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Actualités - OPINION

Tribune Renverser l'ordre des priorités

Les dirigeants libanais ont soudainement découvert la semaine dernière – avec un retard de plusieurs mois – que la situation régionale est extrêmement périlleuse. Le ministre de l’Intérieur a parlé de «trois mois dangereux». Le président de la Chambre a affirmé, en évoquant d’une manière indirecte les pressions exercées, que «le Liban et la Syrie vivront ensemble ou mourront ensemble». Bref, la classe politique, jusque-là non concernée par les menaces voilées et les mises en garde répétées d’Israël, a brusquement pris conscience qu’il y a péril en la demeure. Mieux vaut tard que jamais. Mais pour les Libanais, désormais «unis dans la vie et dans la mort avec leurs frères syriens», plusieurs questions se posent: – La décision de retrait israélien du Liban-Sud a été annoncée le 17 mai 1999. Pourquoi nos dirigeants n’ont-ils pas réagi dès ce moment, Pourquoi tout ce temps perdu à découper le Liban en circonscriptions électorales tantôt dans le sens de la longueur et tantôt dans celui de la largeur, – Qu’en est-il de la résolution 425 et pourquoi le Liban donne-t-il l’impression de ne pas vouloir son application, La gêne des responsables politiques est évidente. Ils multiplient, de jour en jour, les conditions au retrait israélien, alors que cette résolution des Nations unies n’en comporte aucune puisqu’il est simplement demandé aux Israéliens d’évacuer «sans délai» le Liban-Sud. Et comment expliquer la position libanaise aux représentants de la communauté internationale qui travaillent sur le dossier de la négociation, – Y a-t-il conflit d’intérêt entre le Liban et la Syrie à ce stade de la négociation, Si oui pourquoi ne pas se mettre à table et discuter pour trouver une solution, L’absence de cohérence dans la position libanaise ne profite ni aux Libanais ni aux Syriens. Personne n’est dupe et le «service» rendu aux Syriens n’en est pas vraiment un. Pourquoi donc ne pas réfléchir à une politique plus réaliste qui prendrait en considération les intérêts des deux pays, et qui aurait le mérite d’être plus opérationnelle et rendrait à nos représentants un peu de crédibilité ? – Depuis 1990, l’État libanais déploie des efforts réels pour «libaniser» la résistance à l’occupation israélienne. Il y est presque parvenu. Pourquoi cette irruption du Jihad islamique palestinien qui s’est soudainement souvenu que le Sud devait être «un front ouvert avec Israël» ? Le président Sélim Hoss a très bien et très vite réagi. Mais la question demeure de savoir qui a permis aux militants du Jihad d’apparaître brusquement au Liban-Sud. – Les objectifs du gouvernement sont essentiellement d’ordre domestique: lutte contre la corruption, transparence, réduction du déficit budgétaire, réforme administrative, etc. Est-il en mesure de mener une négociation qui apparaît déterminante pour l’avenir du pays, le moment n’est-t-il pas venu de mobiliser toutes les ressources disponibles pour faire face à cette échéance cruciale, le recours à des piliers en matière de politique étrangère tels MM. Fouad Boutros et Ghassan Tuéni représente-t-il un aveu de faiblesse pour le pouvoir ou est-il le signe d’un sens des responsabilités ? Si, comme le pensent nos dirigeants, et sur ce point ils n’ont pas tort, le Liban traverse aujourd’hui une des phases les plus délicates de son histoire, il devient peut-être nécessaire de penser à un renversement des priorités. En juin 1982, quelques jours après l’invasion israélienne du Liban, le président Élias Sarkis formait un Comité de salut public pour tenter de sauver ce qui pouvait encore l’être. Aujourd’hui et alors qu’il est encore temps, ne faut-il pas réfléchir à une initiative du même type et faire assumer au plus grand nombre la responsabilité des choix à prendre ? Pareille mesure permettait de couper court à toutes les surenchères, aussi bien celles qui cherchent à sacrifier le Liban sur l’autel de la coordination avec la Syrie que celles qui attendent le moment venu pour sacrifier la Syrie au nom de la souveraineté nationale. Peut-être que nous pourrions ainsi faire l’économie de nouvelles violences et réaliser «à chaud» cette entente nationale qui n’a pas pu être faite «à froid».
Les dirigeants libanais ont soudainement découvert la semaine dernière – avec un retard de plusieurs mois – que la situation régionale est extrêmement périlleuse. Le ministre de l’Intérieur a parlé de «trois mois dangereux». Le président de la Chambre a affirmé, en évoquant d’une manière indirecte les pressions exercées, que «le Liban et la Syrie vivront ensemble...