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Actualités - INTERVIEWS

Le mouvement aouniste fait peau neuve et nomme un nouveau responsable estudiantin Notre projet, un liban souverain à visage humain, nous déclare Kamal Yazigi (photo)

Nommé officiellement mercredi dernier à la tête du mouvement estudiantin du courant aouniste, Kamal Yazigi a déjà retroussé ses manches. La tâche qui l’attend est énorme: rassembler les jeunes qui ont prouvé en décembre qu’ils étaient encore prêts à toutes les batailles, les structurer et donner un contenu politique et idéologique à ce potentiel. Kamal Yazigi est une nouvelle figure... qui tient un discours non traditionnel. Responsable du département des sciences sociales et de l’éducation à l’Université libano-américaine (LAU), ce jeune universitaire accorde une importance particulière à la formation politique et intellectuelle des cadres. Son lexique politique ne se limite pas aux slogans de «souveraineté et d’indépendance». Les mots «justice sociale, pays à visage humain, progressiste» reviennent souvent dans son discours. Changement dans la continuité ou mutation d’un mouvement à la recherche d’un projet global? Les prochains mois apporteront peut-être la réponse. Question: Quel est votre projet politique pour le Liban, et quels sont les moyens de sa mise en œuvre? Réponse: Nous voulons un Liban souverain, mais aussi un Liban juste, un Liban à visage humain, où les plus démunis et les plus faibles ne seront plus écrasés. Cela nécessite des réformes structurelles profondes dans le pays. Si vous me demandez où nous nous situons idéologiquement, je vous répondrai: nous sommes résolument progressistes (à ne pas confondre avec le parti libanais du même nom). Nous représentons une masse populaire indéniable. Plus de sept ans après son éviction, la popularité du général Aoun reste intacte. Nous sommes particulièrement forts au niveau de la jeunesse et des professions libérales. On ne peut pas continuer à nous méconnaître. Un gouvernement d’union nationale — ou un gouvernement de coalition — dans un Liban libre devra nous représenter. Dans un tel gouvernement, nous serons à l’avant-garde. Nous insisterons sur la nécessité du changement. Nous défendrons un programme en faveur des classes laborieuses, des petites gens. A la longue, il n’y aura pas de stabilité si nous ne donnons pas aux masses une espérance de justice. Il ne faut pas les acculer au désespoir et à la violence. L’infrastructure, je veux bien. La dignité humaine aussi! Maintenant, quel scénario exact se dévoilera dans l’avenir prochain, et aurons-nous la chance de participer au pouvoir dans un Liban libre, cela personne ne pourra vous le dire. Q.: Vous affirmez être un courant d’opposition nationale et non pas chrétienne. Toutefois, vous êtes essentiellement implantés parmi les chrétiens et tous les postes clés de votre mouvement sont occupés par des chrétiens. Comment conciliez-vous votre objectif et la réalité? R.: Il n’y a rien dans notre discours ou dans notre comportement qui suggère une affiliation chrétienne. Tout au contraire. Maintenant, si un politologue procède à une analyse du second degré, et découvre par hasard qu’il y a une correspondance entre nos thèmes — surtout le thème de la souveraineté — et la conscience collective chrétienne, ce sera une découverte intéressante. Sociologiquement, il est vrai, nous avons une majorité de sympathisants chrétiens, ce qui explique la sur-représentation des chrétiens dans les postes clés. C’est probablement une séquelle de la guerre. En tout cas, cette situation n’est pas destinée à se perpétuer. Nous avons déjà un bon nombre de sympathisants qui ne sont pas chrétiens. Je pense que si nous élaborons un programme politique plus étendu et plus précis, cela nous aidera à mieux exprimer notre sensibilité «populiste» et à étendre notre champ de recrutement. Q.: Je reviens sur ma question. Vous vous dites un mouvement d’envergure nationale. Pourtant, on a l’impression que vous n’êtes concernés que par une seule région du pays, le Mont-Liban. R.: Le Liban-Sud occupé et les banlieues appauvries de Beyrouth nous sont aussi chers que le reste du pays. Q.: Qui sont les alliés du mouvement sur la scène locale, régionale et internationale? R.: Je ne vais pas m’amuser à énumérer tous nos alliés locaux. Nos amis traditionnels, vous les connaissez. Ce qui serait plus intéressant pour vous, c’est d’observer les nouvelles amitiés qui se sont nouées dernièrement, et qui vont se révéler dans les prochains mois. Q.: Les récents changements survenus au sein du mouvement ont-ils une signification politique ou sont-ils uniquement d’ordre organisationnel? R.: Les derniers changements ont été dictés par des nécessités purement organisationnelles. Mon prédécesseur, M. Hikmat Dib, qui est en même temps secrétaire général de l’Ordre des ingénieurs, a fait un excellent travail. Il m’a légué un mouvement estudiantin puissant et effervescent. Un peu trop, même! Toutefois, on s’est rendu compte que l’ampleur du travail dans ce domaine exigeait un comité — et même plusieurs. M. Dib a voulu se consacrer à son travail au sein de l’Ordre des ingénieurs. Le général a alors formé le comité que je préside pour coordonner les activités du secteur des étudiants et des jeunes. Notre comité, à son tour, engagera des consultations avec la base pour former des comités spécialisés et des organes représentatifs. Je ne vous cache pas qu’il y a quelques tiraillements au niveau de la base. Des problèmes personnels, à ce qu’il paraît. Pur égotisme. Certaines personnes sont allergiques à d’autres, comme dans tous les mouvements politiques. Je suis là pour rassembler. Nous avons tellement à faire dans la période à venir qu’il faut savoir oublier son «moi». Notre unité vaut mieux que toutes les petites réserves personnelles. Il ne faut pas chercher une signification politique à ce changement. Cela dit, nous allons continuer — et même intensifier — notre politique d’ouverture. La période à venir sera placée sous les signes de l’ouverture, de la restructuration de l’organisation, et — déformation professionnelle peut-être — de l’éducation politique! Q.: La restructuration du courant est intervenue en même temps que le mouvement de protestation estudiantine. Y a-t-il un lien entre les deux faits? Et comptez-vous entreprendre de nouvelles actions dans les milieux estudiantins? R.: Aucun lien. A vrai dire, l’ampleur du mouvement de protestation et le courage des jeunes nous ont surpris. C’était une semaine glorieuse. La jeunesse étudiante a montré son potentiel «révolutionnaire». Elle a montré qu’elle est un acteur politique à ne pas négliger. Maintenant, tout le monde parle des jeunes. C’est devenu une mode. Les actions futures dépendront des circonstances. Nous n’avons pas la manie des manifestations et des sit-in. Pour moi, la priorité est à la formation intellectuelle. Propos recueillis par Paul KHALIFEH
Nommé officiellement mercredi dernier à la tête du mouvement estudiantin du courant aouniste, Kamal Yazigi a déjà retroussé ses manches. La tâche qui l’attend est énorme: rassembler les jeunes qui ont prouvé en décembre qu’ils étaient encore prêts à toutes les batailles, les structurer et donner un contenu politique et idéologique à ce potentiel. Kamal Yazigi est une...