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Actualités - REPORTAGE

Basma Asfour-Bazzi, Amal Saadé, Saadi Al-Hakim Trois objectifs différents : le mouvement, l'ancrage et le nu (photos)

A la galerie Agial, rue Abdel Aziz, Hamra, trois photographes: Basma Asfour-Bazzi, des scènes de rue où le hasard se taille la part du lion; images d’un patio d’enfance d’Amal Saadé; et des nus signés Saadi al-Hakim. Basma Asfour-Bazzi se veut uniquement «photographe de rue». Elle est intéressée par l’interaction entre l’homme et sa ville. «La rue, symbole de la vie urbaine, des milieux populaires, offre à mon avis un cadre idéal pour la photo. Et elle est du reste mieux équipée qu’un studio», dit-elle. Le quotidien devient monotone à la longue. Pour y ajouter une touche de peps, y poser un regard neuf, Basma Asfour-Bazzi le sublime à travers son objectif. Les sujets apparaissent bien nets, contrastés en noir et blanc. Comme par exemple cette photo prise sur la corniche de Manara par un jour de tempête. L’eau de mer, écumante, en mouvement, accuse un fort contraste avec la texture rêche et rigide des rochers. L’interaction entre le solide et le liquide, le stable et le mouvement, le sombre et le lumineux. Asfour-Bazzi entend ainsi montrer l’infinie qu’offre la nature à travers la combinaison des formes et des matières. Basma Asfour-Bazzi sillonne le milieu urbain comme une chasseresse à l’affût de sa proie. Ayant localisé un endroit ou un sujet-type, elle y revient plus tard, la caméra au poing pour cadrer, attendre le moment propice. Une licence en biochimie de l’AUB en poche, elle part s’installer à Paris puis à Amman. C’est dans les rues de la Ville Lumière et en assistant à des expositions de photographies qu’elle s’est dit «moi aussi je peux faire cela». «Ce que l’on peut mettre en scène dans un studio on peut le trouver dehors. La ville offre des cibles très diverses. En me balladant, je fais des repérages. La figure humaine s’intègre au paysage par accident ou mieux, par un heureux hasard. Ce qui m’importe c’est le cadrage». «Je situe un endroit. J’y reviens et j’attends parfois qu’un bus passe en arrière-plan ou qu’un élément humain se manifeste». Elle trouve aussi des thèmes. «Parfois je pense au sujet avant de faire le repérage. Par exemple, je voulais photographier un type qui fouille dans le coffre de sa voiture ou une assemblée d’hommes réunis, sur un trottoir autour d’un jeu de cartes». Des scènes de la vie beyrouthine, en somme... Elle prend son temps, elle guette le moment propice avant de cliquer. «C’est de cette manière que tout un chacun devrait apprendre à regarder son entourage. Il faut prendre le temps de voir ce qui se trouve autour de soi, d’observer, de s’émerveiller aussi ...». «Des coins de rues que l’on voit partout, des coins standard, d’un paysage banal on peut faire une photo superbe». La vie quotidienne, avec toute sa simplicité, devient un sujet magnifié à travers l’objectif du photographe. Les démons en ma demeure Amal Saadé donne à voir pour sa part 17 photographies sur le thème «La maison de Borj». L’artiste a voulu immortaliser cette maison qu’elle a habitée avec ses parents et sa grand-mère alitée. Une maison qu’elle a été contrainte d’abandonner à plusieurs reprises, chassée par les bombardements. Saadé est revenue sur les lieux qui ont abrité son enfance et nourri ses souvenirs. Elle trouve sa maison transformée et occupée par deux familles étrangères. L’artiste a voulu retourner sur les lieux sacrifiés, afin de pouvoir humer les odeurs de son enfance, de photographier ce qui en reste. «Deux séries d’images entretiennent une dialectique féconde» lit-on sur le catalogue de l’expo. «D’une part, nous sommes conduits à voir la violence qui s’est acharnée sur la pierre. Nous sommes face à une réalité brute, où les ruines sont éclairées par une lumière d’aplomb sans ombre. C’est un monde où la guerre et ses équivalents ont fait perdre toute syntaxe. Aucun ordre, aucune raison ne peut être lue ou devinée dans cet amoncellement de hi-fi et de pierres... D’autre part, la dure froideur factuelle de la pierre livrée aux rayons du soleil est soulagée momentanément par l’accueil végétal du patio. La violence de la lumière est nuancée par l’ombre des feuillages...». «Ces trajets représentent deux courants affectifs qui coexistent d’une manière non pacifique dans l’âme de l’artiste. Entre la clairvoyance de celle qui a vu la folie humaine et qui ose porter un regard dénué d’espoir sur cette lumière vive et la chaleur nostalgique de l’enfant caché en elle qui cherche un refuge et des repères, nous devinons une béance énorme que la souffrance ne comble pas entièrement». Nous avons tous un paradis perdu, une maison d’enfance, un temps qui a emporté le patio de nos jeux complices. Mais là, l’artiste veut nous raconter une histoire différente. La maison n’est plus du tout ce qu’elle était. Et c’est sous son ancienne forme qu’elle obsède encore la photographe. C’est à travers l’art, la photographie en particulier, qu’Amal Saadé tente donc d’exorciser les démons qui habitent sa demeure... Des nus novateurs Saadi al-Hakim, photographe publicitaire, enseigne la photo au département Design de l’Université américaine de Beyrouth. Sa spécialité: traits et couleurs sur un fond de nu féminin. Depuis l’antiquité, on sculpte ou peint le nu d’une certaine manière. Al-Hakim a voulu briser les règles classiques. «Cette expérimentation m’est venue à l’esprit après avoir vu une étude sur la projection d’images sur un corps féminin nu. Cette projection, bien qu’effectuée avec un certain sens de l’esthétique, n’arrivait cependant pas à briser le stéréotype du nu. J’ai alors pensé qu’en inversant le rôle du nu comme sujet principal pour le substituer à la couleur de l’éclairage et à la forme pure de la ligne, le corps devient un simple support ou un canevas de soutien». Techniquement, l’artiste utilise un simple projecteur, modifié pour l’occasion, ainsi qu’un film transparent avec des lignes tracées au Lettraset. Le modèle photographique de nus classique se trouve ainsi marié à la projection du film et des filtres de couleurs. Le choix des couleurs varie entre le vert qui masque la tonalité de la peau, le jaune vif qui l’irradie, le rouge qui ajoute un certain dynamisme et le bleu, enfin, qui confond la ligne noire et la rend moins rigide. Résultat: le nu traditionnel devient support de couleurs et de formes.
A la galerie Agial, rue Abdel Aziz, Hamra, trois photographes: Basma Asfour-Bazzi, des scènes de rue où le hasard se taille la part du lion; images d’un patio d’enfance d’Amal Saadé; et des nus signés Saadi al-Hakim. Basma Asfour-Bazzi se veut uniquement «photographe de rue». Elle est intéressée par l’interaction entre l’homme et sa ville. «La rue, symbole de la...