Les tensions au sein du gouvernement replongent la Russie dans la crise (photos)

La Russie a replongé brutalement vendredi dans la crise politique avec la démission du vice-premier ministre chargé des Finances, Alexandre Chokhine, qui illustre de façon spectaculaire les tensions au sein du nouveau gouvernement d’Evgueni Primakov. Cette démission constitue un grave revers pour le nouveau premier ministre qui n’a toujours pas fini de former son équipe, deux semaines après son investiture par le Parlement. Le départ de M. Chokhine, qui avait la confiance des milieux financiers internationaux, intervient au moment où la Russie, désespérément à la recherche d’argent pour éviter une explosion sociale, est pressée de payer ses dettes par ses créanciers étrangers et privée d’aide occidentale. M. Chokhine a justifié sa démission, onze jours après avoir été nommé, par l’arrivée au gouvernement au poste de ministre des Finances de Mikhail Zadornov, seul survivant de l’ancienne équipe économique qui a dévalué le rouble le 17 août dernier, plongeant le pays dans la débâcle financière. La reconduction de M. Zadornov à un poste qu’il occupait depuis novembre 1997 est «une erreur politique», a déclaré M. Chokhine (46 ans), qui aurait dû travailler en étroite concertation avec son collègue. Il a estimé que sa tâche aurait été trop difficile si «les gens qui ont déjà une fois trompé les investisseurs occupaient des postes-clés au gouvernement». M. Chokhine était notamment chargé des discussions avec les organisations financières internationales, en particulier le FMI, dont une mission a quitté la Russie vendredi sans qu’un accord ait été trouvé sur le versement d’une tranche de 4,3 milliards de dollars. Les discussions doivent reprendre à la mi-octobre et le FMI a conditionné son aide à la présentation d’un «programme cohérent». L’aide du FMI était jugée indispensable par M. Chokhine. Le gouvernement s’est en effet engagé à payer dès ce mois-ci deux mois de salaires de retard aux militaires, et, à partir d’octobre, le reste des arriérés aux autres employés du secteur public. Les arriérés de salaires s’élèvent à plus de 80 milliards de roubles (plus de 5 milliards de dollars). Sans aide du FMI, qui a jugé la situation de la Russie «critique», la seule option offerte au gouvernement pour tenir ses promesses est de faire fonctionner la planche à billets avec le risque d’hyperinflation. M. Chokhine s’était montré très réticent envers cette solution. «Le gouvernement sera plus homogène (...) mais il ne changera pas sa politique», a assuré M. Chokhine, reconnaissant ainsi les difficultés rencontrées par M. Primakov, qui tente de faire cohabiter plusieurs forces politiques aux intérêts divergents.