Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

La visite d'Albright fait couler beaucoup d'encre Avis divergents dans les cercles locaux concernés

On le sait depuis de longues années : si la politique étrangère libanaise se laisse si volontiers ligoter, si elle est si dépendante, c’est que, livrée à elle-même, elle manque de cohésion. Dernière illustration en date de cette triste réalité : les analyses des cadres locaux concernant la visite d’Albright à Damas et son passage à Beyrouth se révèlent très divergentes. Le seul point sur lequel ces messieurs se montrent d’accord, c’est qu’on ne peut pas apporter de jugement définitif quant à l’évolution du processus en se basant sur de premières passes d’armes entre Américains, Syriens et Libanais. – Certaines sources estiment qu’au nom du pragmatisme le plus élémentaire, les délégations des États-Unis, de la Syrie, du Liban et d’Israël vont discuter à New York, en marge des travaux de l’assemblée générale des Nations unies, de la reprise des pourparlers, de la date, du site et de l’ordre du jour. Étant bien entendu qu’avant toute chose les Israéliens doivent confirmer qu’ils acceptent de reprendre les négociations à partir du point qu’elles avaient atteint en 1996. C’est-à-dire, selon les Syriens, en base de l’engagement pris alors par Rabin de restituer tout le Golan. Selon ces sources, Madeleine Albright s’est contentée d’un rôle d’auditeur lors de ses entretiens avec les dirigeants syriens et libanais. Elle aurait recueilli leur point de vue quant aux concessions qu’ils pourraient faire, dans le cadre d’un compromis. Il s’agirait en pratique de reprendre les négociations à partir du point qu’elles avaient atteint, sans définir ce stade avec précision. Ce qui voudrait dire que l’engagement antérieur de Rabin ne garde qu’une valeur de principe général. Et ne signifierait pas, comme l’exige la Syrie, qu’Israël admet un retrait derrière les frontières du 4 juin 1967. On sait en effet que l’État hébreu, arguant d’un découpage des frontières différent prévu dans les fameux accords Sykes-Picot, affirme que le territoire de Houma dans le Golan, particulièrement riche en eaux, fait partie intégrante de l’ancienne Palestine et ne doit pas être attribué à la Syrie qui cependant en disposait jusqu’en 67. Selon ces sources, Madeleine Albright a évité d’aborder ce sujet épineux, du moment qu’elle n’avait pas de bonnes nouvelles à apporter sur ce point à ses interlocuteurs syriens. La secrétaire d’État US, ajoutent ces personnalités, sait en effet qu’Ehud Barak veut en quelque sorte se faire payer son Charm el-Cheikh avec Arafat en refusant d’envisager des concessions sur le volet syrien ou le volet libanais. Diplomatiquement, estiment ces sources, Washington préfère attendre que Barak, qui est maintenant sur un petit nuage, remette les pieds sur terre et redevienne raisonnable, pour aborder avec lui la question des pourparlers sur le Golan et sur le Sud. Le Premier ministre israélien est pour le moment inabordable, surtout après les explosions de Haïfa et de Tabaraya comme après l’attentat contre son bon ami Moubarak. Cercle étroit Bref, selon ces sources, dont la sympathie pour les Américains paraît assez évidente, il faut laisser leur chance à ces derniers et comprendre qu’ils évoluent dans un cercle étroit, ce qui ne les empêche pas d’exercer d’actives pressions afin que les pourparlers reprennent en octobre ou en novembre prochain. En face, les cadres locaux réputés pour leur sempiternelle méfiance à l’encontre de Washington affirment qu’Albright s’est montrée de parti pris, à preuve que le président du Conseil M. Sélim Hoss a dû prendre ses distances par rapport aux positions qu’elle a ouvertement affichées. Ces sources soutiennent que les Américains appuient à fond Ehud Barak et veulent faire plier la Syrie comme le Liban, pour un accord de capitulation plutôt que pour une paix véritable. Selon ces personnalités, Barak va probablement se contenter de Charm el-Cheikh et geler la reprise du dialogue avec la Syrie ainsi qu’avec le Liban, sauf si ces deux pays acceptent de négocier sans conditions préalables. C’est-à-dire sans exiger qu’Israël confirme l’engagement pris par Rabin de rendre tout le Golan à la Syrie. Ces sources affirment surtout qu’Albright a transmis, en l’appuyant, un message menaçant des Israéliens : ou bien la Syrie et le Liban font entendre raison au Hezbollah pour qu’il cesse ses actions, ou bien ils en auront à supporter les conséquences. Ce qui signifierait une escalade d’envergure avec abolition des restrictions fixées par les accords d’avril 1996 et frappes ciblées de l’infrastructure libanaise. Insistant sur le côté négatif de la visite d’Albright, ces mêmes sources s’indignent qu’elle ait rouvert de vieux dossiers, comme l’exigence de faire passer en jugement les Libanais qui dans le temps avaient attaqué les Américains (attentat contre l’ambassade à Aïn Mreissé contre le quartier général des Marines, assassinat de l’ambassadeur Melloy, etc.).
On le sait depuis de longues années : si la politique étrangère libanaise se laisse si volontiers ligoter, si elle est si dépendante, c’est que, livrée à elle-même, elle manque de cohésion. Dernière illustration en date de cette triste réalité : les analyses des cadres locaux concernant la visite d’Albright à Damas et son passage à Beyrouth se révèlent très divergentes. Le...