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Actualités - CHRONOLOGIE

Le climat s'envenime entre le gouvernement et la Chambre Hariri se défend d'être responsable de la crise économique

Le débat budgétaire — qui s’est poursuivi hier pour la quatrième journée consécutive — a mis en relief (s’il en était encore besoin) le clivage qui ne cesse de s’approfondir entre l’Exécutif et le Législatif. Les interventions des députés Boutros Harb, Camille Ziadé et Chaker Abousleiman, hier soir, ont donné le ton sur ce plan (Voir notre compte rendu page 4). Le premier ministre Rafic Hariri n’a pas tardé à lancer sa contre- offensive. Sans attendre la séance parlementaire consacrée à la réponse du gouvernement, il s’en est pris violemment aux députés frondeurs, soulignant qu’il ne saurait être tenu pour responsable, ni lui ni son gouvernement, de la crise actuelle qui est due, a-t-il précisé, aux multiples séquelles de la guerre ainsi qu’à la conjoncture dans la région. Ce climat qui s’envenime de jour en jour entre l’Assemblée et l’Exécutif semble dépasser le seul cadre de l’opposition parlementaire. Le président de la Chambre Nabih Berry n’a pas caché, de fait, son soutien à la manifestation ouvrière et estudiantine organisée jeudi dernier devant le Parlement pour protester contre la gestion du gouvernement, notamment en matière de politique fiscale. En outre, l’un des principaux membres du bureau de la Chambre, M. Camille Ziadé (qui jusque-là ménageait relativement le Cabinet), a lancé une virulente attaque contre l’action de M. Hariri et de son équipe ministérielle, précisant qu’il voterait contre le projet de budget. D’aucuns affirment, dans le contexte présent, que le bras de fer mis en relief par le débat parlementaire sur le budget va même au-delà du traditionnel clivage entre l’Exécutif et le Législatif. Il puiserait sa source, selon certaines informations, dans les incontournables manœuvres préliminaires en rapport avec la prochaine échéance de l’élection présidentielle, en novembre 98. Cela expliquerait, entre autres, le soutien tacite et à peine voilé de M. Berry aux forces hostiles au premier ministre. En outre, certains blocs parlementaires représentés au sein du gouvernement, tels que le PSP du ministre Walid Joumblatt, ont annoncé qu’ils voteraient contre le projet de budget. Dans un communiqué publié hier soir, le PSP a réaffirmé sa position à ce sujet, soulignant que son attitude est motivée par «l’obstination du gouvernement à maintenir sa politique économique et à faire fi de toutes les observations qui lui ont été formulées au cours des dernières années, notamment pour ce qui a trait à l’échelle des priorités du programme de reconstruction, aux moyens d’appliquer le développement équilibré, ou à l’imposition de taxes indirectes, sans compter le fait que le dossier des déplacés a été négligé dans le projet de budget». Parallèlement à cette position en flèche adoptée par le bloc du PSP, certains députés du Parti syrien national social (PSNS) pourraient également voter contre la loi de finances, selon des sources généralement bien informées. Le PSNS est pourtant, lui aussi, représenté au sein du gouvernement. A ces deux blocs «contestataires», viennent s’ajouter les opposants traditionnels, tels que le «Hezbollah», les six pôles de l’opposition parlementaire (Husseini, Hoss, Karamé, Harb, Lahoud et Beydoun), ainsi que plusieurs indépendants (MM. Najah Wakim, Camille Ziadé, Zaher el-Khatib, etc.). Au total, entre 35 et 40 députés pourraient voter contre le projet de budget, ou tout au moins contre l’annexe numéro 9. Cela signifie que M. Hariri ne bénéficierait que d’une majorité très étriquée (une soixantaine de voix). Ce vote étant considéré par le premier ministre comme une manifestation de la confiance renouvelée dans le Cabinet en place, les milieux proches de Koraytem auraient entamé des tractations en coulisse afin d’amener certains blocs parlementaires (notamment celui du PSP) à ne pas faire défection. Les compromis possibles porteraient essentiellement sur le sort qui serait réservé à