Liban à adhérer à un ensemble économique à des conditions si draconiennes ? est-on tenté de s’interroger. Rien, sinon la réalisation qu’il s’agit là d’une des grandes orientations que prennent les échanges économiques et que, au risque de finir asphyxié, le Liban ne peut ignorer. Consciente de l’importance de l’effort exigé par les économies plus faibles, l’Union européenne a mis en place dans plusieurs pays des centres d’études de mise à niveau des entreprises, et a décidé de consacrer des fonds importants à de tels efforts. Mais encore une fois, la clé pour une évolution dans ce sens reste la signature d’un accord d’association à l’étude duquel, malheureusement, les entreprises privées et, en général, les sociétés civiles dans différents secteurs ont été insuffisamment associées. Faisant la part des choses, l’Union européenne a fixé à l’an 2000 la date idéale pour l’instauration du partenariat. Mais en pratique, depuis 1995, et compte tenu des lenteurs de ce processus et des conditions particulières que pourraient poser les pays candidats, une telle éventualité – si elle venait à se concrétiser – ne se produira pas avant l’an 2015. Quinze ans pour nous mettre à niveau et nous préparer au partenariat, ce devrait être suffisant pour un pays comme le nôtre, estiment les observateurs. Un processus complexe Si le partenariat nécessite ainsi une aussi longue période pour être mis en place, c’est qu’il s’agit d’un processus de haute complexité. Au plus simple, le partenariat euro-méditerranéen, c’est prendre trois morceaux de continents et en faire «une zone de stabilité, de prospérité et d’échange». Et pourtant, aussi simples et démonstratifs que l’on puisse être, l’Euro-Méditerranée demeure fille du possible et du pari. Le partenariat euro-méditerranéen a deux autres volets importants : un volet politique et un volet culturel. Et selon la Déclaration de Barcelone, constitutive du projet, les trois volets politique, économique et culturel doivent avancer de concert. Dans l’interaction de ses trois composantes, ce dialogue est porteur d’un grand espoir de compréhension mutuelle, donc de stabilité. Et c’est ainsi qu’il a été conçu. Encore faut-il saisir cette chance, ne pas en laisser mourir l’élan, par paresse autant que par indifférence. Encore faut-il ne pas en étouffer l’esprit par des préoccupations immédiates qui l’alourdissent. Le conflit israélo-arabe en est le meilleur exemple, mais pas le seul. Occasion historique Pour le Liban, pour d’autres pays arabes, il faut s’en convaincre, ce partenariat est une occasion historique. Économique, c’est entendu. Mais par-delà l’économique, une occasion d’élargir son champ de vision, de se hisser au niveau de ce que l’Occident a de meilleur, de se laisser imprégner par son esprit démocratique, un esprit qui a mis plusieurs siècles à se développer, et dont nous sommes invités à cueillir le fruit non pas dédaigneusement, mais avec attention. Dans leur fierté, les pays arabes donnent l’impression de ne vouloir recevoir de leçons de personne. Par contre, ils donnent l’impression de vouloir en donner au monde entier; et se considérer en mesure de dicter ce qu’ils souhaitent recevoir, comme s’il s’agissait d’un droit. Tel n’est pas l’esprit du partenariat. Pour accéder à celui-ci, les Arabes devront se hisser au-dessus de leur rhétorique et de leurs idéologies. Quelqu’un l’a dit : pour que ce grandiose projet réussisse, il y faut, paradoxalement, de l’humilité. Il y faut une écoute mutuelle Nord-Sud, pour démêler le vrai du faux, l’important de l’accessoire, le durable de l’éphémère. Il y faut aussi une distance à l’égard de son propre discours. L’intensité de l’obsession politique de l’unité est souvent en fonction inverse des actes concrets d’unification. Il y faut aussi un effort suivi de part et d’autre. L’Europe de son côté doit apprendre à écouter. Une zone de libre-échange économique, oui, mais avant cela, une zone de libre-échange culturelle et spirituelle aussi. Qu’on le veuille ou non, l’Euro-Méditerranée ne sera pas seulement une zone de laïcisme et de droits de l’homme désincarnés. Pour comprendre certaines aspirations qui se font jour, notamment dans les pays d’islam, l’Europe doit renouer avec ses sources chrétiennes. Jérusalem, autant que Bonn, Paris ou Rome, sera l’un des cœurs de cette Euro-Méditerranée qui se construit. Une autre façon de décrire cette «mare nostrum», c’est d’en désigner les ennemis : les trafiquants de drogue, l’argent sale, le terrorisme aveugle, mais aussi l’ignorance, l’intolérance. Cet obstacle est un médiateur. Cette mer est un berceau. Qui peut enfanter des princes ou des Gorgones.
Les ministres des Affaires étrangères des quinze pays de l’Union européenne et de douze pays du sud de la Méditerranée (dont le Liban) se retrouveront jeudi et vendredi à Stuttgart pour décider du sort qu’ils feront au projet de partenariat euro-méditerranéen dont les fondements ont été posés à Barcelone, en 1995. C’est le ministre de l’Économie et du Commerce et de...