Ankara met en garde Athènes contre les risques d'un affrontement armé La tension s'aggrave entre la Turquie et la Grèce

La Turquie a averti hier la Grèce que la tension actuelle entre les deux pays en raison de manœuvres en cours à Chypre par les troupes grecques et chypriotes-grecques pourrait provoquer un affrontement armé.
«L’autre partie (Grèce et Chypriotes-grecs) joue un jeu très dangereux. Ils jouent avec le feu», a déclaré le ministre d’Etat turc chargé du dossier chypriote Sukru Gurel, à l’issue d’un entretien avec le secrétaire d’Etat britannique chargé des relations avec l’Europe, Doug Henderson.
«Des décisions qui augmentent la tension et des démonstrations de force militaires non seulement empoisonnent les relations entre les deux côtés mais peuvent aussi mener à une possibilité accrue d’accidents, y compris un affrontement armé», a-t-il poursuivi.
«Il faut qu’ils mettent fin à leur politique consistant à augmenter la tension», a ajouté M. Gurel.
Le ministre turc faisait référence aux manœuvres «Nikiforos» 97, en cours dans le sud de Chypre et auxquelles des unités de l’armée de l’air et de la marine grecque participent aux côtés des forces chypriotes-grecques, dans le cadre de leurs propres manœuvres «Toxotis», en Méditerranée orientale.
Les déclarations de M. Gurel surviennent au lendemain d’une visite à Ankara de l’émissaire spécial américain pour Chypre, Richard Holbrooke, qui avait appelé lundi la Grèce, la Turquie et Chypre, à réduire leurs manœuvres militaires en mer Egée, afin de diminuer la tension dans la région.
«Ils (la Grèce, la Turquie et Chypre) ne devraient pas accroître les tensions». Ces exercices «sont une perte de temps et d’argent», avait-il dit.
Dans l’exercice Nikiforos, les forces grecques et chypriotes-grecques ont simulé des attaques contre des «objectifs ennemis». Nicosie et Athènes sont liés par un pacte de défense commune depuis 1993.

Baguette magique

La Turquie prévoit de se livrer à son tour, du 1er au 9 novembre selon la chaîne turque d’information «NTV», à des manœuvres militaires, baptisées «Toros», qui se dérouleront dans le nord de Chypre et en Méditerranée orientale.
«Ces exercices Nikiforos et Toros (...) Si je pouvais agiter une baguette magique et m’en débarrasser, je le ferais», avait dit M. Holbrooke lundi soir.
NTV a également affirmé que l’armée turque avait envoyé lundi soir des troupes supplémentaires dans le nord de Chypre depuis le port de Mersin, sur la Méditerranée, à une centaine de km de Chypre. L’envoi de ces troupes a été qualifié de «routine» par des sources militaires citées par NTV.
Aucune déclaration officielle n’a été faite mardi par l’armée concernant l’envoi de ces troupes et l’organisation des manœuvres Toros.
Les responsables turcs affirment que l’exercice Nikiforos a donné lieu à des simulations d’offensive contre la partie nord (turque) de Chypre.
Selon certains journaux turcs, la Turquie a refusé une proposition de M. Holbrooke d’annuler les manœuvres «Toros».
La presse turque affirme que la visite de M. Holbrooke, qui a rencontré notamment le président Suleyman Demirel et le premier ministre Mesut Yilmaz, n’a pas rencontré d’enthousiasme à Ankara.
Le coordinateur du département d’Etat pour Chypre Thomas Miller, qui accompagnait M. Holbrooke à Ankara, s’est rendu hier à Athènes pour rencontrer le ministre grec des Affaires étrangères Théodore Pangalos.
La Grèce a protesté auprès du gouvernement turc et informé les ambassadeurs de l’UE et le chargé d’affaires américain en Grèce, après une série d’incidents dans la zone où se déroulent l’exercice «Nikiforos». Les autorités grecques et chypriotes-grecques ont vivement dénoncé une série de violations de leurs espaces aériens respectifs par des appareils turcs.
Ankara, qui est en désaccord avec Athènes sur la délimitation des espaces aériens, a démenti ces violations. (AFP, Reuter)