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Actualités - ANALYSE

L'astuce du faux départ abandonnée

C’est maintenant confirmé: le camp haririen renonce à l’astuce du faux départ. Et le principal intéressé ne veut plus de cette retraite anticipée dont M. Mohsen Dalloul brandissait la menace voici quelques jours… Au cours d’une rencontre tout à fait confidentielle, à Fakra, avec le président du Conseil, en présence d’un groupe d’amis, l’un des ministres frondeurs du Cabinet a débattu avec lui, à cœur ouvert, de tous les dossiers politiques, économiques, financiers ou reconstructifs. Pour tenter de lui faire toucher du doigt la réalité pesante d’une crise générale que, dans son cocon présidentiel ouaté, il pourrait ne pas très bien percevoir. Selon une source bien informée, c’est M. Hariri lui-même qui, plein de bonne volonté, a voulu recueillir en détail le point de vue de ce ministre de caractère indépendant, considéré comme «inamovible» et partant, proche des décideurs. Et M. Hariri a été servi: son interlocuteur l’a critiqué en face d’une manière d’autant plus percutante qu’elle se voulait objective. En substance, selon la même source généralement fiable, le ministre a développé l’argumentation suivante: — «Pour commencer, il ne semble pas que nous sachions où nous allons ni ce qu’il convient de faire pour sauver une situation compromise à tous les égards. La réfection fastueuse du Grand Sérail, les dépenses somptuaires engagées pour l’annexe de la Chambre ou pour le palais de Ayn el-Tiné, représentent une enveloppe de plus de cent millions de dollars, partis en fumée, gaspillés en vaines futilités alors que les Libanais crient famine. Et alors qu’on coupe à l’EDL des crédits équivalents. Ces gesticulations financières de stupide gloriole sont non seulement inopportunes en regard de l’opinion publique mais aussi préjudiciables au plan des assistances étrangères. Les donateurs ne cachent pas en effet qu’ils ne voient pas pourquoi ils continueraient à nous soutenir, si nous utilisons les fonds dont nous disposons à de telles fins, alors que nos caisses sont vides et le Trésor lourdement endetté». Cette volée de bois vert, indique le témoin, a fait grimacer plus d’un convive mais M. Hariri n’a pas réagi pour sa part négativement à ces observations. D’autres remarques du même ministre l’ont fait cependant tressaillir, ajoute la même source. Rappel Le réquisitoire s’est en effet poursuivi, grosso modo, en ces termes: «Lorsque vous êtes arrivé au pouvoir, le peuple entier était avec vous et il n’y avait pas trace d’opposition. Même les boycotteurs du camp radical chrétien ont applaudi votre avènement. Près de six ans plus tard, qu’en est-il? Le soutien populaire s’est évaporé et des opposants vous en trouvez plein au sein même de votre équipe gouvernementale, certains n’hésitant pas à réclamer votre départ. Bien sûr les raisons des mécontents sont nombreuses, et pas toujours désintéressées. Mais la cause profonde tient à l’effroyable surendettement dans laquelle votre stratégie dite de reconstruction, et qui est en réalité l’apothéose de la spéculation immobilière ou BTP ( béton travaux publics) au détriment des secteurs de production, a plongé le pays. On ne voit pas comment dans les décennies à venir, il va pouvoir rembourser et se remettre à flot. Le printemps au printemps, promettiez-vous à votre aurore. Ce rêve et toutes les espérances se sont évanouis, laissant les Libanais déçus. Au point que s’ils vous reconnaissent encore le mérite de la stabilisation monétaire, ils n’hésitent plus à marmonner qu’après tout, cela sert vos propres intérêts comme ceux des nombreux amis peu philanthropes qu’on vous prête. Ainsi les yeux se braquent de plus en plus sur Solidere. On n’en finit pas de s’étonner qu’une société privée ait pu obtenir l’extraordinaire privilège de l’expropriation totale, brute et brutale. Les incidences de ces derniers temps à la périphérie du centre-ville ont suscité d’innombrables points d’interrogation. Et vous-même, rapporte la presse, avez dû intervenir pour faire cesser certains abus musclés, dans lesquels Solidere affirme n’avoir rien à faire mais qui ont lieu dans son secteur. Même au regard des lois que vous avez fait passer, il est des activités qui sont confiées à cette société et qui ne sont pas de son ressort. Elle effectue ainsi des travaux en marge, sur les fonds des actionnaires, ce qui est d’autant moins admissible que la société est exemptée de toute imposition fiscale, alors même que son objectif déclaré est de réaliser des bénéfices». Ce ministre a ensuite affirmé à M. Hariri que «même certains cadres syriens souscrivent aujourd’hui aux critiques dont vous faites l’objet…» Et de lui reprocher ensuite de n’avoir rien fait pour l’entente nationale et d’avoir même aggravé les clivages confessionnels par son comportement politique allié à celui de ses partenaires-rivaux de la troïka. Enfin, après avoir évoqué le scandale des scandales étouffés, le ministre-procureur a conclu en notant que «si vous envisagez de vous reposer pour un certain temps, en cédant la place provisoirement à un autre, sachez que vous risquez une grosse déconvenue car la grogne est telle que les Libanais ne voudraient pas de votre retour». A signaler que pas un seul moment M. Hariri ne s’est énervé et n’a interrompu cette philippique qui a duré des heures. Il s’est contenté, selon le même témoin, de répondre qu’il ne pensait pas abandonner la barre. Et d’indiquer en conclusion qu’il est soucieux d’écouter le point de vue de tous les ministres opposants. Sans dire dans quelle mesure il en tiendrait compte.
C’est maintenant confirmé: le camp haririen renonce à l’astuce du faux départ. Et le principal intéressé ne veut plus de cette retraite anticipée dont M. Mohsen Dalloul brandissait la menace voici quelques jours… Au cours d’une rencontre tout à fait confidentielle, à Fakra, avec le président du Conseil, en présence d’un groupe d’amis, l’un des ministres...