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Actualités - CHRONOLOGIE

Le gouvernement tente de colmater les brèches sur les fronts politique et socio-économique Le spectre de la pénurie d'essence aurait été écarté

Tel un homme qui s’enfoncerait toujours davantage en se débattant dans des sables mouvants, le gouvernement, assailli de problèmes de toutes parts, s’emploie à colmater, autant que faire se peut, les multiples brèches sur les fronts politique et socio-économique. Premier résultat: le spectre de la pénurie d’essence a été écarté. Il n’empêche que les dernières vingt-quatre heures ont illustré le contexte peu enviable dans lequel s’est embourbé l’Exécutif. En fin de matinée, le premier ministre Rafic Hariri s’est ainsi rendu au palais de Baabda afin de dissiper le «froid» qui a marqué ses rapports avec le président Elias Hraoui au cours des derniers jours. Dans l’après-midi, le Conseil des ministres — réuni au palais du gouvernement — a d’autre part décidé, comme prévu, de retirer du Parlement (qui tiendra aujourd’hui une séance plénière) le projet de loi sur la nouvelle échelle des salaires dans le secteur public. Le financement de ce réajustement salarial — que les fonctionnaires attendent depuis 1996 — n’a toujours pas été assuré par l’Etat. Du coup, la grogne ne manquera pas de croître au niveau du secteur public, comme le montrera le sit-in que les professeurs de l’Université libanaise organiseront ce matin Place de l’Etoile en signe de protestation contre le gel de la nouvelle échelle des salaires. Celle-ci, à en croire le gouvernement, devrait être à nouveau transmise à la Chambre, sous une nouvelle mouture, dans un délai de cinq semaines. Parallèlement à ces deux sources de tension, le gouvernement a dû faire face hier, en catastrophe, à un autre problème de taille qui a failli sérieusement perturber l’activité dans le pays: le risque de pénurie d’essence. Cette question a été l’un des principaux sujets débattus lors du Conseil des ministres, à Sanayeh. Il a fait l’objet par la suite d’une réunion urgente que M. Hariri a tenue, à l’issue de la séance du Cabinet, avec le ministre du Pétrole Chahé Barsoumian, en présence du ministre d’Etat chargé des Affaires financières Fouad Siniora. Il aura fallu les démarches intensives effectuées tard en soirée par M. Barsoumian avec les sociétés importatrices de carburants ainsi qu’avec les propriétaires des stations d’essence pour éviter le pire. De sorte qu’aujourd’hui, la distribution de l’essence devrait se faire normalement, après que les stations eurent fermé, purement et simplement, leurs portes hier soir. Le risque subit de pénurie a surgi, rappelle-t-on, à la suite de la décision prise il y a quatre jours par le gouvernement d’imposer une surtaxe de 500 livres libanaises sur le bidon d’essence. L’Etat a décidé que cette taxe supplémentaire serait assumée entièrement par les sociétés importatrices. Celles-ci, voyant ainsi leur marge de bénéfice entamée, devaient décider il y a trois jours de ne plus distribuer l’essence aux stations. Lors du Conseil des ministres d’hier soir, M. Barsoumian s’est opposé à une telle surtaxe, soulignant qu’elle risquait de provoquer une grave pénurie dans le pays. Cet argument n’a pas convaincu outre-mesure M. Hariri qui a fait valoir que l’Etat avait besoin des revenus de cette taxe supplémentaire afin de couvrir les 50 milliards de LL que le Cabinet a décidé de consacrer à la réhabilitation du réseau routier dans la Békaa, au Akkar et dans certaines régions défavorisées. La discussion n’ayant débouché sur aucun résultat lors de la séance du Conseil des ministres, le problème a été à nouveau soulevé lors de la réunion nocturne que M. Hariri a tenue avec MM. Barsoumian et Siniora. Le ministre du Pétrole a alors été chargé d’entreprendre les contacts nécessaires avec les sociétés importatrices pour aboutir à une solution acceptable par toutes les parties concernées. Pendant que M. Barsoumian entamait ses démarches, de nombreuses stations d’essence dans le Grand Beyrouth devaient interrompre la vente, et de longues files de voitures se sont aussitôt formées devant les rares stations qui distribuaient encore l’essence. En fin de soirée, M. Barsoumian est parvenu à l’accord suivant avec les sociétés importatrices et les propriétaires des stations: la surtaxe sera ramenée de 500 LL à 200 LL uniquement. Elle sera supportée à égalité par les sociétés importatrices et les propriétaires des stations, de manière à ne pas modifier le prix à la vente. Contacté tard en soirée par «L’Orient-Le Jour», le ministre du Pétrole a souligné que cette solution avait été agréée par toutes les parties concernées et que, par conséquent, la distribution de l’essence devrait reprendre normalement dès ce matin. Si le gouvernement a ainsi réussi à désamorcer la crise de l’essence, il n’en est pas de même des autres problèmes auxquels il est confronté. Et, sur ce plan, le «froid» qui a marqué ces derniers jours les relations entre le président Hraoui et le premier ministre n’a pas été pour arranger les choses. Le chef de l’Etat reproche en effet à M. Hariri de pratiquer, de plus en plus, une politique de «one man show». Le chef du gouvernement s’est ainsi abstenu de prendre l’avis du président Hraoui au sujet des concertations qu’il a décidé d’entreprendre avec les pôles d’influence du pays, concernant les moyens de financer le retour des déplacés et la nouvelle échelle des salaires du secteur public. Pis encore: M. Hariri a voulu inclure le président Hraoui dans ses concertations, plaçant ainsi le chef de l’Etat au même niveau que les autres fractions et responsables locaux. Dernière manifestation de cette politique: M. Hariri n’a pas pris la peine de consulter et d’informer le chef de l’Etat au sujet