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Actualités - INTERVIEWS

Estimant que le Liban est en droit de demander des réparations financières à Israël Eddé : pas question de renflouer Netanyahu en acceptant sa proposition sur la 425

Le ministre d’Etat Michel Eddé a estimé hier que le Liban n’avait pas à aider le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à «se renflouer» en acceptant sa proposition d’appliquer la résolution 425 du Conseil de sécurité de l’ONU et a souligné que Beyrouth devrait au contraire réclamer des réparations financières à Israël pour les vingt ans d’occupation du Liban-Sud. Pour M. Eddé, qui était interrogé par l’agence Al-Markazia sur l’actuelle offensive diplomatique israélienne relative au Liban, la proposition de M. Netanyahu «n’est nouvelle qu’en apparence». Il n’en estime pas moins qu’il s’agit d’un «recul» causé par la «défaite» de l’armée israélienne face à «la résistance du peuple libanais dans sa totalité». «Israël s’est employé dès le début à considérer la résolution 425 comme inexistante à la base, et adoptait à son égard une position de déni absolu. Les dirigeants successifs d’Israël depuis (Menahem) Begin jusqu’à (Benjamin) Netanyahu, en passant par (Yitzhak) Shamir, (Yitzhak) Rabin et (Shimon) Peres avaient unanimement épousé ce point de vue. Même Uri Lubrani, présenté comme le «coordonnateur des activités israéliennes au Liban», n’avait jamais assez de répéter cette rengaine de l’inexistence de la 425», a souligné M. Eddé. «Qui plus est, les responsables israéliens sont allés au-delà de cette attitude de refus à l’égard de cette résolution en s’acharnant à occuper des parties du territoire libanais et à anéantir les chances de renaissance du Liban. Ils ont ainsi répété à plusieurs reprises, notamment au cours des dernières années, que le Liban ne connaîtrait ni sécurité, ni stabilité, ni tranquillité, à moins d’accepter de signer la paix avec Israël, une paix qui, du point de vue israélien, serait «séparée», et constituerait donc une capitulation que l’Etat hébreu lui imposerait», a-t-il ajouté. «Les propos des dirigeants d’Israël continuaient d’ailleurs jusqu’à tout récemment à résonner dans les oreilles des Libanais occupés à reconstruire leur pays. Que de fois ne se sont-ils pas adressés au président de la République libanaise, au chef du gouvernement et à tous les autres responsables en leur disant: «Nous ne vous laisserons pas reconstruire le Liban ni son économie tant que vous n’aurez pas signé la paix avec Israël». Autrement dit, tant que le Liban ne se sera pas résigné à la paix séparée et aux conditions israéliennes», a continué le ministre. Il a noté qu’Israël «a tenté d’imposer cette paix de capitulation par le biais de l’accord du 17 mai 1983, puis à travers ses dernières propositions, comme celles du «Liban d’abord», de «Jezzine d’abord» et aujourd’hui l’acceptation de la résolution 425 sur la base de «négociations et d’accords». «Nous nous devons ici de rappeler au monde que lorsque l’Etat hébreu a envahi le Liban le 14 mars 1978, c’est-à-dire il y a très exactement vingt ans, et occupé une partie du Liban sud et de la Békaa ouest, il avait donné le plus insolemment du monde à son invasion le nom d’«Opération Litani». Cela signifie que ses objectifs étaient clairs et francs et visaient, dès le début, à faire main basse sur les eaux libanaises du Litani, du Hasbani et du Wazzani. Le prétexte invoqué alors par Israël, qui prétendait vouloir se venger d’une opération de commando palestinien perpétrée sur la route de Tel-Aviv, très loin du territoire libanais, n’était qu’une couverture trompeuse et purement formelle de ses véritables intentions», selon M. Eddé. «Vingt ans durant, les Israéliens ont perpétué leur occupation d’une partie du Liban sud et de la Békaa ouest, ignorant toutes les résolutions du Conseil de sécurité, prises à l’unanimité. Ils ont poursuivi quotidiennement leurs agressions sauvages contre les Libanais dans les régions occupées, en tuant, en perpétrant des massacres, en