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Actualités - ANALYSE

Hariri et les présidentielles Des positions contraires à deux ans d'intervalle

Ce qui est valable aujourd’hui ne le sera plus demain et vice versa... Rien n’illustre mieux cet axiome d’humoriste que l’attitude du président Rafic Hariri par rapport aux présidentielles.
En 1995, il blâmait haut et fort ceux qui s’y prenaient trop tôt, soulignant qu’on installait de la sorte dans le pays une tension artificielle nuisible à sa stabilité et partant à la livre, objet constant de tous ses vœux. Et il exigeait, pour couper court à la crise en gestation, qu’on tranchât tout de suite, soit par un accord sur la prorogation (qu’à l’époque il soutenait, et dont il était même l’initiateur), soit par l’élection anticipée d’un nouveau président.
Or aujourd’hui, c’est M. Hariri lui-même qui ouvre la bataille des présidentielles, en annonçant qu’il n’est pas question de renouveler encore une fois le mandat du président Elias Hraoui qui, lui-même, affirme-t-il, n’en veut pas. Le chef du gouvernement donne ainsi indirectement son feu vert pour la présentation des candidatures. Il lance donc la campagne un an à l’avance, et alors que l’état de la livre n’est pas des plus brillants, grâce à l’admirable gestion économique du gouvernement qu’il dirige...
Pourquoi ce revirement? Un haririen répond par les explications suivantes:
— «En 1995, le président Hariri avait mené campagne pour la prorogation tout en sachant qu’elle était impopulaire dans un pays qui aspire au changement et qui est en même temps attaché à la démocratie. A l’époque cependant, les circonstances qui prévalaient sur le plan régionalo-international imposaient la prorogation, pour coûteuse qu’elle fût. En effet il avait fallu alors débloquer beaucoup de fonds pour protéger la livre contre les attaques des spéculateurs pariant sur le dollar. C’est pour limiter les dégâts, pour enrayer d’un coup les tiraillements politiques, facteurs d’instabilité, que M. Hariri avait pris les devants en faisant fermer le plus rapidement possible le dossier des présidentielles».
«Aujourd’hui, poursuit ce loyaliste, la situation régionalo-internationale, qui s’est envenimée, ne permet plus qu’on maintienne un statu quo d’attente au Liban. Dès lors le pays ne peut plus se payer le luxe d’une nouvelle rallonge du mandat présidentiel se traduisant sans doute par un marasme accentué et un surcroît de difficultés socio-économiques».

Logique lumineuse

Sans expliquer en quoi la présence de M. Hraoui à Baabda serait préjudiciable à l’économie, sans dire non plus en quoi la présence d’un autre lui serait profitable, ce partisan du chef du gouvernement, dont la logique reste lumineusement discutable, affirme qu’il faut «sans tarder ouvrir la porte aux candidats et redonner ainsi de l’espoir aux citoyens qui pourront envisager un changement bénéfique avec l’avènement d’un nouveau régime inspirant entière confiance, réalisant les projets de développement qu’attendent les régions et attirant les capitaux étrangers».
En somme tout ce qui n’a pas été réalisé sous le présent régime. A cette nuance près, et ce ministre l’oublie un peu trop, que dans le système de Taëf, ce n’est pas au régime de réaliser mais au gouvernement. On voit donc que les haririens font retomber sur Baabda les responsabilités qui en réalité leur sont directement imputables. «Mystification d’autant plus déplorable, ajoute un hraouiste, que ces mêmes bons amis se sont acharnés, ces derniers temps surtout, à contrer toute idée, tout projet avancés par le chef de l’Etat. Non seulement ils ne font rien mais ils empêchent quiconque de faire».
Et de relever que côté espoir, «ce qui décourage les gens, c’est sans doute l’idée que ce sont les mêmes gouvernants, les mêmes qui tiennent les rênes — d’ailleurs si mal qu’elles leur tombent des mains, comme le prouve le vote sur le plan du développement — qui vont rester en place. Nous-mêmes, nous le reconnaissons volontiers, nous n’y pouvons rien, mais d’autres non plus. Le pouvoir nous avons vainement tenté d’en corriger les déviations, en suggérant des réformes qui auraient un peu réduit ce mal chronique des divisions et des querelles qui mine le système. Mais en face l’on a fait barrage à cette tentative, pour continuer à cultiver une mentalité de partage du gâteau...»
«Lucidité un peu tardive, observe pour sa part un opposant de l’Est. La troïka est conjointement responsable, du début à la fin. Chacune de ses composantes, à tour de rôle ou ensemble, s’est moquée ou se moque encore des gens. Ainsi, nos éminents dirigeants ne cessent de se vanter en chœur du parfait état de la sécurité dans le pays, tout en se récriant, si on évoque le départ des forces syriennes, qu’un tel retrait entraînerait le chaos. Où est le mérite si la sécurité même doit rester empruntée? Où est la souveraineté, où est l’indépendance quand l’existence du pouvoir même ou le maintien du gouvernement dépend d’un simple claquement de doigts? Où est le souci de l’intérêt supérieur national quand la 425 se trouve liée à la 242 par la volonté même de nos responsables? Et aujourd’hui, où est la stabilité économique, qu’en ont-ils fait? Qu’entendons-nous d’autre que vols, rapines, magouilles, corruption généralisée, gaspillage et gabegie? Ce n’est pas tel ou tel qui doit partir, c’est tout le système qu’il faut revoir...»

E.K.
Ce qui est valable aujourd’hui ne le sera plus demain et vice versa... Rien n’illustre mieux cet axiome d’humoriste que l’attitude du président Rafic Hariri par rapport aux présidentielles.En 1995, il blâmait haut et fort ceux qui s’y prenaient trop tôt, soulignant qu’on installait de la sorte dans le pays une tension artificielle nuisible à sa stabilité et partant à...