Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

La versatilité des autorités sidère même les ministres

Un ministre de premier plan qui a son franc-parler, surtout en privé, se dit «épaté par la foudroyante capacité d’adaptation et de revirement du pouvoir. Il ne s’est pas plus tôt avancé sur une voie qu’il fait machine arrière, poussant parfois l’effronterie jusqu’à imputer à d’autres les positions ou les décisions qu’il défendait encore la veille! Son impavidité devant les réactions houleuses qu’il provoque au passage est tout aussi admirable. Il va son petit bonhomme de chemin, comme si de rien n’était, qu’il y ait grèves, manifestations, sit-in ou tollé général…»
«A bien y regarder, poursuit cet ingrat, le tout premier souci du chef du gouvernement M. Rafic Hariri a été de se laver les mains de ce qui se passe. Le ministre de l’Information lui-même, qui a enclenché tout le bazar, ne veut être comptable que de l’interdiction de l’interview du général Aoun et encore. Pour le reste on croirait presque qu’il désapprouve les mesures prises par l’Intérieur… Qui à son tour lui rejette la balle en affirmant n’avoir agi que dans le cadre d’un étrange «automatisme» ordonné par une loi que personne ne connaît, à l’exception peut-être de Pavlov, spécialiste des réflexes conditionnés…»
«En somme, enchaîne ce mordant adepte des métaphores canines, les intéressés aux commandes font encore mieux que Georgina Dufoix puisqu’ils se déclarent en chœur aussi bien non responsables que non coupables. Et on les comprend car la faute avérée, qui se mesure à l’ampleur des protestations enregistrées, est assez lourde. Voici en effet que notre Etat est pointé du doigt au dehors comme par le peuple libanais comme étant totalitaire, répressif et farouchement anti-libertés.»

Indications contradictoires

«Les haririens, révèle par ailleurs une autre source loyaliste, laissent clairement entendre que leur chef n’était pas du tout opposé pour sa part à la diffusion de l’interview du général Michel Aoun. Ce serait donc une initiative personnelle de M. Bassem el-Sabeh, ministre de l’Information. Mais à son tour, ce dernier affirme qu’il n’a jamais rien «interdit» qu’il s’est contenté de «souhaiter» à ce propos la coopération des dirigeants de la MTV. A la limite, ce ministre, qui déploie un sens si poussé de la nuance, s’indignerait qu’on l’ait trop bien compris! Le plus drôle de l’affaire, c’est que M. Hariri, sous couvert de défendre son lieutenant, déclare que ce dernier a dit textuellement aux responsables de la chaîne: «je ne vais pas vous empêcher de diffuser l’interview». Donc si l’on comprend bien, toute l’affaire ne serait qu’une odieuse provocation manigancée par les gens de la MTV! Avec la complicité, bien entendu, des aounistes et sans doute des étudiants de l’USJ, de l’UL et de l’AUB comme des avocats, des médecins et des ingénieurs qui se sont élevés contre les atteintes aux libertés publiques…»
«Ce qui est vrai, ajoute cette source informée, c’est qu’à trois reprises, le chef de l’Etat M. Elias Hraoui a parlé avec MM. Hariri et el-Sabeh pour leur remontrer qu’interdire l’interview du général Aoun serait une erreur. Le président de la République a justement mis en garde contre les réactions qu’une telle mesure provoquerait au niveau de l’opinion, soulignant que l’Etat doit épargner au pays de telles secousses.Il a ajouté que le pouvoir ne doit pas donner l’impression de craindre le verbe opposant, étant toujours en mesure d’appliquer la loi après l’interview si elle devait être transgressée. Mais les deux hommes n’ont rien voulu entendre et au risque de paraître démentir M. Hariri, nous croyons savoir que c’est bien lui qui a tenu à ce que le général ne passe pas à l’écran. Cela sous prétexte qu’on ne pouvait pas permettre la réédition du «coup Gemayel», à savoir qu’un leader opposant occupe l’espace médiatique sans qu’on ne puisse lui répondre.Ce qui d’ailleurs n’est pas tout à fait exact puisque M. Fouad Siniora est intervenu en direct sur l’antenne, en son nom propre comme au nom du chef du gouvernement pour répondre à M. Gemayel sur l’affaire de Kfar Falous ou celle des 30 millions de dollars.Pour répondre à ce prétexte, précise encore le même ministre, l’on a proposé qu’à Beyrouth MM. Elie Ferzli et Chaker Abousleiman, débateurs redoutables, apportent la contradiction au général Aoun; mais M. Hariri a refusé même cette formule et on l’a vainement relancé une dernière fois samedi, avant son départ pour l’Arabie séoudite: il s’est montré inflexible, ce qui n’a pas peu indisposé M. Hraoui…»

Ph.A-A.
Un ministre de premier plan qui a son franc-parler, surtout en privé, se dit «épaté par la foudroyante capacité d’adaptation et de revirement du pouvoir. Il ne s’est pas plus tôt avancé sur une voie qu’il fait machine arrière, poussant parfois l’effronterie jusqu’à imputer à d’autres les positions ou les décisions qu’il défendait encore la veille! Son...