de la récente visite à Beyrouth du président de Paribas, M. Michel François-Poncet, qui s’est déclaré intéressé par le lancement de l’emprunt extérieur de 2 milliards de dollars décidé par le gouvernement afin de juguler le déficit budgétaire. Ces différents griefs ont été au centre de l’entretien que le président Hraoui a eu hier vers 12h30 avec le chef du gouvernement. Cette réunion aurait permis de dissiper, dans une certaine mesure, quelques malentendus, de manière à détendre le climat entre les deux hommes. Depuis le début des concertations entamées par le premier ministre, rappelle-t-on, le chef de l’Etat n’avait pas reçu M. Hariri. Les milieux de Koraytem en imputaient la cause à l’état de santé du président Hraoui, qui souffrait d’une forte grippe. Cette indisposition n’avait pas empêché, cependant, le chef de l’Etat de recevoir le président de la Chambre Nabih Berry et de se rendre à l’inauguration du nouveau palais de l’UNESCO. En tout état de cause, ces tiraillements conjoncturels entre Baabda et Koraytem semblent être, pour l’heure, dépassés, puisque le prochain Conseil des ministres se tiendra à Baabda sous la présidence du chef de l’Etat. L’un des principaux points inscrits à l’ordre du jour de la séance du Cabinet, hier, a d’ailleurs été ajourné à la réunion qui sera présidée par le chef de l’Etat. Il s’agit du projet de loi visant à imposer une taxe de 1 pour cent sur le chiffre d’affaires des entreprises privées. Le but de cette taxe — qui est fortement critiquée par nombre d’experts — est de renflouer les caisses de l’Etat afin de financer divers projets vitaux, tels que le retour des déplacés, l’échelle des salaires dans le secteur public, le développement des régions défavorisées, etc. Pour en revenir aux résolutions du Conseil des ministres adoptées hier, le ministre de l’Information Bassem Sabeh a donné lecture en début de soirée du communiqué officiel suivant: «Le président du Conseil a commencé par exprimer ses souhaits pour un prompt rétablissement du chef de l’Etat, qui devait lui-même présider cette séance du Conseil des ministres mais qui a préféré garder le lit sur recommandations de ses médecins», a indiqué le ministre de l’Information avant de poursuivre: «Le Conseil a passé ensuite à l’étude de certaines questions non inscrites à son ordre du jour notamment le retrait du projet de loi sur la nouvelle échelle des salaires. Ce problème a fait l’objet d’un entretien entre le chef de l’Etat et le président du Conseil. Nous avons préféré retirer ce projet pour que certaines de ses clauses soient réétudiées à la lumière de toutes les remarques formulées dans les commissions. Ce projet se retrouvera de nouveau devant la Chambre dans un délai de quatre à cinq semaines à partir de la date de son retrait. Cette proposition a été acceptée à l’unanimité des membres du Conseil», a-t-il précisé. Toujours en dehors de l’ordre du jour de la réunion, «le Conseil a accepté la démission de M. Maurice Saydé du gouvernorat de la BDL, a approuvé un projet de loi présenté par les ministres Walid Joumblatt, Talal Arslan et Akram Chéhayeb créant un conseil de tutelle pour les awkafs de la communauté druze», et «a approuvé la proposition de l’Institution publique pour l’Habitat qui entend lancer une adjudication internationale pour la construction de 7500 unités qui seront réparties à égalité entre tous les mohafazats», a encore indiqué le ministre de l’Information. Et M. Sabeh de poursuivre: «Passant à son ordre du jour ordinaire, le Conseil des ministres a remis à sa prochaine séance, qui sera présidée par le chef de l’Etat, l’approbation de deux projets de loi réglant la question des instituteurs détenteurs d’une licence et accordant des indemnités spéciales aux directeurs des lycées et à certains chefs de service au ministère de l’Education. «Il en a été de même de l’étude du projet présenté par le ministère de l’Economie et du Commerce visant à créer une grande zone de commerce arabe libre. «Il a approuvé la demande du ministère de l’Education accordant à la direction générale des bâtiments le droit exclusif d’entretenir, de rénover et d’habiliter les bâtiments des écoles officielles quitte à assurer à cette direction les crédits nécessaires. «Il a approuvé le projet de loi présenté par le ministère de l’Environnement visant à doter le pays d’une loi conforme aux normes internationales pour la préservation de la nature. «Il a remis à plus tard l’approbation de la taxe de 1% sur le chiffre d’affaires des contribuables. «Il a décidé de mettre au point un projet de loi modifiant l’article cinq de la loi sur les infractions dans le bâtiment. «Il a refusé les projets de loi dispensant les contribuables des amendes, annulant les décisions qui visent à modifier les taxes douanières sur certaines voitures et réglementant l’emploi de certaines ondes hertziennes et de certains canaux de télévision utilisés par des sociétés privées. «Il a approuvé le projet de loi modifiant certains articles de la loi instituant deux Ordres de médecins au Liban. «Il a retenu le point de vue du Conseil de la Fonction publique en ce qui concerne la détermination des fonctionnaires en surnombre, permanents, intérimaires, contractuels et journaliers dans la fonction publique, les institutions publiques et les municipalités, et la façon qui sera suivie pour les redistribuer et régulariser définitivement leur situation», a conclu M. Sabeh.
Tel un homme qui s’enfoncerait toujours davantage en se débattant dans des sables mouvants, le gouvernement, assailli de problèmes de toutes parts, s’emploie à colmater, autant que faire se peut, les multiples brèches sur les fronts politique et socio-économique. Premier résultat: le spectre de la pénurie d’essence a été écarté. Il n’empêche que les dernières...