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Actualités - ANALYSE

Les intentions tactiques du régime passées au crible

Etrange organisme, la caste politique ignore avec superbe les vrais problèmes du pays pour se nourrir de faux suspenses. Très sérieusement, un débat larvé, doublé d’un procès d’intentions, s’engage aujourd’hui dans «les cercles concernés» autour de ces interrogations oiseuses: le régime va-t-il dans les quatre mois qui lui restent mettre en train une série de dispositifs qui constitueraient une voie que le successeur devrait forcément emprunter? Va-t-il, par des procédures pouvant entraîner de vives polémiques, régler ses comptes, laissant au prochain régime le soin de réparer les dégâts politiques qu’il aurait ainsi occasionnés? «Ces questions portent en elles-mêmes une seule réponse: en fin de parcours, comme tout véhicule, le char de l’Etat doit uniquement continuer sur sa lancée», estime un ancien ministre. Pour qui «il est évident, dès lors, qu’avant de se renouveler au niveau des personnages, le système doit un peu reposer ses mécanismes. Et se contenter d’expédier les affaires courantes. Il serait préjudiciable qu’on lie le prochain pouvoir par des initiatives à l’emporte-pièce, même sur des projets dits techniques. Ainsi, on prétend qu’il faut une session parlementaire extraordinaire d’été pour le relèvement de l’échelle des salaires dans la fonction publique; mais, à y regarder de près, on se rend compte que cette mesure ne pourra en tout cas être appliquée que début 99, et qu’en outre, les sources de financement ne sont pas encore assurées. Il serait de plus tout à fait inopportun de l’adopter quand on sait que le prochain régime pourrait tout de suite la reconsidérer. Car, tout bien considéré, il pourrait estimer qu’une telle disposition ne doit être prise qu’à la lumière d’une réforme administrative globale, ce qui est tout à fait logique: pourquoi prévoir une enveloppe de 100 milliards quand 50 milliards pourraient suffire, après émondage d’une administration surchargée…» Pour ce vétéran, «il est également inutile de suer sang et eau en été Place de l’Etoile pour plancher sur un projet de loi sur les loyers qui, rejeté aussi bien par les propriétaires que par les locataires, ne peut de toute évidence pas passer avant une recomposition consensuelle pouvant prendre plusieurs mois. Là aussi, il est plus logique de laisser au prochain régime et au prochain gouvernement le soin de traiter cet important dossier socio-économique dans le cadre, nettement plus rationnel, d’une stratégie globale de l’habitat». Austérité Toujours dans le même sens, cette personnalité souhaite qu’on «ne ligote pas le prochain régime par des décisions faisant de certains locataires de biens domaniaux maritimes des propriétaires en titre, car il pourrait là aussi vouloir inscrire cette question dans un dossier global de réforme fiscale en profondeur, visant à assurer en permanence, et non une seule fois, des ressources supplémentaires au Trésor. Ceci parallèlement à l’application d’une politique budgétaire de rigueur mettant fin aux fantaisies ruineuses qui ont marqué l’ère de la troïka». «Sur le plan administratif aussi, conseille ce mentor, il vaut mieux continuer à pallier les vacances de postes par des intérims sans procéder à des nominations que le prochain régime pourrait vouloir annuler». Pour cet ancien, «ouvrir une session extraordinaire d’été c’est surtout relancer, qu’on le veuille ou non, les spéculations sur un amendement de l’article 49 C (Constitution), déclencher par là une bataille para-présidentielle qui empoisonnerait tout l’été. D’autant plus inutilement que tout concourt pour indiquer que les décideurs n’ont pas l’intention d’altérer les règles du jeu pour le moment, qu’ils ont en effet fait savoir à tous qu’ils ne feront leurs choix qu’à partir de l’ouverture de la période électorale fin septembre et qu’il serait toujours temps alors d’amender les textes, si besoin était». En tout cas, on peut faire au régime tous les procès d’intention que l’on veut, sauf celui de rechercher une nouvelle prorogation. En effet des sources concordantes confirment que le président de la République, maître de l’initiative constitutionnelle dans le domaine des révisions de la loi fondamentale, ne veut pas du tout proposer l’amendement de l’article 49 C, que cela soit pour ouvrir la voie à une nouvelle reconduction de son mandat ou pour permettre l’élection d’un haut fonctionnaire en exercice (plus exactement: n’étant pas à la retraite depuis au moins deux ans.) Il reste que si les décideurs en jugent autrement en temps voulu, c’est-à-dire en automne, la révision peut toujours se faire durant la session ordinaire par une motion parlementaire engageant un projet de loi qu’établirait le gouvernement.
Etrange organisme, la caste politique ignore avec superbe les vrais problèmes du pays pour se nourrir de faux suspenses. Très sérieusement, un débat larvé, doublé d’un procès d’intentions, s’engage aujourd’hui dans «les cercles concernés» autour de ces interrogations oiseuses: le régime va-t-il dans les quatre mois qui lui restent mettre en train une série de...