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Actualités - ANALYSE

Le feuilleton télévisé : encore et toujours to be continued...

Ainsi, le président du Conseil, M. Rafic Hariri, met ses menaces à exécution. Avec la fougue d’un potache vexé de perdre une partie d’attrape, il s’était en effet exclamé à la Chambre : «D’accord, je vais me conformer à l’arrêt du Conseil d’Etat qui interdit la censure préalable sur les programmes politiques diffusés par satellite…mais je vais supprimer les licences!» Et plus besoin de censure, puisqu’il n’y aura plus d’émissions! Mais il faut peut-être compter avec ce même Conseil d’Etat qui peut rééditer son coup s’il est de nouveau saisi de l’affaire ou encore avec le Conseil constitutionnel qui peut voir dans la décision gouvernementale une atteinte aux droits et aux libertés garantis par la Constitution… Il faut en tout cas voir ce que va faire le président de la Chambre, M. Nabih Berry, qui, séance tenante, avait riposté à M. Hariri en lui demandant de retirer ses propos et en priant le greffe de ne pas les mentionner dans le procès-verbal de la réunion. M. Hariri ne s’y était pas opposé, par esprit évident de conciliation «sur le moment», mais il avait par la suite confirmé ses intentions, en affirmant que la loi lui donne le droit d’octroyer, de refuser ou de retirer une licence d’émission par satellite. Esquivant la polémique avec les parlementaires et préférant l’acte au verbe, il vient donc de s’exécuter. Avant la réunion du Conseil des ministres hier, le chef du gouvernement indiquait en privé et en substance que «le battage dans le marché est d’ordre tout à fait politicien et n’a aucun vrai rapport avec la question des libertés. Il n’existe pas, ajoutait-il, de gouvernement, de groupe, de ministres, de députés, d’associations, de collectivités qui soient en mesure de prohiber la liberté d’expression. Tout cela c’est de l’exploitation politicienne…» Et il s’en est pris ensuite à ceux «qui ne veulent pas respecter la loi». A noter que, selon des témoignages concordants, l’on a relevé en Conseil des ministres peu d’objections à la motion d’interdiction de la diffusion satellitaire des programmes politiques, l’exclusivité étant réservée à Télé-Liban (officielle) présentée par le ministre de l’Information, M. Bassem el-Sabeh, aussitôt soutenu par le chef du gouvernement. M. Sleiman Frangié a plaidé pour l’égalité des chances, soulignant que l’information ne doit pas se limiter à rapporter les activités du gouvernement ou des loyalistes, l’opposition devant avoir droit à autant de présence médiatique. M. Nicolas Fattouche a déclaré qu’il est contre l’interdiction par principe, tandis que d’autres membres du Cabinet se contentaient d’observations et de critiques sans aller jusqu’à s’inscrire en faux contre la mesure proposée. Selon une source ministérielle informée, «M. Hariri a agi pour les motifs suivants: — Les programmes politiques diffusés par satellite, naturellement truffés d’attaques contre sa gestion ou même contre sa personne, sont en train de nuire à son image de marque à l’étranger. Un élément plus important pour lui que pour un autre, étant donné que son pouvoir se fonde en grande partie sur son entregent international et arabe. D’autant que les campagnes d’hostilité s’articulent désormais sur sa «spécialité», la situation économique et financière, ce qui le touche au plus vif. De plus, la «démythification» systématique de son personnage de sauveur par les opposants fait qu’il risque d’avoir de moins en moins l’oreille des grands de ce monde dont il se félicite d’être l’ami… — D’une façon plus étendue, ces émissions affectent le crédit du gouvernement comme de l’Etat libanais à l’étranger — Partant de là, les investisseurs arabes qui tardent à se présenter pourraient y renoncer définitivement, n’étant pas disposés à s’aventurer dans un pays si peu et si mal gouverné, selon le tableau qu’en brossent trop souvent les programmes libanais dits politiques. Des émissions qui parlent en effet de corruption généralisée, d’anarchie, de récession économique ne favorisent pas l’afflux tant attendu des capitaux du Golfe et d’ailleurs». C’est donc pour ces considérations que l’on préfère priver l’étranger du spectacle d’un linge sale qu’on continuera à laver en famille. Le gouvernement a de plus pris la précaution de prévenir les médias qu’ils ne doivent pas essayer de jouer aux plus malins et qu’ils risquent la fermeture s’ils tentaient d’émettre ces programmes politiques à partir d’un territoire étranger. Les loyalistes répètent après leur chef qu’il ne s’agit pas des libertés, puisque comme le dit M. Sabeh «localement les médias pourront passer tout ce qu’ils veulent, même une interview du général Aoun…». C’est beau la mansuétude «mais, objecte un opposant, après quelque temps de «relâchement»,le gouvernement ne tarderait pas à inventer on ne sait quoi pour serrer de nouveau la vis. N’est-ce pas ce qu’il a fait avec l’affaire Wakim qui a mis fin, trois petites semaines après, à la détente sur laquelle avait débouché l’affaire Aoun?» Et de souligner que «les libertés ne sont pas dissociables; il n’y en a pas qu’on peut pratiquer ici et pas ailleurs. Surtout pas en ces temps de mondialisation accentuée et nous ne pensons pas que les capitales occidentales, qui ont clairement conseillé au gouvernement libanais de respecter ces libertés en excluent le droit de diffuser par satellite un matériel d’information qui ne tombe pas sous le coup des lois locales». Ph.A.-A.
Ainsi, le président du Conseil, M. Rafic Hariri, met ses menaces à exécution. Avec la fougue d’un potache vexé de perdre une partie d’attrape, il s’était en effet exclamé à la Chambre : «D’accord, je vais me conformer à l’arrêt du Conseil d’Etat qui interdit la censure préalable sur les programmes politiques diffusés par satellite…mais je vais supprimer les...