La parade des pendus

Belle image d’Epinal à l’aube du troisième millénaire: un assassin et son complice qui se balancent au bout d’une corde et une kyrielle d’ahuris aux doigts calleux en train d’applaudir et de se repaître du spectacle. Pour ou contre la peine de mort? Là n’est évidemment pas la question et, à la limite, dans le débat interminable des juristes, des philosophes et des intellectuels du monde entier, il n’y a pas grand chose à tirer de l’opinion d’une poignée de fonctionnaires libanais empressés et encore moins du premier d’entre eux, venu jouer les Salomon du pauvre, à quelques encablures de sa voie de garage. Ce dont il est question, en revanche, c’est de cette représentation publique venue en droite ligne de l’Inquisition. La justice des tribus afghanes du désert! Voilà maintenant qu’on se met à singer les Taliban. Ne manquait plus que les boissons fraîches, les pop-corn et les marchands de cigarettes pour ajouter à l’ambiance. Ou alors, pourquoi pas, façon khmers rouges en lâchant la furia des excités sur les deux dépouilles mortelles afin de les dépecer tranquille. Vengeance pour vengeance, autant le faire dans les règles de l’art... Quand je pense que ce sont les mêmes tordus qui s’offusquent devant un téton ou une touffe qui dérapent à la télé, couinant comme quoi pareilles images sont étrangères à nos mœurs... D’ailleurs, parlons-en de ces mœurs: hier encore, les enlèvements sur une base confessionnelle, c’était chez nous; les obus sur la population civile, c’était encore dans nos quartiers; les massacres de femmes et d’enfants au nom de libérations bidon, c’était aussi dans nos murs... Il manquait la cerise sur le gâteau: le gala de la balançoire de l’au-delà. Bombe le torse et dors tranquille, c’est ce qui s’appelle avoir des traditions en pendule...