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Actualités - REPORTAGES

Patrimoine - Une négligence qui dépasse l'entendement Dix personnes au moins ont participé au vol des mosaïques de Chéhim

Qui est derrière le vol des mosaïques de Chéhim ? De toute évidence, il s’agit de professionnels. Pourquoi le site n’est-il pas gardé en permanence ? Personne n’a embauché un gardien, mais les gendarmes assuraient des patrouilles. Il y a une semaine, le scandale des mosaïques volées à Chéhim a éclaté. Depuis, deux des trois pièces ont été retrouvées. Mais que s’est-il passé exactement ? La mission polonaise a entamé, il y a deux ans, les travaux de fouille sur le site. À la découverte de la basilique a succédé celle des mosaïques du pavement. Leur beauté a ébloui plus d’un spécialiste et les autorités concernées ont décidé de les conserver sur place afin d’ouvrir le site au public. À cette fin, la mission a compté parmi ses membres des experts en restauration. Mais en août dernier, la mission a découvert le vol des mosaïques. Aussitôt avertie, la DGA a dépêché l’archéologue Renata Tarazi sur les lieux pour qu’elle dresse un rapport sur la question. C’est sur cette base que la DGA a saisi le parquet du Mont-Liban : une demande d’enquête a été déposée auprès du procureur et l’enquête a commencé il y a plus d’un mois. Les voleurs, des professionnels Certes, les techniques du détachement de la mosaïque sont bien connues, mais leur application est un vrai travail de professionnels. Le vol à Chéhim a donc été fait par des experts en la matière. Preuve en est : l’une des pièces subtilisées est la petite mosaïque portant des inscriptions. En effet, les spécialistes savent que les pièces d’art sont toujours vendues beaucoup plus chères quand elles sont munies d’une inscription les datant à l’année près. D’autre part, le vol en lui-même est une prouesse : la pièce centrale est formée d’un motif cadré ayant un large bord de tesselles blanches. Or, c’est le motif seulement qui a été découpé, au millimètre près. Quant à la technique du détachage utilisée, elle a consisté à enduire l’objet d’art de colle, y mettre une étoffe résistante et à la détacher par la suite tout en enlevant quelques centimètres du mortier. Les pilleurs ont enroulé le tout avant de l’emporter. Ce vol a nécessité la contribution d’au moins 10 personnes pour détacher et porter cet amas de pierre calcaire, sans compter que le site est ceint de hauts barreaux de fer ! Ce vol minutieux a sans doute été commis il y a quelques mois. De fait, la couche de terre et le plastique utilisés auparavant par la mission pour dissimuler la mosaïque ne semblaient pas être touchés. Comment justifier par ailleurs l’absence d’un gardiennage efficace sur le site ? Dans la loi sur les antiquités, et selon la tradition établie entre la DGA et les missions archéologiques, c’est à ces dernières que revient la tâche d’embaucher un gardien et de lui payer le salaire minimum du pays. Celui-ci doit, de préférence, assurer la protection du site durant toute l’année. Tel est, par exemple, le cas du tell de Arqa, dans le Akkar, où le gardien vit, avec sa famille, dans la maison de fouilles. Pourquoi ce n’est pas le cas de Chéhim ? Juste après la découverte des mosaïques, c’est l’armée libanaise qui s’est chargée de veiller sur le site jusqu’au début de cette année. Quand on a décidé de changer la vocation du site en l’ouvrant au public, l’armée a alors quitté les lieux. Elle a été relayée par les forces de sécurité du poste de Chéhim qui ont alors organisé des patrouilles dans la région. Sachant que le détachement de la mosaïque prend au moins une journée, le temps que la colle sèche, comment tout ce travail a pu être fait au nez et à la barbe des agents de l’ordre ? Certes, cette histoire a connu un dénouement heureux car deux des trois mosaïques volées ont été retrouvées, mais tout semble indiquer que la troisième pièce risque de ne pas être découverte. En effet, les pilleurs risquent de la détruire afin qu’elle ne soit pas retrouvée en leur possession… si elle n’a pas été déjà vendue ! Le sort des objets retrouvés Aucune décision concernant le sort des objets retrouvés n’a été prise encore, mais des pourparlers entre la DGA et la mission polonaise ont commencé et tout semble indiquer que les mosaïques retourneront à Chéhim. L’équipe venue pour leur restauration travaillera alors sur leur réinstallation. Entre-temps, les patrouilles continueront à circuler devant le site, car recruter un gardien est impossible, un décret ministériel prohibant toute embauche au sein de la DGA. En conclusion, il est important de souligner que cette direction est la dernière à blâmer dans cette histoire. Elle est sans directeur titulaire depuis des mois et, malgré la grande compétence de son personnel, est incapable de contrôler toutes les infractions sur ses sites. De plus, le nombre d’archéologues travaillant à la DGA suffit à peine à couvrir une région du Liban.
Qui est derrière le vol des mosaïques de Chéhim ? De toute évidence, il s’agit de professionnels. Pourquoi le site n’est-il pas gardé en permanence ? Personne n’a embauché un gardien, mais les gendarmes assuraient des patrouilles. Il y a une semaine, le scandale des mosaïques volées à Chéhim a éclaté. Depuis, deux des trois pièces ont été retrouvées. Mais que s’est-il...