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Actualités - REPORTAGES

Septième art - Une libanaise boursière du Festival méditerranéen de Montpellier Danielle Arbid, ou comment le journalisme mène au cinéma (photo)

Installée en France depuis dix ans, Danielle Arbid est passée ces deux dernières années, avec une facilité déconcertante, du journalisme à la réalisation de films. C’est par hasard qu’elle s’est retrouvée sur les plateaux de tournage. Le hasard n’étant jamais tout à fait fortuit, c’est aussi parce qu’elle sentait le besoin de «mettre en images des idées personnelles». Au départ, rien ne prédestinait cette journaliste libanaise à se retrouver derrière la caméra. Ni ses études de Lettres à la Sorbonne, ni l’école de journalisme (CFPJ, à Paris ) qu’elle intègre avant de se retrouver pigiste pour, entre autres, Libération, Les Échos ou Le Magazine Littéraire. Ni sa collaboration de trois ans au Courrier International, où elle était chargée de la section Monde Arabe. «Je n’avais jamais rêvé de travailler dans le cinéma», assure-t-elle. C’est une nouvelle Radem (Démolition), écrite en 1997 et inspirée par la nostalgie du Beyrouth d’antan – «que je n’ai pourtant pas connu», dit cette jeune femme de 29 ans – qui va déclencher son aventure cinématographique . «À travers, le parcours d’une femme qui part à la recherche de la photo de sa maison dans le centre-ville, dont il ne reste plus rien, “Radem” aborde la question de la trace du passé. Et comment cette trace disparaît». À l’instigation d’un copain, elle en envoie le scénario au «Groupe de recherches et d’essais cinématographiques» (GREC, une section du Centre national du cinéma français), qui lui octroie une subvention pour en faire un court-métrage. Quelques mois plus tard, pour le tournage, à Beyrouth et en arabe, n’ayant trouvé personne de disponible, Danielle Arbid s’improvise réalisatrice. «Je n’ai eu aucune difficulté», dit-elle. «D’autant que j’ai travaillé avec d’excellents techniciens». Le film de 17mn, sorti en 98, a obtenu, outre une très bonne critique dans la presse française, deux prix (meilleur film et meilleur réalisateur) au Festival du film de Beyrouth de la même année. Il a également été diffusé sur France 2, le 29 octobre dernier. Et a même été sélectionné au Festival de Rotterdam pour représenter la France. Caméra-jouet Le pied dans l’étrier, Danielle Arbid se prend au jeu…de la caméra. Car pour elle, c’est «comme si on m’avait placé un jouet entre les mains». C’est ainsi qu’en en moins de deux ans, elle écrit et réalise trois courts-métrages (fiction et documentaire) et s’attaque à un long-métrage, actuellement en préproduction. Son second film, Le passeur (13 minutes) est également né d’un concours de scénarios, sur le thème Vivre ensemble et demain, lancé pour sélectionner un bouquet de films qui vont représenter la France pour l’an 2000. Le passeur est retenu sur la liste des 13 films choisis parmi 150 participants. «Il s’agit d’un réfugié politique kurde qui cherche un travail à Paris. Le seul boulot qu’il trouve consiste à rapatrier les corps des travailleurs africains. Lui qui voulait s’intégrer à Paris se retrouve surtout intégré parmi les Africains. À sa première levée de cadavres dans une banlieue de la capitale, il se perd à Paris avec une dépouille sur les bras» . Très ironique «mais joviale en même temps», une satire bien sentie sur la convivialité entre peuples et ethnies à l’aube du troisième millénaire. Ce film, tourné à Paris avec des acteurs français, sortira le 1er janvier 2000. Si la réalisatrice se trouve à Beyrouth aujourd’hui, c’est pour les besoins du tournage d’un documentaire écrit pour la chaîne franco-allemande Arte. «C’est un documentaire sur Beyrouth mais traité de manière très personnelle. Un film qui mélange les genres comme c’est la mode actuellement et où fiction et réalité se télescopent». Elle n’en dira pas plus. Même laconisme sur le documentaire pour lequel elle a également obtenu une subvention et dont elle doit entamer le tournage bientôt. «À la frontière égyptienne. Il s’agit d’une famille palestinienne». Festival de Montpellier Elle a également terminé, au cours des derniers mois, l’écriture de son premier long-métrage, pour lequel elle vient d’obtenir une bourse du «Festival méditerranéen de Montpellier». (53 films en présélection, 12 en compétition pour 2 bourses) et un film de fiction dont les événements se passent pendant la guerre à Beyrouth. «C’est l’histoire d’une petite fille de 12 ans qui s’acharne à prouver à tout le monde qu’elle existe. Son entourage ne la voit pas. Elle se lie d’amitié avec une jeune bonne de 18 ans qui travaille chez les voisins. Elle cautionne les rendez-vous amoureux de la bonne, défend ses intérêts et s’attache très fort à elle. Le monde de la petite fille bascule le jour où la bonne s’enfuit avec son soupirant, un milicien». Serait-ce autobiographique ? «Absolument pas. Je puise des éléments de situations que j’ai vécues ou vues autour de moi mais l’autobiographie n’est pas mon genre. C’est en fait une sorte de réflexion sur les guerres intérieures bien plus destructrices que les bombardements et les obus». Si Danielle Arbid enchaîne avec enthousiasme les projets, c’est peut-être parce qu’elle a beaucoup de choses à dire. «Au bout d’un moment dans le journalisme, on se sent frustrée d’écrire sur les autres et pour les autres. J’avais envie de parler de choses qui me concernent». Consciente de ses lacunes cinématographiques, Danielle Arbid ne prétend pas faire des films «pour la gloire du cinéma. Je fais des films très personnels où je me mouille beaucoup. Je m’entoure cependant d’équipes de techniciens qui sont très bons». Elle aurait pu se tourner vers le roman, pour communiquer ses idées. «Mais alors quelle langue choisir, moi qui suis entre l’arabe et le français ?». Elle a donc préféré laisser parler l’image. Toujours universelle. Qu’elle soit documentaire ou de fiction.
Installée en France depuis dix ans, Danielle Arbid est passée ces deux dernières années, avec une facilité déconcertante, du journalisme à la réalisation de films. C’est par hasard qu’elle s’est retrouvée sur les plateaux de tournage. Le hasard n’étant jamais tout à fait fortuit, c’est aussi parce qu’elle sentait le besoin de «mettre en images des idées personnelles». ...