l’annexe numéro 9 ainsi que sur le dossier des déplacés. Notons à ce propos que M. Hariri s’est engagé ces derniers jours à lancer, après l’approbation du budget, une initiative afin de réactiver le retour des déplacés. Outre l’annexe numéro 9 et l’affaire des déplacés, M. Hariri fait face également à de violentes critiques portant sur sa proposition de louer au secteur privé, pour une période de 50 ans, les biens-fonds maritimes publics. Cette suggestion a soulevé un tollé dans plusieurs milieux parlementaires ainsi qu’au sein des diverses associations et organisations écologiques locales. En tout état de cause, la suite du débat parlementaire permettra de mieux cerner l’évolution du bras de fer entre le gouvernement, d’une part, et le Législatif et les différents frondeurs, d’autre part. Une nouvelle séance aura lieu ce matin à la Chambre. Demain soir, le gouvernement répondra aux interventions des députés, et le vote du projet de budget, article par article, commencera lundi matin. La contre-offensive de Hariri Pour en revenir à la contre-offensive du premier ministre, elle s’est manifestée hier soir au cours de l’iftar donné par l’association des anciens des Makassed. M. Hariri a mis en relief sur ce plan les différents facteurs qui, à son avis, entravent l’action de son gouvernement, soulignant notamment que les différentes séquelles de la guerre ainsi que le contexte régional constituent autant de forces d’inertie qui l’empêchent de réussir dans sa tâche. «L’occupation israélienne persiste au Liban-Sud et dans la Békaa-Ouest, a déclaré M. Hariri. La conjoncture régionale est tendue du fait de la présence en Israël d’un gouvernement qui ne veut pas de la paix. Ces facteurs n’ont-ils pas de retombées sur le pays ? Nous reconnaissons tous que l’infrastructure a été détruite. Cela s’est traduit par des effets bien précis. Par ailleurs, une partie des Libanais s’abstient de participer à la vie publique. Cela a aussi des répercussions. Nous devons être conscients du contexte politique et régional dans lequel nous travaillons. Il est vrai que la situation sociale est difficile. Mais est-il vrai que nous faisons fi de cette situation sociale ? L’existence d’une crise sociale ne signifie pas que nous devons en faire assumer la responsabilité au gouvernement. Ce n’est pas le gouvernement qui a mené le pays à cette crise sociale. Celle-ci est due, plutôt, aux circonstances qu’a traversées le pays». Et M. Hariri de poursuivre: «Je ne suis pas maître du pays. Existe-t-il au Parlement un parti relevant de Rafic Hariri qui détient tout le pouvoir et qui aurait élu le président de la République et le chef du Législatif, ou qui aurait désigné les ministres ? Il est possible de réclamer des comptes à Tony Blair en Grande-Bretagne parce que son parti a remporté le gouvernement et qu’il gouverne seul. Le pays fait face encore aux séquelles de la guerre. Il n’est pas concevable d’en faire assumer la responsabilité au gouvernement ou à Rafic Hariri». Après avoir affirmé qu’il ne saurait y avoir de «solution radicale» à l’ombre de la situation présente sur le double plan local et régional, M. Hariri a lancé une violente attaque contre l’opposition parlementaire. Dans une allusion à peine voilée à M. Najah Hakim, le premier ministre a notamment déclaré: «Certains députés montent à la tribune à la Chambre pour mentir une fois, deux fois, dix fois. Que peut-on faire avec un député menteur ? Il monte à la tribune et s’obstine à proférer des mensonges. Il brandit des cartes et sort de sa poche des papiers. Que peut-on faire avec une telle personne?», a demandé le chef du gouvernement qui s’est élevé contre «le bas niveau qui caractérise l’action politique dans le pays».
Le débat budgétaire — qui s’est poursuivi hier pour la quatrième journée consécutive — a mis en relief (s’il en était encore besoin) le clivage qui ne cesse de s’approfondir entre l’Exécutif et le Législatif. Les interventions des députés Boutros Harb, Camille Ziadé et Chaker Abousleiman, hier soir, ont donné le ton sur ce plan (Voir notre compte rendu page 4)....