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Actualités - ANALYSE

Abou Ammar contrôle la carte de la présence palestinienne L'implantation en filigrane ...

Localement, le verdict suprême rendu par contumace, et par le tribunal militaire, à l’encontre du chef arafatiste Sultan Aboul Aynaïn, a fait l’effet d’une bombe. Dans les chancelleries, où le côté sensationnel de l’affaire passe au second plan, on suit quand même avec beaucoup d’intérêt cet épisode. Qui semble s’inscrire dans le cadre régional et plus exactement, découler de l’hostilité que Damas voue à Abou Ammar . C’est la deuxième fois que la justice libanaise rend, toujours par défaut, une sentence à la peine capitale contre un activiste palestinien. On sait en effet que le fameux Abou Mahjane, commanditaire de l’assassinat du habachi cheikh Nizar Halabi à Beyrouth et présumé cerveau de plusieurs attentats meurtriers, est lui aussi promis à la potence. Si jamais on l’attrape, car il est réfugié au camp de Ain el-Héloué, près de Saïda, qui jouit d’une extraterritorialité de fait, puisque les autorités libanaises ne se résignent pas à y déployer les forces de l’ordre. Tout comme Abou Mahjane, Aboul Aynaïn refuse de se livrer à la justice du pays qui l’abrite. Il est convaincu, aux termes du jugement rendu à son encontre, de constitution de bande armée, de meurtre, de rapt, de séquestration de personnes et de trafic d’armes. Il avait refusé de comparaître devant le tribunal pour se défendre. Et après le jugement il a tenu, comme on sait, une conférence de presse, pour parler de machination politique orchestrée par un centre d’influence qu’il s’est abstenu de dénommer. Aboul Aynaïn qui, pour sa part, est réfugié au camp de Rachidiyé près de Tyr, a renforcé sa garde pour résister l’arme au poing à toute tentative d’arrestation. Le timing de la décision libanaise retient évidemment l’attention. Selon des sources informées, l’homme (qui pourtant circulait librement ces derniers temps, à preuve qu’il a fait récemment une tournée politique des pôles locaux), était sous le coup d’une première condamnation par défaut depuis le début des années quatre-vingt-dix pour trafic d’armes. Aboul Aynaïn, on le sait aussi, a entrepris depuis quelque temps de redonner au Fateh le contrôle total des camps palestiniens du Liban. Renforçant considérablement ses troupes et son équipement, grâce à des arrivages d’effectifs comme de fonds ou d’armements, il a pu atteindre son but dans la principale agglomération de réfugiés, Ain el-Héloué, maintenant sous la coupe des arafatistes. Partant de là, Abou Ammar semble disposer aujourd’hui de l’importante carte de la présence palestinienne au Liban qui constitue un levier de pression non seulement sur ce pays même, mais aussi sur la Syrie et sur Israël à la fois. Pour bien marquer le succès de son plan, Aboul Aynaïn a organisé récemment une «cérémonie de promotion» pour une escouade de quelques dizaines de commandos qui a suivi un cycle d’entraînement au Sud. Auparavant, il avait balayé de Ain el-Héloué, par des coups de main ciblés mais aussi par la diplomatie, la douzaine d’organisations palestiniennes hostiles aux accords d’Oslo. Habilement, Aboul Aynaïn, à Ain el-Héloué comme au camp de Nahr el-Bared au Nord, a provoqué des heurts entre différentes organisations dans les camps et sous prétexte de ramener le calme, est parvenu à les neutraliser. Il est parvenu parallèlement à faire passer ce message au pouvoir libanais : il est de votre intérêt de n’avoir dans les camps qu’un seul interlocuteur. Surtout s’il faut coordonner pour contrer l’implantation. Une thèse répercutée également en direction des médias, notamment de la presse écrite où l’on a pu lire ces derniers mois des analyses allant dans ce sens. Son action a été accélérée dans la mesure où l’on semblait se rapprocher après Charm el-Cheikh de la conclusion d’un accord israélo-palestinien définitif, incluant la question de la diaspora et des réfugiés. Pour négocier, Abou Ammar avait besoin de tenir solidement en main la carte palestinienne extérieure, à défaut de pouvoir sur le plan intérieur éliminer complètement le Hamas et le Jihad islamique. Or, quand on en vient au problème des réfugiés, le Fateh, malgré ses vertueuses protestations, est bien plus proche de la position israélienne que de la position libanaise. Certains de ses cadres n’hésitent même pas, dans leurs assises privées, à parler du «droit de non-retour». Car les territoires dits autonomes, surbondés, ne peuvent accueillir les transplantés. Du reste Arafat, il faut lui reconnaître cette clairvoyance, avait vu cela de très loin. Dès 1982, au sommet arabe de Fès, il réclamait et obtenait qu’une indemnisation substantielle soit prévue pour les réfugiés qui décideraient de ne pas regagner la Palestine mais de rester là où ils sont. Une résolution à laquelle seul le Liban s’était alors opposé, en faisant valoir qu’elle constituait une prime à l’implantation. Le verdict contre Abou Aynaïn paraît donc comme une tentative de contrer les visées d’Abou Ammar. Des officiels affirment que le jugement de mort sera exécuté. On peut poliment en douter. Car, n’est-ce-pas, on ne saurait vendre la peau de l’ours. Avant de l’avoir tué.
Localement, le verdict suprême rendu par contumace, et par le tribunal militaire, à l’encontre du chef arafatiste Sultan Aboul Aynaïn, a fait l’effet d’une bombe. Dans les chancelleries, où le côté sensationnel de l’affaire passe au second plan, on suit quand même avec beaucoup d’intérêt cet épisode. Qui semble s’inscrire dans le cadre régional et plus...