contraignant les habitants à l’exode, en détruisant et en sabotant. Le summum (du crime) a été atteint lors du massacre de Cana. Tout cela sans parler de l’invasion totale et de l’occupation de Beyrouth en 1982, qui ont été à l’origine de problèmes sociaux et politiques et de crises économiques et financières dont le Liban continue de payer le prix et d’en supporter les conséquences jusqu’à nos jours», a-t-il dit, avant de relever que «tout au long des deux décennies écoulées, pas un seul responsable israélien n’a fait part de sa disposition à reconnaître la résolution 425, ou accepter de l’appliquer tel que prévu par le texte, c’est-à-dire inconditionnellement». «Aujourd’hui, nous sommes surpris par l’attitude de certains Etats et institutions internationales qui nous invitent à prendre acte de cette «nouvelle» position israélienne et estiment qu’il nous faudrait exprimer notre satisfaction à l’égard de cette «ouverture» de la part de Netanyahu. On nous demande de considérer l’annonce qu’il a faite de l’acceptation de la résolution 425 comme une «avancée» et de profiter de cette «occasion en or» pour faire quelques pas en sa direction»! a poursuivi M. Eddé. «Nous sommes vraiment étonnés par ces appels. Mais nous voulons penser que c’est uniquement par distraction que les auteurs de ces appels ont oublié de s’interroger sur ce qui a changé pour que Netanyahu exprime cette position qui n’est «nouvelle» qu’en apparence, et n’ont pas voulu prendre la peine de sonder ses intentions véritables, qui sont en réalité flagrantes», a-t-il souligné. «La position de Netanyahu n’est pas une prise de conscience, ni l’expression d’une volonté soudaine et innocente d’alléger les souffrances du Liban et de s’engager dans une politique nouvelle qui aboutirait à une solution pacifique. Ce qui a contraint Netanyahu à adopter cette position verbale n’est autre que la véritable défaite qu’a subie l’armée israélienne au Liban au cours des dernières années», selon lui. «L’armée israélienne fait face au Liban à un type de guerre qu’aucune armée régulière n’a jamais pu gagner au cours de l’Histoire. C’est la «guerre des partisans», ou «la guerilla», au sens général, et que nous appelons, nous, résistance». «Durant la Deuxième guerre mondiale, l’armée allemande n’a pas pu faire face à une telle résistance ni en Union soviétique ni en Yougoslavie. L’armée française non plus n’a pu tenir en Indochine, ni en Algérie, les troupes américaines au Vietnam, les Soviétiques en Afghanistan et même les Russes en Tchétchénie. Toutes ces armées, qui sont les plus puissantes au monde, ont connu la défaite dans ce type de guerre et ont dû évacuer sans condition, et sans même sauver la face, les pays qu’elles occupaient», a noté le ministre. «L’armée israélienne connaît aujourd’hui cette même situation difficile. Elle subit quotidiennement de cuisantes défaites sur notre sol occupé. Cela, ni Netanyahu, ni son gouvernement, ni d’autres responsables israéliens ne sont plus en mesure de le dissimuler, après que le commandement militaire israélien et l’opinion publique israélienne eurent élevé la voix pour réclamer qu’un terme soit mis à la guerre si coûteuse d’Israël au Liban et dont les effets ont commencé à se faire ressentir sur l’intégrité de son armée, voire sur l’entité israélienne même, et de l’intérieur», a-t-il expliqué. «Voilà, selon lui, le facteur essentiel qui pousse Netanyahu aujourd’hui à annoncer son acceptation de la résolution 425, tout en essayant dans le même temps de parvenir à un accord quelconque, afin de sauver au moins la face, après l’échec d’Israël à concrétiser sa mainmise sur les eaux libanaises et en particulier sur le Litani. Nous le voyons ainsi dépêcher des émissaires et effectuer en personne, ainsi que son ministre de la Défense, des tournées pour amener les Etats étrangers à le sauver». «Alors pourquoi donc faudrait-il que le Liban, qui a souffert vingt ans durant de l’occupation israélienne et des effets quotidiens de cette occupation, qui a connu la mort, l’exode, les destructions