Des rumeurs de division de la municipalité secouent la ville Tollé à Hadeth après la décision d'ajournement du scrutin

Une dure bataille électorale s’annonçait à Hadeth entre quatre listes électorales que séparaient des tendances politiques différentes et des dissensions familiales. Mais la surprise s’est produite jeudi soir: le ministère de l’Intérieur a annoncé que les élections seraient reportées au 4 octobre, puis, modifiant une seconde fois la date, a fixé le scrutin au 28 juin prochain, à cause d’une erreur dans les listes d’électeurs, notamment celles des quartiers de Haret el-Botm et Sebnaï. Les habitants et les instances politiques de Hadeth ainsi que les candidats ont réagi en un même mouvement d’indignation: comment une telle erreur peut-elle être commise quand l’Etat a maintes fois annoncé qu’il était prêt pour l’échéance municipale? Certains ont vu dans cette erreur la peur de certains pôles du pouvoir de voir les listes opposantes rafler les sièges municipaux, d’autres n’ont pas voulu faire un procès d’intention. Mais une autre crainte a fait son chemin dans l’esprit des principaux concernés: le spectre de la division de la municipalité de Hadeth en deux ou même trois parties, option unanimement rejetée par toutes les tendances. Sitôt après l’annonce du report des élections à Hadeth, ainsi qu’à Beit Chabab et Fayadieh, les membres de la liste pro-aouniste présidée par M. Hikmat Dib a tenu une conférence de presse pour commenter cette décision. Dans leur communiqué, ils ont déclaré que «les noms de tous les habitants de Hadeth figurent dans les listes d’électeurs et ont été publiés dans le Journal officiel, et l’excuse invoquée par le ministère de l’Intérieur n’est qu’un prétexte». Ils se sont également interrogés sur le timing de cette décision: «Pourquoi reporter les élections deux jours avant la date du scrutin? Cette décision est probablement motivée par le fait que le pouvoir a réalisé que la bataille était perdue pour lui à Hadeth». Au cours de la conférence de presse, le général Michel Aoun a appelé de Paris. Il a constaté que «ce qui s’est passé à Hadeth n’est pas une erreur, et le ministre de l’Intérieur devrait dans tous les cas présenter sa démission». «Murr, Hariri et Berry ne sont pas plus forts que Suharto», a-t-il ajouté, qualifiant ces mesures de «mafieuses». Le général Aoun a par ailleurs averti les habitants de Chiyah qui pourraient, selon lui, être les prochains sur la liste. «Il faut que Chiyah reste solidaire de Hadeth parce qu’elles mènent le même combat», a-t-il assuré, déclarant que «Chiyah devrait faire face à la liste pro-Murr qui sera désastreuse pour son avenir si elle est élue». Enfin, le général Aoun a considéré que, «dans tous les cas, ces élections seront frauduleuses avec une telle équipe au pouvoir». «Certains médias proches du pouvoir essayent de donner une fausse image de l’opposition, en faisant état de dissensions en son sein», a-t-il révélé. Daccache et Karam: On veut diviser Hadeth Les principales personnalités politiques de Hadeth interrogées par «L’Orient-Le Jour» sur la question du report des élections ont donné des avis différents quant à la signification réelle de cette décision, mais ont toutes exprimé leurs craintes de voir la municipalité de Hadeth divisée en plusieurs parties. Selon M. Pierre Daccache, député de la région, «le pouvoir a probablement eu peur de la force de l’opposition dans la région, ce qui a motivé la décision du ministre de l’Intérieur». «Notre Etat est désorganisé et nos dirigeants font des promesses qu’ils ne tiennent pas», a-t-il ajouté. «J’ai bien peur que ces élections soient un moyen de distraire les gens de l’échéance présidentielle, de la situation au Liban-Sud et même des problèmes régionaux». A la question de savoir si un retard serait défavorable pour l’opposition, M. Daccache a répondu: «Il donnera évidemment du temps aux proches du pouvoir pour s’organiser». Mais tout le monde ne partage pas cet avis. M. Ernest Karam, ancien président de la Ligue maronite qui avait rejoint M. Daccache dans un comité pour la formation d’une liste de coalition à Hadeth, a déclaré que «l’opposition est trop divisée pour constituer une véritable menace pour l’Etat». M. Georges Yaghi, tête de liste proche de M. Daccache, et M. Louis Karam, tête de liste soutenu par M. Elie Hobeika, ministre des Ressources hydrauliques et électriques, ont tous deux reconnu qu’«il s’agit là d’une simple erreur administrative». Qu’en est-il des rumeurs de division? «Nous croyons que les dirigeants veulent diviser la municipalité de Hadeth en deux, la partie nord pour les maronites et la partie sud pour les orthodoxes et diverses fractions», nous a appris M. Ernest Karam. «Mais si une telle division survenait, les habitants de Hadeth auraient une riposte très violente». «Hadeth forme une unité géographique et sociale qu’il est impensable de vouloir diviser», a renchéri M. Daccache. «Nous ne permettrons pas qu’une telle division ait lieu». Les mêmes propos ont été tenus par M. Louis Karam.