Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGES

Astronomes amateurs, journalistes et curieux s'étaient donné rendez-vous Atmosphère de kermesse à l'observatoire de Chbanyé(photo)

Il fallait être au rendez-vous. Participer à l’événement et regarder le dernier croissant de soleil de ce millénaire. Un peu plus de deux cents personnes se sont regroupées au cours de la journée d’hier à l’observatoire de Chbanyé (caza de Baabda), inauguré vendredi dernier. La petite foule joyeuse et amusée, constituée notamment de journalistes, de photographes, d’astronomes amateurs et de curieux, formait un contraste avec les rues désertes que chacun a dû prendre pour arriver jusqu’à l’observatoire. C’est un chemin escarpé, serpentant dans les collines de Chbanyé, qui mène à l’observatoire. La route étroite s’achève au Telescope Land, pourvu d’un grand parking et divisé en deux zones. Un lopin de terre où pour le moment, douze télescopes sont installés et un autre plus vaste, aménagé pour recevoir les visiteurs : tables, chaises et kiosque à boissons et sandwiches. À 11 heures 30 minutes, photographes et cameramen préparent déjà leur matériel et plantent les trépieds de leurs caméras dans le champ des télescopes. Dans la partie consacrée au repos des visiteurs, certains attendent le moment fatidique en prenant du café, ou en lisant le journal. Les personnes présentes se sont déplacées de Beyrouth et de diverses localités du Mont-Liban. Elles sont venues à Chbanyé en famille ou accompagnées de leurs amis. L’ambiance est semblable à celle d’une kermesse. L’attente (de l’éclipse) et l’ennui ont permis à la conversation de s’engager facilement entre inconnus. Comparaison des lunettes spéciales, chewing-gum et bonbons mis en commun, commentaires sur les superstitions ancestrales… Nada qui habite Beyrouth est arrivée à l’observatoire à 11 heures avec Sélim son mari et ses deux filles Aya et Sarah. Elle aurait aimé se rendre en Irak pour observer l’éclipse totale. «Mais le chemin est long surtout qu’il faut aller en voiture», note-t-elle. Sa fille Sarah a 17 ans et demi, elle voudrait devenir astrophysicienne. Elle aussi est déçue de rester au Liban. «Je me contenterai de regarder les taches noires du soleil visibles uniquement au télescope», dit-elle. Nahla habite également Beyrouth. Accompagnée de son mari et de ses deux enfants âgés de dix et huit ans, elle estime qu’il ne faut pas rater un tel événement. C’est donc à l’observatoire qu’il fallait se rendre. Place aux étrangers Une partie non négligeable des personnes venues observer l’éclipse était formée soit d’étrangers résidant au Liban soit de Libanais en vacance dans le pays. Nicole, hollandaise, attend l’éclipse avec son amie américaine. Elles sont accompagnées de leurs enfants. Toutes les deux sont mariées à des Libanais de la région. «Ce n’est que mardi soir en cherchant des lunettes spéciales que nous avons su que l’observatoire est ouvert au public», raconte Nicole. Tania, russe mariée à un Libanais, est arrivée à l’observatoire avec son fils Michel (3 ans), son époux et son beau-frère. «Ma belle-mère est à la maison avec volets et rideaux fermés», indique Tania qui ne comprend pas les raisons de la panique libanaise. «Avant de venir à Chbanyé, mon mari a téléphoné à beaucoup de ses amis ; tout le monde a refusé de l’accompagner», se plaint-elle, en ajoutant «nous étions seuls sur la route et en voiture». Le phénomène se fait attendre Ziad, qui vit aux Caraïbes, s’est rendu à l’observatoire avec Habib, Zeina et Fouad qui habitent Élissar. Le groupe s’est décidé à se rendre à Chbanyé, juste une heure avant l’éclipse. Ziad a déjà vu une éclipse partielle à l’étranger. «On avait rempli des seaux noirs d’eau et l’on avait contemplé le reflet de l’éclipse dans l’eau», indique-t-il. Habib, qui est photographe amateur, n’a pas trouvé de filtres spéciaux pour l’éclipse solaire pour le zoom de sa caméra mais il prendra des photos coûte que coûte. Treize heures : l’éclipse est déjà visible à Londres. La foule se presse devant l’unique poste de télévision qui retransmet les images. On se prépare à l’éclipse partielle du Liban. Les personnes présentes munies de lunettes, dont certaines ont été achetées sur place à 10 000 livres, regardent le ciel en guettant le moindre bout de lune qui cacherait le soleil. «Ça commence», crie une femme. Tous ont les yeux fixés à une sphère lumineuse observée sur fond noir. Les téléphones commencent à sonner. Des correspondants demandent si, comme eux, les autres ont commencé à voir l’éclipse. Un jeune homme tente de superposer plusieurs paires de lunettes et zooms de caméra. Les lunettes s’enflammeront avant qu’il les porte à ses yeux. À l’observatoire un seul télescope a été mis au service du public. Il faut donc faire la queue pour pouvoir durant quelques secondes observer le même spectacle vu avec des lunettes spéciales, à une différence près : distinguer les taches brunes sur le soleil. M. Majdi Saad, directeur de l’observatoire, se hisse sur une chaise et déclare : «À deux cents mètres, il y a une étable de chèvres, vous pouvez aller voir la réaction des animaux», dit-il. Certains y vont mais ne remarquent rien. La file est longue devant le télescope et l’attente est pesante. Fadia, qui est venue seule d’Achrafieh, s’est mise à deux reprises derrière le télescope sans pouvoir distinguer l’image tellement attendue. «Je n’ai pas su comment observer et je n’ai rien vu», se plaint-elle. Tony, étudiant en génie, observe l’éclipse avec des lunettes spéciales qu’il a lui-même fabriquées. Sur des lunettes de plongée, il a fixé deux verres de soudeur, l’un ayant un indice 10 l’autre portant un indice 12. Il lui fallait un minimum d’indice 14 pour observer l’éclipse sans danger. Il a fait appel ensuite à un opticien pour les pourvoir d’un détecteur de rayons ultraviolets. «Toute l’opération m’a coûté 10 000 livres», indique-t-il. Pourquoi ne les a-t-il pas commercialisées. «Je suis un amateur, j’en ai fait deux paires, l’une pour moi et l’autre pour un ami», indique Tony. L’apogée de l’éclipse se fait attendre et la foule veut profiter au maximum du moment. Petit à petit, vers 14 heures 30, la température commence légèrement à baisser et le ciel devient d’un bleu un peu plus clair. L’ombre du soleil par terre et sur les feuilles des arbres a la forme d’un croissant. C’est tout ce qu’on verra au Liban. À partir de 14 heures 15 minutes, la foule, sans attendre la fin de l’éclipse, commencera à se disperser.
Il fallait être au rendez-vous. Participer à l’événement et regarder le dernier croissant de soleil de ce millénaire. Un peu plus de deux cents personnes se sont regroupées au cours de la journée d’hier à l’observatoire de Chbanyé (caza de Baabda), inauguré vendredi dernier. La petite foule joyeuse et amusée, constituée notamment de journalistes, de photographes,...