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Actualités - CHRONOLOGIE

Les turcs d'Allemagne se forgent un contre-modèle culturel

Coincés entre deux mondes et leurs valeurs parfois opposées, les enfants et petits-enfants d’immigrés turcs d’Allemagne se sont forgé un contre-modèle culturel, turc «à l’allemande». Les chansons d’Aziza A, les livres de Feridun Zaimoglu ou encore les films de Fatih Akin en témoignent chacun à leur manière: si les textes de la rappeuse féministe sont un plaidoyer pour l’intégration, l’écrivain dénonce l’indifférence et le racisme des Allemands et prône l’altérité, tandis que le cinéaste fait de l’auto-dérision. «On nous prend pour une sorte de horde de singes anatoliens», écrit Feridun Zaimoglu, 32 ans. Dans ses livres «Abschaum» (rebut) et «Kanak Sprak» (langue canaque), il fustige l’«Almanya» (Allemagne) et livre une peinture au vitriol du monde des Turcs en Allemagne, l’univers des «Kanak». «J’emmerde votre grammaire, votre langue, vos bêlements de peuple unifié», clame-t-il aux Allemands. Evoquant avec mépris les «assimilés adaptés», Zaimoglu loue les «bâtards» qui assument leurs origines et appelle les Turcs à puiser «des forces dans leur différence». Il s’adresse aux 700.000 enfants de la deuxième ou troisième génération turque âgés de 20 à 35 ans qui vivent en Allemagne et s’y créent un monde à eux. Ces dernières années, les discothèques turques ont ainsi fleuri dans les métropoles du pays, nées d’un ras-le-bol général du délit de faciès à l’entrée des night-clubs allemands. A Hambourg, le jeune public turc, pour moitié féminin, danse désormais sur la piste d’«Efsane», perchée à cent mètres du sol, dans la tour de télévision locale, ou chez «Cirgin». Les jeunes se retrouvent aussi au «Lemon» et au «Hadigari» à Berlin, ou a «Bodrum» à Cologne, sur de la pop turque et des titres internationaux soul ou funk. «C’était impensable il y a encore quelques années», juge Aziza A, 26 ans, de son vrai nom Alev Yildirim, qui chante en allemand et en turc sur des rythmes hip-hop orientaux. «Les jeunes Turcs sont volontiers présentés comme des hors-la-loi par les médias et nous, les femmes, opprimées et voilées», estime-t-elle. Aziza A est partie en croisade contre le machisme turc, pour aider à l’émancipation des opprimés. «Dans la rue, il aborde toutes les femmes. Car les hommes ne pensent qu’avec leur queue», chante-t-elle. Les jeunes femmes d’origine turque ne sont pas épargnées. Aziza A condamne en vrac leur pruderie et leur résignation: «Le sexe, vous n’en parlez pas. Vous êtes toutes des vierges Marie! Ne niez donc pas, que cela vous donne du plaisir!», clame-t-elle dans son album «Il est temps», qui a fait l’effet d’une bombe dans la communauté turque d’Allemagne. «Vous êtes intelligentes, jeunes et sexy, ne cachez pas votre féminité, c’est un cadeau de Dieu», lance Aziza à l’adresse des jeunes filles. Le réalisateur Fatih Akin, 25 ans, a, quant à lui, choisi l’ironie et l’auto-dérision pour évoquer cet univers germano-turc bancal, racontant notamment les tribulations d’un trio étranger — un Serbe, un Turc et un Grec — qui fricote avec la mafia. (AFP,Reuters)
Coincés entre deux mondes et leurs valeurs parfois opposées, les enfants et petits-enfants d’immigrés turcs d’Allemagne se sont forgé un contre-modèle culturel, turc «à l’allemande». Les chansons d’Aziza A, les livres de Feridun Zaimoglu ou encore les films de Fatih Akin en témoignent chacun à leur manière: si les textes de la rappeuse féministe sont un plaidoyer...