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Actualités - ANALYSE

Vie politique La loi électorale : une délicate question de dosage ...

Mettre au point un code électoral équilibré et équitable n’est pas une affaire de tout repos. Il faut veiller, dans un pays composite, à ce que les conditions soient objectivement les mêmes pour tous et partout. Ce qui n’est pas évident quand un même principe apparemment égalitaire constitue un avantage pour des parties déterminées et un net handicap pour d’autres. Entre autres exemples des difficultés qui se présentent : comment faire en sorte de réduire les disparités énormes dans les voix recueillies ? Suivant les circonscriptions, on trouve en effet des députés élus par plus de 15 000 voix et d’autres par moins de 5 000. Et qui sont donc, à l’échelle de la nation, moins représentatifs que nombre de perdants ! Comment aussi assurer les équilibres, c’est-à-dire les quotas confessionnels, au sein de chaque circonscription ? Il faudra faire des prodiges pour redessiner la carte électorale en fonction de tels critères. Et, techniquement, cela signifie qu’il faudra abandonner la configuration administrative, ne tenir compte ni du mohafazat ni du caza pour former les circonscriptions. Une césarienne qui n’irait évidemment pas sans de furieuses levées de boucliers de la part de forces politiques lésées. Qui auront beau jeu de soutenir que l’on a ôté telle localité de son cadre électoral habituel pour favoriser tel candidat. Une riche palette de formules a été essayée, dans les annales électorales du Liban dit indépendant. – Le scrutin le plus tristement célèbre, par la triche généralisée qui l’avait marqué, reste celui organisé le 25 mai 1947 sous la houlette du pouvoir destourien d’alors. La Chambre précédente, qui comprenait 55 membres, avait été dissoute, sous prétexte d’éviter que les élections n’aient lieu en été. En 1950, le président Béchara el-Khoury a promulgué une loi électorale portant à 77 le nombre de députés. Des élections ont eu lieu en 1951 sur cette base. – Le 30 mai 1953, sept mois après son arrivée au pouvoir, le président Camille Chamoun a dissous le Parlement pour laxisme et multiplication des défauts de quorum. Il a ramené le nombre des parlementaires à 44 et miniaturisé le scrutin : 33 circonscriptions, 22 à siège unique et 11 à deux députés. Autre innovation : le vote n’était plus un simple droit mais un devoir obligatoire, toute abstention étant punie d’une amende de 50 à 100 LL. En revanche, les femmes et les jeunes de 21 ans ont obtenu cette année-là le droit de vote. En 1957, le même président a porté le nombre de députés à 66 et ramené les circonscriptions à 27, variant entre un siège unique et six députés. – Nouveau régime, nouveau système électoral : le président Fouad Chéhab a changé le 26 avril 1960 la loi, fixant à 99 le nombre de députés et à 26 celui des circonscriptions, sur base du caza sauf bien entendu à Beyrouth, divisé en trois zones, et sauf aussi Baalbeck relié au Hermel et Rachaya rajouté à Marjeyoun. – Ce cadre global a été ensuite respecté en 1964, en 1968 et en 1972. Cette législature devait durer comme on sait vingt ans à cause de la guerre. Elle devait même durer, en base du dernier décret de prorogation signé par les présidents Élias Hraoui et Sélim Hoss, jusqu’en 1994. Mais elle avait perdu 28 de ses membres et un député, Ara Yerevanian, avait démissionné. En 1991, on a donc parachuté, par nomination, des «députés». Mais on a vite fait de se raviser puisque le 22 juillet 1992, en base d’une nouvelle loi inégale (des mohafazats par-ci, des cazas par-là, surtout au Mont-Liban), on a organisé des élections, boudées comme on sait par 86 % des électeurs. Ce qui n’a pas empêché les taëfistes de remettre à peu près le même couvert quatre ans plus tard, en 1996. Avec toujours le même nombre de 128 députés. Dans ce domaine aussi, le nouveau pouvoir convient de la nécessité d’une réforme. Mais laisse entendre, par la bouche du ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr, que rien ne presse et qu’on a le temps. Car, pour le moment, la priorité va à la réforme administrative et au budget.
Mettre au point un code électoral équilibré et équitable n’est pas une affaire de tout repos. Il faut veiller, dans un pays composite, à ce que les conditions soient objectivement les mêmes pour tous et partout. Ce qui n’est pas évident quand un même principe apparemment égalitaire constitue un avantage pour des parties déterminées et un net handicap pour d’autres. Entre autres...