Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

Installation de Roula Haj Ismaïl "The Taboule performer" : une révolte contre la condition de la femme (photos)

L’installation au «Beyrouth Media Production» (rue Spears) de Roula Haj Ismaïl, «The taboule performer» est un cri de révolte contre la société patriarcale dans laquelle nous vivons et qui ne laisse aucun espace de liberté ou d’identité à la femme. L’espace artistique du «Beyrouth Media Production» est niché au troisième étage d’un vieil immeuble de style libanais. L’installation de Roula Haj Ismaïl est étonnante aussi bien par sa conception que par son exécution. Les spectateurs sont installés sur une mezzanine en U qui surplombe une petite pièce où sur une large table la «taboule performer», étendue sur le dos, récite un texte en anglais. Au fond, sur quatre écrans de télévision passent simultanément deux bandes vidéo: sur la première Roula Haj Ismaïl prépare un taboulé, sur la deuxième elle présente le film de son échographie. En effet, l’artiste a mis en parallèle son état de femme enceinte et son statut de «préparatrice de taboulé», pour montrer les deux fonctions auxquelles semble être réduite la femme dans nos sociétés. «Les femmes peuvent être capables d’éduquer, mais elles ne sont pas faites pour les études, la philosophie ou les arts, domaines qui demandent une vision globale, universelle», récite Roula, citant le philosophe allemand Hegel. «Mon corps est comme un terrain vierge que personne n’a touché; comme une terre stérile, muette, incapable de s’exprimer, d’agir, de bouger. Mon corps est une carte qu’a dessinée l’autre, l’homme. Mon corps n’est pas à sa place. Il est dans une angoisse permanente. Il est instable, perdu, cherchant un endroit où se sentir en sécurité, où être lui-même»… Itinéraire «Mon corps est une carte» répète-t-elle. «Tout ce qu’on lui demande, c’est d’avoir de l’énergie pour nettoyer, pour pousser, pour frotter, pour laver, pour cuisiner, pour serrer, pour goûter, pour ovuler, pour enfanter, pour réchauffer, pour pondre, pour découper, pour pousser, pour pousser, pour pousser…» Roula Haj Ismaïl, 31 ans, est philosophe de formation. Le magistère qu’elle a présenté à l’AUB portait sur «Désir et subjectivité». Après avoir vécu une quizaine d’années en Australie, elle est retournée à Beyrouth en 1990. Elle réalise, en 1993, un court-métrage de 13 minutes, «I wet my hands…», «film personnel dans lequel je parle de ma relation avec ma grand-mère et de ce que j’ai ressenti en rentrant au pays». Son installation dans le cadre d’«Ayloul» est, «de façon générale, une critique de notre société», dit-elle. Le taboulé, plat national, est pris là dans le sens de symbole. «Si on veut être très pessimiste, on pourrait dire que le taboulé, notre plat national, est bien la seule chose sur laquelle nous tombons d’accord entre Libanais». Elle revient sur la condition de la femme: «Elle n’a pas beaucoup de choix», affirme-t-elle. «Entre faire le taboulé et enfanter, la femme en arrive à l’hystérie. Il faut lui laisser la possibilité de conquérir l’espace dont elle a besoin pour s’exprimer en tant que femme. Aujourd’hui, si elle veut avoir sa place dans la société patriarcale, qui est la nôtre, elle doit s’exprimer avec le langage des hommes». «The taboule performer» a été présenté au festival «Here and elsewhere» de Copenhague en 1996. «Dans la représentation de 1996, je récitais le texte en faisant le taboulé en direct. Cette année, j’ai décidé, étant donné que je suis enceinte, d’utiliser mon état. C’est pour cela que je suis étendue sur une table, en position d’accouchement. Les spectateurs ont été placés sur la mezzanine, comme s’ils étaient en train d’assister à mon accouchement, au double sens du terme…» Cependant sans rancœur, Roula Haj Ismaïl convie en fin de performance, aussi bien les spectateurs que les spectatrices, à partager un délicieux taboulé… histoire de mieux en parler.
L’installation au «Beyrouth Media Production» (rue Spears) de Roula Haj Ismaïl, «The taboule performer» est un cri de révolte contre la société patriarcale dans laquelle nous vivons et qui ne laisse aucun espace de liberté ou d’identité à la femme. L’espace artistique du «Beyrouth Media Production» est niché au troisième étage d’un vieil immeuble de style...