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Actualités - INTERVIEWS

Walid Joumblatt, ministre des Déplacés Il y aura moins de liberté(photo)

Si certains le pensent tout bas, lui le dit tout haut. Le ministre des Déplacés Walid Joumblatt est le seul à avoir accueilli avec circonspection, voire avec méfiance, l’élection du général Émile Lahoud à la présidence de la République. Le chef du Parti socialiste progressiste (PSP) craint que s’il y a changement sous le nouveau mandat, ce soit vers le pire, notamment sur le plan de la liberté d’expression. «On dit du général Lahoud qu’il est un homme fort, fait-il observer. Effectivement, il est fort grâce à l’institution militaire, dans une conjoncture où la majeure partie de la classe politique et la plupart des journalistes ont démissionné moralement et préfèrent pratiquer le mensonge. Lahoud sera fort parce qu’il va s’entourer d’une équipe de travail puissante pour faire face à un autre homme fort (le chef du gouvernement) Rafic Hariri». M. Joumblatt pense qu’il y aura changement, mais pas nécessairement dans un sens positif. «Le général Lahoud sera obligé d’avoir recours à ses instruments militaires dans un pays où l’armée est un sujet tabou, déclare le chef du PSP. On ne peut pas, par exemple, discuter des effectifs de l’armée ou de son budget. Comme si l’armée ne commettait jamais d’erreurs. L’armée n’est-elle pas une grande milice dirigée par un chef suprême?». Faut-il s’attendre à des progrès au niveau de la lutte contre la corruption ? «L’armée elle-même est-elle à l’abri de la corruption ?», se demande M. Joumblatt. «Peut-être bien que le nouveau régime combattra la corruption, entreprendra de restructurer l’Administration et accordera davantage de pouvoir à la magistrature. Mais nous devons préserver la liberté d’expression. Et je vois malheureusement venir un changement caractérisé par plus de contrôle et de surveillance sous prétexte de vouloir maintenir l’ordre. D’ici un ou deux ans, il n’y aura plus d’opposition. Le prétexte est déjà prêt : faire avorter les complots israéliens». M. Joumblatt pense qu’on ne connaît pas assez le général Lahoud pour pouvoir émettre un jugement préalable sur son mandat. «Il y a une inconnue, c’est l’armée, dit-il. Pourquoi cette énorme masse d’hommes ? Soixante mille militaires, c’est beaucoup. Il s’agit d’un fardeau économique considérable. L’armée est dans la rue depuis la tentative de coup d’État contre le président Fouad Chéhab (le 31 décembre 1961). Tout cela fait partie d’un climat général arabe qui n’est pas favorable à la démocratie». Mais le général Lahoud n’a-t-il pas à son actif la réunification de l’institution militaire et l’instauration d’une nouvelle orientation visant à la lutte contre l’occupation et les agressions israéliennes ? «Si demain Israël se retire, que fera-t-on de cette énorme masse de soldats ?, s’interroge M. Joumblatt. L’armée sera, comme elle l’a toujours été, un instrument de répression interne». M. Joumbatt s’emporte contre la classe politique, qu’il accuse d’avoir des convictions changeantes. «Devant un tank israélien, les hommes politiques deviennent pro-israéliens. Et devant un tank syrien, ils deviennent pro-syriens. Il faudrait peut-être ajouter une nouvelle plaque sur le fleuve de Nahr el-Kalb (où les grands conquérants ont gravé leurs exploits)», conclut le ministre, sur un ton amer.
Si certains le pensent tout bas, lui le dit tout haut. Le ministre des Déplacés Walid Joumblatt est le seul à avoir accueilli avec circonspection, voire avec méfiance, l’élection du général Émile Lahoud à la présidence de la République. Le chef du Parti socialiste progressiste (PSP) craint que s’il y a changement sous le nouveau mandat, ce soit vers le pire, notamment...