Yougoslavie - Moscou obtient une zone de responsabilité au Kosovo Washington résigné face au coup de poker russe

La Russie a obtenu dimanche le principe d’une zone de responsabilité au Kosovo, faisant apparemment plier Washington après l’entrée fracassante de ses militaires à Pristina, mais la question d’un «commandement unifié» de la Kfor restait posée. Le président russe Boris Eltsine pourrait, selon des sources bien informées à Moscou, avoir lui-même, sur proposition de l’armée, donné l’ordre d’entrer avant l’heure au Kosovo dans la nuit de vendredi à samedi. Il s’est entretenu hier au téléphone avec le président Bill Clinton. Le secrétaire d’État adjoint américain Strobe Talbott a admis ouvertement que la Russie devrait avoir une zone au Kosovo où «sa responsabilité sera claire et visible», à l’issue de négociations russo-américaines à Moscou. Le blocage des Américains sur cette revendication de Moscou avait poussé les militaires russes à entrer les premiers au Kosovo s’attribuant de facto un secteur, celui de l’aéroport de Pristina, chef-lieu de la province. «Je ne pense pas qu’il y ait de doute sur le fait que la Russie devrait avoir une zone dans laquelle sa responsabilité sera claire et visible», a déclaré le diplomate américain. «Ce n’est pas seulement un objectif légitime, c’est un objectif que les États-Unis soutiennent», a souligné le responsable. La secrétaire d’État américaine Madeleine Albright a cependant précisé que les Russes n’auraient pas un «secteur» militaire complet. En échange du contrôle d’une zone, les Russes ont donné l’assurance à M. Talbott qu’il n’y aurait pas de nouveau déploiement de leurs troupes dans la province sans accord avec les Occidentaux. Il reste que beaucoup de Moscovites ont accueilli la concession américaine d’une zone de responsabilité russe au Kosovo comme une victoire sur l’Otan, mais certains redoutaient dimanche les conséquences de l’envoi de soldats en Yougoslavie. Les Russes envisagent d’envoyer jusqu’à 10 000 hommes au Kosovo. Sans eux, la Kfor devait compter environ 50 000 hommes, dont 40 000 soldats britanniques, français, italiens, allemands et américains déployés dans cinq secteurs distincts.