Rechercher
Rechercher

Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Reconstruction des villes après les guerres à l'ordre des ingénieurs Technologies importées, savoir-faire local, pratiques, mécanismes et modalités ... (photos)

Le colloque organisé conjointement par l’Union internationale des architectes (U.I.A.) et l’Ordre des ingénieurs a clôturé, hier, ses travaux placés sur le thème «reconstruction des villes après les guerres». Le programme de la dernière journée s’est articulé autour de deux sujets : «Les technologies importées et le savoir-faire local» et, «les pratiques de la reconstruction et les modalités». Ce dernier point a suscité un débat multidisciplinaire entre un architecte, un historien, un économiste et un juriste qui ont examiné les divers mécanismes mis en œuvre pour résoudre les problèmes inhérents à la propriété foncière et aux modes de financement.
La première séance — dirigée par Pierre Neema, architecte, membre du Conseil supérieur de l’urbanisme — a été consacrée aux technologies de pointe parachutées par les entreprises multinationales, les méthodes de construction traditionnelles, les conditions et les composantes d’un éventuel «transfert de technologie». Rifat Chadirji, architecte et théoricien irakien, titulaire d’une chaire honorifique à «l’Institute of British Architects» ( 1982), à «l’American Intitute of Architects» (1987), et prix «Agha Khan d’Architecture» (1986), s’est penché sur «le caractère social de la technologie». Les trois formes essentielles de l’architecture étant «l’utilitaire, le symbolique et l’esthétique», toute négligence de cette relation triangulaire entraînerait un déséquilibre dans le rapport fabrication — produit. Ce qui aurait pour effet, «de perturber à son tour aussi bien la spécifité de la vie individuelle, que la vie sociale», explique M. Chadirji. Vue sous cet angle, on comprend que «l’architecture au Liban offre l’image de l’impuissance d’une société à réaliser un équilibre entre les trois formes de besoins. L’angoisse de l’individu face à la guerre constitue une des causes principales de son désintérêt pour la société. Sa subjectivité se limite alors au profit égoïste», a-t-il ajouté.

Technologie et identité

Prenant à son tour la parole, Ngo Trung Hai, Prix UIA et UNESCO pour le concours international «Habiter demain», a défini les modes d’intervention appliquées pour la reconstruction du Vietnam. L’architecte devait souligner l’importance de concilier la sauvegarde du patrimoine et l’adaptation aux transformations nécessitées par l’évolution urbaine.
Au menu également, «globalisation et identité». Mettant l’accent sur ce «levier ( identité) indispensable pour mobiliser les peuples et leur permettre d’être maîtres de leurs décisions, à la lumière de leurs intérêts et de leurs besoins réels et, non sur la base des fantasmes de la course pour rejoindre le siècle ...», l’architecte Raïf Fayad a proposé, contre toute attitude réactionnaire refermée sur elle-même, «une révolte contre l’aliénation qui nous est imposée. Nous devons choisir une technologie qui nous convient; que nous saurons utiliser de façon adéquate; que nous puissions produire conformément à nos besoins, hors du système de «production à distance...»».
M. Sultan Barakat, directeur du département reconstruction et développement des villes détruites à l’Université de York - Grande-Bretagne, a présenté quelques-unes des technologies de l’urgence.

Données historiques,
juridiques et
économiques

Après la pause déjeuner, les conférenciers ont assisté à la deuxième séance de la journée portant sur les pratiques de la reconstruction, ses mécanismes et ses modalités et dont le modérateur était M. Mohammed Fawaz, ancien directeur géneral de l’Urbanisme.
Spécialiste de l’histoire des villes françaises contemporaines, directrice de recherche au CNRS, et coauteur d’un ouvrage intitulé «Villes et guerres», Danièle Voldman a présenté à titre d’exemple, l’expérience française après la Deuxième Guerre mondiale. «Un des enjeux du nouveau gouvernement a été le financement et les procédures de la reconstruction des villes détruites (...) Les urbanistes et les technocrates ont inventé des façons d’effacer les destructions en adaptant les villes à l’ère de l’industrialisation. Ils devaient tenir compte des vœux des sinistrés qui voulaient retrouver rapidement leur logement, de ceux des politiques qui avaient à gérer les budgets et des interêts propres à l’aménagement des villes modernes», a indiqué Mme Voldman.
Quant à l’intervention de M. Joseph Nasr, historien, urbaniste, membre du «Conseil de la société internationale de l’Histoire de la planification», et auteur de plusieurs publications — elle s’est basée sur les transformations du parcellaire en Allemagne et en France, après la Deuxième Guerre mondiale.
Me Sami Nahas a ensuite donné un aperçu historique des lois et des règlements en vigueur avant 1990. Il a souligné leur incapacité de résoudre les problèmes concernant, en particulier, la politique d’expropriation et le nouveau plan d’aménagement du centre-ville. Il a fallu légiférer et la loi n° 117/91 a permis «l’instauration d’un instrument légal approprié à la réorganisation des zones sinistrées, et ce, dans le but de tourner la page du passé et de s’ouvrir à un meilleur avenir». M. Nahas devait ensuite présenter un aperçu historique des différentes phases de création de la société foncière Solidere chargée de reconstruire le centre-ville de Beyrouth. Le juriste devait s’attarder sur l’article 63 des statuts de la société, pour expliquer le mécanisme contractuel permettant à certains propriétaires et ayants droit de participer à la reconstruction du centre-ville en recouvrant leurs biens...
A l’option «société foncière», M. Georges Corm proposera d’autres alternatives préservant les droits de toutes les parties en présence. Son intervention a porté sur les données économiques et financières relatives à la reconstruction du centre historique de Beyrouth, en particulier la détermination de la valeur des biens-fonds, les coûts de la réhabilitation, et la capacité de l’Etat et du secteur privé de mettre en œuvre des procédures respectant les structures de la propriété et assurant un démarrage rapide des opérations. M. Corm a noté «la possibilité aujourd’hui, six ans après l’adoption par le Parlement libanais du schéma prévoyant l’institution d’un opérateur unique et exclusif, la société Solidere, de réaliser pourquoi d’autres solutions auraient été plus avantageuses et vraisemblablement plus rapides dans la mise en œuvre, comme le prouve l’avancement remarquable de la réhabilitation d’autres zones très touchées aussi par les hostilités...»
Le colloque international aura permis de susciter un débat entre architectes, ingénieurs, économistes, sociologues, juristes, sur les apports possibles de l’architecture aux problèmes posés par la reconstruction des villes détruites par les guerres.
Signalons que les architectes étrangers visiteront aujourd’hui, jeudi 13 novembre, le siège de l’Ordre des ingénieurs de Tripoli, où M. Nabil Harb donnera une conférence sur la reconstruction de la ville et la préservation de son patrimoine architectural.

May MAKAREM
Le colloque organisé conjointement par l’Union internationale des architectes (U.I.A.) et l’Ordre des ingénieurs a clôturé, hier, ses travaux placés sur le thème «reconstruction des villes après les guerres». Le programme de la dernière journée s’est articulé autour de deux sujets : «Les technologies importées et le savoir-faire local» et, «les pratiques de la...