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Actualités - REPORTAGE

Affaire Karamé - La Cour de justice entend deux témoins Khalil Matar est de nouveau la vedette du procès (photo)

Deux témoins ont semé hier la confusion dans les esprits à l’audience du procès Karamé. Une confusion alimentée par la profusion de détails techniques fournis par le brigadier inculpé Khalil Matar, heureux d’expliquer à la cour, aux avocats et aux journalistes les caractéristiques de son poste radio Genav, qui n’en finit plus de susciter des interrogations. «C’est clair», entendait-on un peu partout dans les rangs des avocats, mais le problème, c’est que l’interprétation de la défense différait de celle de la partie civile. Et dans l’assistance, nombreux étaient ceux qui avaient le sentiment que l’on en était revenus au point de départ. Et Noël dans tout cela ? Il n’y a que l’inculpé Keitel Hayeck pour s’en souvenir puisqu’il demande au président de la cour Mounir Honein l’autorisation de passer la fête en famille… L’hélicoptère Puma No 906, à bord duquel est mort le premier ministre Rachid Karamé le 1er juin 1987, aurait-il eu deux pilotes ? Le colonel Antoine Boustany avait, au cours d’une audience précédente, affirmé avoir piloté l’appareil le jour du drame et hier, le brigadier William Mlayès a insisté sur le fait que c’était lui qui pilotait ce même hélicoptère au moment de l’explosion. À part ce détail, les déclarations des deux officiers de l’aviation qui tenaient les commandes de l’appareil No 906 le 1er juin 1987 sont pratiquement concordantes. Mais Mlayès est beaucoup plus accablant contre le brigadier Khalil Matar. D’abord, il identifie le document présenté par le commandement de l’armée comme étant l’affiche énumérant les fréquences-radios importantes collée sur la paroi interne des Puma. Matar avait contesté ce document, surtout parce qu’il y est dit que les bases aériennes de Rayack et de Halate avaient la même fréquence. Matar jure en effet qu’il est impossible que deux bases puissent avoir la même fréquence et le commandant en chef des forces aériennes, le brigadier Joseph Ghosn, entendu hier, a confirmé cela, tout en précisant qu’il se pouvait qu’à certaines périodes et pour des raisons pratiques, deux bases aient eu la même fréquence. Tous ces détails, qui peuvent paraître fastidieux, sont en fait d’une très grande importance. Il s’agit de déterminer si le poste radio Genav, en possession de Matar le jour de l’assassinat et qu’il avait emporté avec lui à bord du bateau d’où a été actionnée la commande de l’explosif, était essentiel pour la réussite de l’opération. L’acte d’accusation et certains témoins affirment que c’est grâce à ce poste – qui permet de capter les communications entre les pilotes et les tours de contrôle ou les bases aériennes – que les passagers du bateau ont pu savoir que le premier hélicoptère qui a survolé la région de Madfoun au matin du 1er juin 1987 n’était pas le bon. Ils ont en effet entendu le pilote dire «Proceeding to Adma». Mais Matar (et Samir Geagea qui se pose comme son défenseur) tente de démontrer que le Genav n’était d’aucune utilité dans l’attentat. D’une part, l’hélicoptère No 906 était strictement surveillé et par conséquent, il ne pouvait être confondu avec un autre et d’autre part, et c’est là où le brigadier a multiplié les explications, les fréquences installées sur son poste ne permettaient pas de capter la fréquence de la base de Kleyate à laquelle s’adressait le pilote qui a lancé la phrase «Proceeding to Adma». Explications techniques Hier, toutefois, après de longues explications particulièrement techniques et de nombreux apartés entre les deux brigadiers (le témoin et l’inculpé) et les magistrats, le commandant des forces aériennes, le brigadier Ghosn, a affirmé que la fréquence de la base de Keyate était 123,1. Or, le brigadier Matar a déclaré à la cour que cette fréquence installée sur son Genav, est celle de Rayack. Par conséquent, son poste pouvait entendre le fameux «Proceeding to Adma». Cette conclusion, établie après des heures d’explications ardues, d’indications et de contre-indications, jalonnées de remarques diverses et de rares coups de maillet, provoque un silence dans la salle. L’assistance devenue rare à mesure que les heures passent croit avoir mal compris et les magistrats Mounir Honein et Ralph Riachi ainsi que le procureur Addoum sont les seuls à réagir. Naturellement, tout cela n’est pas définitif et le brigadier Ghosn ainsi que d’autres officiers, notamment le commandant des forces aériennes en 1987 Hanna Sleylati, doivent encore être entendus. Mais si cette affirmation s’avère vraie, elle tranchera un des points obscurs de ce dossier. Il en reste beaucoup d’autres, notamment l’identité de celui qui a posé la bombe à bord de l’hélicoptère. Le brigadier William Mlayès a laissé entendre hier qu’il pouvait bien être le technicien Jean Azzé, de la base d’Adma, mort lors d’une panne en plein vol d’un avion Fuga piloté par le capitaine Georges Sadaka. Le brigadier Matar avait été chargé de mener une enquête sur cet accident et selon le témoin Mlayès, celle-ci n’avait pas réussi à déterminer les causes de la panne. Mlayès a confié à la cour que le colonel Boustany, qui était membre de la commission d’enquête présidée par Matar, lui avait raconté qu’en fait, l’avion militaire Fuga avait essuyé des tirs qui ont provoqué sa chute et la mort de ses deux passagers. Au sujet de l’attentat qui a causé la mort de Rachid Karamé, le brigadier Boustany a encore déclaré que l’hélicoptère aurait normalement dû exploser au large et se noyer dans la mer avec ses passagers. Mais par miracle, il a réussi à atterrir à Halate et seul Karamé est mort. L’audience se prolonge jusqu’à 23h et dans la salle, tout le monde semble avoir oublié que Noël est dans quelques heures. Il est vrai que pour les six inculpés, ce ne sera qu’un réveillon solitaire, avec pour unique échéance la fin de ce procès. C’est d’ailleurs un peu pour eux que le président Honein a décidé d’accélérer les rythmes des audiences à partir du 15 janvier 1999. Ils seront ainsi bientôt fixés sur leur sort.
Deux témoins ont semé hier la confusion dans les esprits à l’audience du procès Karamé. Une confusion alimentée par la profusion de détails techniques fournis par le brigadier inculpé Khalil Matar, heureux d’expliquer à la cour, aux avocats et aux journalistes les caractéristiques de son poste radio Genav, qui n’en finit plus de susciter des interrogations. «C’est...