et les dégâts incalculables, pourquoi faudrait-il qu’il accepte aujourd’hui de tendre la main à l’agresseur, et aider au salut de Netanyahu, alors que ce dernier connaît la défaite et se prépare à battre en retraite?» s’est interrogé M. Eddé. «Au contraire, c’est à nous que revient le droit de réclamer d’Israël, par le biais de pressions internationales, des réparations financières dues à l’occupation de notre territoire pendant vingt ans, aux dégâts considérables qu’elle a causés et à nos victimes. On a contraint l’Irak à payer au Koweit, qu’il avait envahi, des réparations que l’émirat mérite, sans aucun doute. Il s’agit d’une mesure juste. Nous aussi, nous avons tout le droit de réclamer d’Israël la juste indemnisation de ce qui nous est dû», a-t-il dit. «Pourquoi, s’est-il encore demandé, l’Etat hébreu a-t-il imposé et continue-t-il d’imposer aux pays européens où les juifs ont été peu au prou persécutés de payer des réparations? Pourquoi n’aurions-nous pas le droit de demander une indemnisation pour ce que l’occupation israélienne a causé?» «Appeler le Liban à aller à la rencontre de Netanyahu en acceptant sa manoeuvre, ses conditions et sa conception c’est l’adjoindre de le renflouer. Tout comme la conférence de Doha était une tentative de renflouer sa politique qui a enterré le processus de paix, accepter ce qu’il propose aujourd’hui équivaudrait à le remettre sur ses pieds, dans le monde et en Israël même, alors qu’il vient de subir une défaite», a insisté le ministre. «L’agresseur qui est défait doit en payer le prix. Si Israël reconnaît aujourd’hui qu’il est un Etat occupant, et qu’il est prêt à se retirer des territoires occupés, il doit le faire sans conditions, mais aussi payer des réparations aux victimes de l’occupation», selon lui. «Solidarité libano-syrienne» «Il n’est pas question pour nous de sauver Netanyahu. Il n’est pas question non plus que nous nous laissions entraîner dans la conception israélienne de la résolution 425, qui la vide de sa substance. Ce qui a contraint Netanyahu à opérer ce recul, c’est la résistance et la lutte du peuple libanais dans sa totalité. Cette lutte n’aurait pas été aussi forte sans la solidarité totale et la coordination totale avec la Syrie-soeur», a-t-il poursuivi. «Par cette position libano-syrienne commune, par cet attachement libano-syrien à faire partie du même volet (dans le processus de paix), nous pavons la voie à l’unique véritable solution dans la région, qui consiste à imposer à Israël la paix juste et globale», a-t-encore dit. Pour lui, «nous sommes ceux qui portent un projet de paix réelle, basée sur l’application des résolutions internationales, alors que Netanyahu n’avance que le projet de perpétuation des guerres et des destructions dans la région, et même à l’intérieur d’Israël». «Ce que tente de faire passer Netanyahu ne constitue nullement une véritable occasion de faire avancer la région sur la voie de la sécurité, de la stabilité et de la paix. Ce qu’il propose n’est qu’une tentative de plus d’échapper à la paix et de la voie claire qui y mène. Il ne veut rien de plus que de se donner encore une occasion de continuer à dénigrer la paix», a-t-il estimé. «De notre côté, notre attachement à nos positions claires et constantes, au Liban et en Syrie, constitue une chance réelle de parvenir à contraindre Israël à céder et à accepter la paix juste et globale. Netanyahu doit savoir qu’il a échoué dans ses tentatives, et tous les pays soucieux de paix dans la région et dans le monde doivent pousser Israël à reconnaître cette vérité et à reprendre les négociations en vue de la seule paix véritable, juste et globale», a conclu M. Eddé.
Le ministre d’Etat Michel Eddé a estimé hier que le Liban n’avait pas à aider le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à «se renflouer» en acceptant sa proposition d’appliquer la résolution 425 du Conseil de sécurité de l’ONU et a souligné que Beyrouth devrait au contraire réclamer des réparations financières à Israël pour les vingt ans d’occupation du...