Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

Le facteur temps en vedette sur le plan régional

A Beyrouth comme dans certaines capitales arabes on suit de près, avec un intérêt mêlé d’espoir et de scepticisme, les développements politiques en Israël. On attend de voir si la fronde au sein du Likoud, alliée à la montée en puissance de l’opposition travailliste que l’opinion publique soutient désormais à plus de 55%, ne va pas provoquer l’éclipse de Netanyahu et l’organisation d’élections législatives anticipées. Au bout desquelles le pouvoir reviendrait de nouveau aux pacifistes ce qui redonnerait vie au processus Baker bloqué par l’extrémiste de droite depuis son avènement il y a deux ans.
«Mais, relève un diplomate occidental, un parti est aussi difficile à disloquer en Orient qu’à mettre sur pied. C’est toujours une affaire de collage de courants, voire une coalition de partis et il est si difficile de l’édifier qu’aucun des partenaires, sauf pour une question de vie et de mort, n’envisage jamais sérieusement de lui porter un coup fatal. On l’a vu avec les travaillistes divisés pendant plusieurs années entre deux camps menés par Rabin et Pérès, qui ont fini par faire équipe bien qu’ils se détestassent cordialement. Même au niveau national, plus d’une fois la gauche et la droite israéliennes ont formé des Cabinets d’union, avec rotation des chefs chaque deux ans. On ne peut donc trop miser sur un éclatement du Likoud, bien que tout en politique soit évidemment possible, même et surtout les grandes premières...».
«Ceci dit, souligne ensuite cet observateur étranger, Netanyahu lui aussi table sur des changements dans la région, plus particulièrement dans le monde arabe et il doit lorgner en se frottant les mains les développements en Irak car toute radicalisation de la position américaine en Moyen-Orient entraîne un double effet complémentaire de rapprochement avec ses propres positions et de retardement du processus. L’intervention apaisante de la Russie dans le conflit Bagdad-Washington a donc dû déplaire au plus haut point au chef du gouvernement israélien qui ne cesse d’ailleurs, depuis la tournée de Primakov voici quelques semaines, d’affirmer que Moscou n’a pas de rôle dans la région et ne doit pas tenter de se mêler du jeu en cours. Mais comme la réussite de la diplomatie russe reste relative, comme le prouve la polémique irako-américaine sur le nombre de sites qui servent aux Irakiens de caches d’armes prohibées, Netanyahu peut encore espérer dans une nouvelle exacerbation de cette crise. D’autant que les Américains, loin de relâcher la pression, surtout sur le plan militaire, ne font que l’accentuer chaque jour en envoyant sans cesse des renforts puissants dans la région».

Expectative

«En bref, ajoute ce diplomate, autant que le camp arabe qui lui fait face, Netanyahu mise sur le facteur temps. Les deux parties, singulièrement sur le volet palestinien, maintiennent donc le dialogue à feu doux — surtout pour ne pas braquer inutilement les Américains, très frileux quant à une éventuelle rupture totale—, mais sans qu’évidemment cela ne puisse donner des résultats définitifs».

Le chaud et le froid

Et de répéter qu’en «alternant le chaud et le froid, Netanyahu, plus habile et moins impulsif que ne le disent ses contempteurs — qui oublient que c’est un diplomate de carrière rompu à toutes les astuces du métier— a réussi jusque - là à triompher de tous les obstacles dressés sur sa route. Ainsi, s’il est vrai que la majorité arabe a boudé la conférence de Doha parce qu’Israël y participait, s’il est vrai que dans son mot inaugural le chef de l’Etat qatariote n’a pas hésité à imputer nommément à Netanyahu la responsabilité du torpillage de la paix, il n’en reste pas moins que ce congrès économique a pu se tenir et qu’à cette occasion Washington n’a pas du tout lâché le chef du gouvernement israélien. Sur le plan intérieur, ce dernier se montre confiant car ses principaux rivaux au sein du Likoud, divisés entre eux, n’ont pas assez de force pour l’évincer. De plus, pour rassembler la coalition autour de sa personne, il fait valoir devant la base que le «mauvais procès» que lui font «les ambitieux» qui ne songeraient qu’à prendre sa place, sert avant tout les intérêts des travaillistes qui l’emporteraient haut la main en cas d’élections anticipées. En outre sur le plan ponctuel, Netanyahu profite paradoxalement du refus que le chef des travaillistes oppose à la proposition américaine, toujours renouvelée, de formation d’un Cabinet d’union en Israël: Ehud Barak espère en effet devenir lui-même bientôt premier ministre, grâce à des élections anticipées, et ne voit pas pourquoi il devrait se contenter d’un portefeuille dans une formation dirigée par son adversaire...».

Eviction de Netanyahu?

«Il serait illusoire, ajoute ce diplomate, de miser sur une éviction rapide de Netanyahu. Et même en cas de victoire travailliste lors d’élections anticipées, il faut comprendre que Barak n’est pas Pérès ou Rabin et que la politique radicale du Likoud a laissé des traces profondes en Israël. Ainsi on entend aujourd’hui le chef des travaillistes déclarer lui-même qu’il ne signerait jamais avec les Palestiniens» des accords instaurant pour nous des frontières peu sûres, «autrement dit qu’il envisage lui aussi de rogner beaucoup les accords d’Oslo, au nom de cette» sécurité d’Israël «sur laquelle Netanyahu a fondé toute sa politique».

E.K.
A Beyrouth comme dans certaines capitales arabes on suit de près, avec un intérêt mêlé d’espoir et de scepticisme, les développements politiques en Israël. On attend de voir si la fronde au sein du Likoud, alliée à la montée en puissance de l’opposition travailliste que l’opinion publique soutient désormais à plus de 55%, ne va pas provoquer l’éclipse de Netanyahu...