La rencontre a eu lieu samedi à Damas dans la plus grande discrétion Trois heures d'entretien franc et positif entre Bachar El-Assad et le président de la Ligue Maronite

Trois heures quinze d’entretien à bâtons rompus entre M. Bachar el-Assad et le président de la Ligue maronite, Pierre Hélou, samedi, à Damas. C’est la nouvelle qui a éclipsé, hier, les retombées du sommet libano-syrien de samedi dernier, et les spéculations qu’il alimente. Un sommet sur les détails duquel les trois présidents respectent une stricte consigne de silence, en attendant l’arrivée du secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, vendredi prochain. Avare lui aussi de détails, le président de la Ligue maronite a confié à «L’Orient-Le Jour» que la rencontre a eu lieu dans la plus grande discrétion à la demande du dauphin présumé du chef de l’Etat syrien, et a été «l’occasion d’une conversation à bâtons rompus au cours de laquelle tous les sujets ont été abordés, dans un esprit très franc et positif». M. Hélou était accompagné de deux autres membres de la Ligue maronite, MM. Rachad Salamé et Georges Béchir. Ces derniers se sont rendus hier au siège patriarcal maronite, à Bkerké, pour rendre compte au patriarche de la teneur de leurs entretiens. Pour sa part, M. Hélou a présidé une réunion du Conseil de la Ligue, tenue dans la discrétion, pour lui faire part de la rencontre de samedi. Dans les milieux politiques, on n’a pu s’empêcher de faire des rapprochements entre la rencontre de M. Bachar el-Assad avec la Ligue maronite, la récente visite du chef du gouvernement à Bkerké et de l’ouverture d’un Walid Joumblatt sur le PNL, le parti Kataëb et le Bloc national. Sans nécessairement faire le lien entre ces trois événements, il faut y voir la manifestation d’un même «climat» politique, caractérisé par une volonté de dialoguer et de revoir les rapports entretenus depuis quelques années par les dirigeants syriens, et leurs alliés libanais, avec les communautés chrétiennes en général, et les maronites en particulier. Il faut rappeler par ailleurs que, sous la présidence de M. Pierre Hélou, la Ligue maronite avait rédigé un mémorandum sur les rapports avec la Syrie qui avait été discuté avec tous les députés maronites, en particulier avec M. Sleiman Frangié, bien connu pour ses liens d’amitié avec le fils du chef de l’Etat syrien. M. Frangié pourrait donc ne pas être étranger à la rencontre de samedi dernier. Le mémorandum soulevait en particulier les sujets tels que la redistribution du pouvoir après les accords de Taëf, la marginalisation des communautés chrétiennes, les prérogatives du chef de l’Etat, la nécessité de corriger le déséquilibre dans le rapport des forces politiques interne. Autant de sujets qui devraient normalement avoir été abordés par M. Hélou avec M. Bachar el-Assad. D’autre part, dans le cadre de ses consultations nationales (VOIR PAGE 3), le président du Conseil a reçu hier soir une délégation de la Ligue maronite conduite par M. Hélou. «Tous les sujets ont été abordés», a déclaré le président de la Ligue, à l’issue d’une audience qui a duré 3h30. Et d’ajouter: «Je ne peux pas dire que nous soyons d’accord sur tout». M. Hélou devait préciser que cette réunion sera suivie d’autres, au cours desquelles seront examinés, tour à tour, plusieurs dossiers préparés par la Ligue: naturalisations, Forces de sécurité intérieure, Déplacés. On sait en particulier que la Ligue réclame l’abrogation pure et simple du décret de naturalisations. En ce qui concerne la réforme des FSI, M. Hariri en discutera avec un groupe d’officiers de cette force proches de la Ligue maronite. Enfin, une étude de M. Khattar Chebli sur les déplacés, qui sera bientôt entre les mains du public, a été présentée à M. Hariri. L’étude évalue à 20% le pourcentage des populations déplacées par la guerre ayant regagné leurs foyers, dont 10% seulement de façon permanente. Elle évalue par ailleurs à 1,2 milliard de dollars le coût de l’opération-retour, soit 300 millions de dollars par an, sur quatre ans, dont rien n’est encore disponible.