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Actualités - REPORTAGES

Théâtre - Au Palais de l'Unesco, "Faust" de Goethe La condition humaine selon une vision "grotowieskeinne"

Drame universel donné dans une atmosphère «grotowieskienne», ce «Faust» de Goethe est sans nul doute une création expérimentale interessante. Présentée par le Goethe Institute de Beyrouth, cette pièce forte et d’une facture romantique, préparée hâtivement en dix jours par de jeunes acteurs locaux sous la direction de James Sloviak et Jairo Cuesta (tous deux anciens collaborateurs de Jerzy Grotowski, décédé en janvier dernier), est un moment de théâtre absolu où danse, chant et jeu emphatique et au symbolisme perceptible se rejoignent. Théâtre non conventionnel ou «bourgeois» mais requérant participation active du public assis à même le sol ou sur des chaises longeant les murs d’une salle presque nue; tel est le cadre ici de cette histoire de Faust qui a inspiré plus d’un écrivain et d’un musicien. Œuvre de toute une vie, Faust reprend et synthétise les differents aspects – populaires et littéraires – d’un mythe. Faust apparaît d’abord comme un vieux savant qui, après une vie de labeur et d’isolement, a soudain soif du monde et veut pouvoir en jouir. Après son pacte diabolique, il dispose d’une nouvelle jeunesse : il séduit et abandonne Marguerite, qui est condamnée à mort après avoir tué son enfant. Déchiré entre le chemin facile et l’esclavage que lui offre Méphistophélès, et le chemin difficile d’un homme libre que lui propose Dieu s’il se repent, Faust incarne ici avec force et émotion la condition humaine entière. On aurait aimé certainement l’entendre dans la langue marmoréenne et gutturale de Goethe (tant pis pour la compréhension en détail mais la musicalité de la langue aurait été si puissante !) mais elle est donnée ici dans une version anglaise un peu simplifiée et aux notions souvent approximatives car coupées de ses lancées philosophiques et de ses envolées poétiques. D’une durée d’une heure dix minutes, les deux parties de cette œuvre abrégée dans sa longueur même où l’homme est décrit dans toute son ambiguïté mais où il est finalement sauvé par l’action, le metteur en scène Sloviak, aidé par la présence en tant qu’acteur efficace de Jairo Cuesta, entreprend de faire revivre en grands tableaux graves et solennels cette «épopée» individuelle et métaphysique du magicien et savant Faust qui vend son âme au démon Méphistophélès en échange des biens terrestres. Composition étrange mais prenante où les habits modernes (robes arabes à côté d’un manteau en cuir noir trois-quarts avec écharpe sur la tête et lunettes de diva) et les jeans (noirs ou blancs avec une banale chemisette) font fi des siècles passés d’où a surgi cette narration mettant à l’épreuve l’homme et son sens de l’élévation (ou son besoin d’abjection !). Avec des voix basses mais maîtrisées, des gestes lents et parfois presque au ralenti, dans une atmosphère de gestuelle étudiée et cérémoniale où le corps a plus d’une éloquence et où l’esthétique n’est jamais négligée (sans que cela ait un sens péjoratif), cette représentation de Faust demeure attachante et captivante. Pour dix jours de préparation et pour de jeunes acteurs pas si frottés aux conceptions de Grotowski, chanter avec naturel, danser avec grâce, s’exprimer avec naturel et une certaine autorité théâtrale en un anglais clair et net, voilà qui a du mérite. Comme dirait cette dame en sortant du spectacle encore tout envoûtée de cette atmosphère singulière où seule vacillait une bougie, traînaient des chiffons par terre et retentissaient en chœur les voix des acteurs, «Das ist nicht sclecht» ! En effet, même si c’est une expression théâtrale aujourd’hui emphatique et quelque peu dépassée, ce n’est pas mal du tout !
Drame universel donné dans une atmosphère «grotowieskienne», ce «Faust» de Goethe est sans nul doute une création expérimentale interessante. Présentée par le Goethe Institute de Beyrouth, cette pièce forte et d’une facture romantique, préparée hâtivement en dix jours par de jeunes acteurs locaux sous la direction de James Sloviak et Jairo Cuesta (tous deux anciens collaborateurs...