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Actualités - CHRONOLOGIE

Washington a remué, sans le réveiller un processus de paix en sommeil

Au terme d’une tournée de six jours au Proche-Orient, Madeleine Albright a remué un processus de paix en sommeil depuis l’arrivée au pouvoir de Benjamin Netanyahu, il y a quinze mois, mais sans pour autant vraiment le réveiller. Elle-même a modestement estimé avoir fait «quelques petits pas alors qu’il aurait fallu faire de grands pas». La totalité des interlocuteurs arabes qu’elle a rencontrés se sont félicités que Washington ait repris à cette occasion — ou donné l’impression de reprendre — le rôle «d’honnête courtier» entre Israël et ses voisins, en dénonçant les initiatives «provocantes» de l’Etat juif, en même temps que le «terrorisme» intégriste palestinien.
Evaluant les résultats de la visite du chef de la diplomatie américaine, le président de l’Autorité palestinienne Yasser Arafat a affirmé hier que lui-même et le président égyptien Hosni Moubarak jugeaient «positive» la tournée que vient d’achever le secrétaire d’Etat américain Madeleine Albright au Proche-Orient.
«La visite de Mme Albright a créé un nouveau climat positif dans la région», a déclaré M. Arafat à la presse au terme d’un entretien avec M. Moubarak à Alexandrie, dans le nord de l’Egypte.
«L’évaluation palestinienne et égyptienne de cette tournée est positive», a-t-il ajouté, soulignant que «Mme Albright a soutenu clairement les termes de référence du processus de paix, à savoir le principe de l’échange de la terre contre la paix et les résolutions 242 et 338 du Conseil de Sécurité de l’ONU».
M. Arafat, qui a regagné Gaza après une visite de quelques heures en Egypte, s’est félicité de l’appel de Mme Albright à Israël «de s’abstenir de toute mesure unilatérale» estimant qu’elle visait par ces propos «l’expropriation des terres, la colonisation et les autres mesures adoptées par Israël à Jérusalem».
Le dirigeant palestinien a indiqué avoir évoqué avec M. Moubarak «la situation dans les territoires palestiniens, qui sont toujours soumis à un important bouclage».De son côté, après avoir dénoncé avec fracas, la semaine dernière, «la politique catastrophique» de Benjamin Netanyahu, le ministre français des Affaires étrangères, Hubert Vedrine, a estimé que «l’insistance méritoire de Mme Albright a permis d’obtenir quelques promesses sur quelques mesures concrètes. Mais, a ajouté le diplomate, ce n’est pas encore le réveil du processus de paix».
Cependant, faute d’avoir pu relancer les pourparlers, Madeleine Albright a invité les deux parties à envoyer des représentants afin d’en discuter à Washington, notamment lors d’une rencontre prévue fin septembre à New York entre David Lévy et son homologue palestinien Mahmoud Abbas (Abou Mazen).

A contrecœur

En somme, Madeleine Albright, qui est venue dans la région à contrecœur, a obtenu des «petits pas» et a juré qu’on ne l’y reprendrait plus: en cinq jours, le secrétaire d’Etat américain a découvert ce que de Gaulle appelait «l’Orient compliqué».
Cette première tournée au Proche-Orient s’est mieux terminée qu’elle n’avait commencé. La veille de son retour, Israël a annoncé deux concessions aux Palestiniens: le versement de la moitié des arriérés de recettes fiscales qui leur était dû et un veto à un projet controversé de construction de logements juifs.
Mme Albright a aussi obtenu une reprise, avant la fin du mois aux Etats-Unis, des contacts israélo-palestiniens à haut niveau, gelés depuis le dernier attentat à Jérusalem, le 4 septembre.
Elle n’a pas réglé pour autant la crise de confiance entre Israéliens et Palestiniens. Elle n’a pas non plus sorti de l’impasse les négociations de paix entre Israël et la Syrie, bloquées depuis 18 mois.
Entre Israéliens et Palestiniens, Mme Albright a donné l’impression de naviguer à vue. Débarquant dans une région qu’elle connaissait mal et juste après un attentat israélien meurtrier, elle s’est laissée enfermer par le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans une logique sécuritaire, accusant Yasser Arafat de ne pas lutter assez contre les intégristes armés du Hamas.
Devant l’indignation des Palestiniens, elle a rectifié, prenant de court le gouvernement israélien. Elle a demandé à ce dernier de geler ses «mesures unilatérales»: colonisation juive des territoires palestiniens, blocus économique et punitions collectives.
Il faut, a-t-elle dit, que Netanyahu accepte un «arrêt de jeu» (time out) dans la répression. L’expression a fait recette: les journalistes accompagnant Mme Albright imitaient à tout bout de champ le signe de l’arrêt de jeu pour les basketteurs américains (les deux mains croisées en forme de T).
Mme Albright avait attendu huit mois avant de venir, bien décidée à ne pas s’enliser dans de vaines navettes comme son prédécesseur Warren Christopher.
Mais elle est venue «sans enthousiasme, sans plans concrets, sans carottes et sans bâton» pour faire pression sur Netanyahu, estime un éditorialiste du quotidien israélien «Haaretz», Yoek Marcus. Arafat lui a reproché de ne pas avoir amené d’idées nouvelles.
Èlle a fini par lancer aux deux parties qu’elle ne reviendrait que «lorsqu’elles auront pris les décisions difficiles» et pas pour «faire tapisserie». Un geste de dépit atténué par les éloges des trois meilleurs alliés arabes de Washington: l’Egypte, l’Arabie Séoudite et la Jordanie.
Mme Albright «parle vrai même si c’est de manière peu diplomatique», a dit, dimanche, le roi Hussein de Jordanie. Même Hafez el-Assad, le président syrien, lui a épargné les longues digressions historiques qu’il se plaisait à infliger à Warren Christopher.
Elle n’a pas réussi à convaincre pour l’instant Le Caire, Ryad ou les Emirats arabes unis de participer à la conférence économique régionale de Doha (Qatar) censée promouvoir les contacts économiques entre Arabes et Israéliens.
Mais le style Albright semble avoir plu, dans une région où symboles et contacts personnels jouent un grand rôle. M. Christopher négligeait les uns et n’était pas doué pour les autres.
Même les Séoudiens «se sont habitués», a-t-elle dit, à traiter en égale la première femme secrétaire d’Etat de l’histoire des Etats-Unis.
A son arrivée à Djeddah (Arabie Séoudite), Mme Albright portait un chapeau de paille beige du plus bel effet. Pour sa visite de la base aérienne Prince Sultan, près de Ryad, elle était vêtue de lin couleur sable et arborait une casquette de baseball marquée «secrétaire d’Etat».
Elle a aussi multiplié les occasions de s’adresser directement aux populations. Elle a parlé à la radio officielle palestinienne et a rencontré des écoliers israéliens et palestiniens et s’est rendue au mémorial de l’Holocauste à Yad Vashem. (Reuter, AFP)
Au terme d’une tournée de six jours au Proche-Orient, Madeleine Albright a remué un processus de paix en sommeil depuis l’arrivée au pouvoir de Benjamin Netanyahu, il y a quinze mois, mais sans pour autant vraiment le réveiller. Elle-même a modestement estimé avoir fait «quelques petits pas alors qu’il aurait fallu faire de grands pas». La totalité des interlocuteurs...