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Actualités - REPORTAGE

Environnement - Danger pour la santé des citoyens Que faire des déchets hospitaliers ?

Des seringues, des restes d’analyses de sang, des parties d’anatomie humaine (organes intestins, mains, pieds), des compresses… Autant de restes qu’on préférerait ne pas voir, encore moins s’informer sur ce qu’il en advient. Savoir que des scalpels contaminés pourraient traîner un peu partout ou que les gazes de déchets médicaux incinérés s’échappent à l’air libre rend la question du traitement des déchets hospitaliers plus importante qu’elle n’y paraît au premier abord. Les solutions existent, certes, et le Liban, pour la première fois, les examine avec tout le sérieux qu’elles méritent. C’est ce à quoi s’emploie, en particulier, le CDR, qui a confié à une société la «Issa Consulting», la tâche d’étudier les différentes options. Mais un débat s’est déjà instauré autour des solutions qui seront jugées adéquates. La quantité de déchets dans les hôpitaux au Liban est relativement réduite. Cela est dû, en particulier, au fait que les établissements libanais utilisent moins de produits jetables que les établissements occidentaux. La production varie autour de 5 kilos par lit et par jour, alors que les déchets dangereux (potentiellement contaminés, ou même radioactifs) font un peu plus d’un kilo par jour et par patient. M. Faouzi Adaïmi, président du syndicat des hôpitaux et propriétaire de l’hôpital Notre-Dame du Liban, à Jounieh, précise : «À supposer que les 12 000 lits au Liban soient occupés, ils produiront 60 tonnes de déchets hospitaliers par an, dont 5% seulement sont dangereux. Cela fait 3 tonnes de déchets à risque par an. Cette quantité ne justifie pas toute la panique. Mais il faut dire que la question a un impact psychologique non négligeable sur les gens». Les solutions Il existe, aujourd’hui, deux traitements possibles: l’incinération et la décontamination. La première méthode requiert une installation spéciale avec un système de filtrage du gaz. Quant à la décontamination, elle est effectuée à l’aide d’un appareil qui stérilise les déchets, soit à la vapeur, soit par un processus chimique, les rendant inoffensifs et assimilables aux ordures ménagères. Opter pour l’une ou l’autre de ces techniques est d’abord une question de choix scientifique et de santé publique, qui a en outre des implications au niveau du coût, et donc de l’intervention économique de l’État. Au cas où l’étude commandée par le CDR recommanderait l’installation d’un incinérateur, celui-ci devra être central pour tous les déchets du pays, donc acheté et contrôlé par l’État. Une autre option consisterait à installer des incinérateurs dans chaque mohafazat. Mais là aussi l’intervention économique de l’État serait nécessaire Par contre, en ce qui concerne les décontaminateurs, ils seront de toute évidence achetés, pour leur propre usage, par les hôpitaux eux-mêmes. Dans les deux cas, les déchets doivent être soumis à un tri rigoureux à partir de l’hôpital. Au ministère de la Santé, on est réticent à l’installation d’un incinérateur central. «Avec un tel système», explique une source autorisée au ministère, « nous ferions face à des problèmes de transport, de régularité, de risques potentiels sur la route, sans compter le risque écologique qui n’est pas exclu. Il y a également le coût du transport qui s’ajoute à celui de l’incinérateur proprement dit, et qui est de 7 à 10 millions de dollars, sans parler de la location ou de l’achat du terrain». Cette même source appuie l’idée de l’acquisition par les hôpitaux de décontaminateurs : «D’une part, cela ne coûterait rien à l’État et serait rentable aux hôpitaux qui en amortiraient le prix. D’autre part, cette solution a l’avantage d’être rapidement applicable, contrairement à l’installation d’un incinérateur central qui pourrait prendre des années». Mais comment le ministère pourrait-il s’assurer que les hôpitaux ont acquis cette machine, au cas où il n’y aurait pas d’incinérateur ? «Nous avons deux moyens de pression : nous ferons du décontaminateur un critère essentiel dans la classification de l’hôpital, et nous aurons le droit de refuser de collaborer avec un hôpital qui n’en dispose pas», répond la source citée. Incinération = pollution ? Le ministère de l’Environnement, pour sa part, n’est pas radicalement hostile à l’incinération. Interrogé, M. Zahi Abou Mansour, conseiller du ministre, se déclare même favorable «à une centralisation du traitement des déchets, hospitaliers ou non». À la question de savoir quelle méthode de traitement il préfère, M. Abou Mansour répond : «Au ministère de l’Environnement, nous attendons les résultats de l’étude en cours. Le rapport pourra recommander l’incinération ou la décontamination ou même les deux techniques combinées . Il nous faut également trouver le site, ce qui n’a pas encore été fait et qui, d’une certaine manière, a retardé encore plus l’étude. Cependant, même en cas d’adoption de l’incinération, la technique respectera les critères actuels de protection de l’environnement». Le CDR refuse de se prononcer avant que l’étude ne soit terminée. En ce qui concerne l’étude elle-même, nous avons interrogé les responsables de la «Issa Consulting» où l’on nous a certifié que «toutes les options restent ouvertes mais que la décision finale revient au CDR». Et d’ajouter : «L’étude sera prête d’ici la fin de l’année». Selon cette source, chaque technique représente des avantages et des inconvénients: «Les nouvelles technologies (de décontamination) sont supposées être meilleures que les anciennes, mais nous ne disposons pas du recul nécessaire pour en juger. De plus, la décontamination ne résout pas tous les problèmes parce qu’il y a certains produits comme les liquides, qui doivent être incinérés dans tous les cas. Aujourd’hui, il nous faut trouver une solution pour tout le Liban, et comme la situation est intolérable, on doit tenter de trouver un remède dans l’année à venir. Nous n’excluons pas qu’à l’avenir, plusieurs techniques combinées puissent être adoptées».
Des seringues, des restes d’analyses de sang, des parties d’anatomie humaine (organes intestins, mains, pieds), des compresses… Autant de restes qu’on préférerait ne pas voir, encore moins s’informer sur ce qu’il en advient. Savoir que des scalpels contaminés pourraient traîner un peu partout ou que les gazes de déchets médicaux incinérés s’échappent à l’air...