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Actualités - ANALYSE

Jezzine : désaccord au parlement...

En 93 et en 96 la tragédie du Sud, l’exode massif de cette région, avait été comme on sait un ferment d’union nationale. Aujourd’hui, à cause en partie des pratiques confessionnalistes accumulées sur tous les plans par les gens du pouvoir, le climat n’est plus le même et, à tout propos, une sourde hostilité oppose les communautés. On voit ainsi le désaccord se manifester en premier lieu à la Chambre. Là, M. Nabih Berry, mettant sa casquette de leader sudiste, refuse le dialogue que lui proposent les députés de Jezzine MM. Nadim Salem (qui est également ministre), Samir Azar et Sleiman Kanaan qui souhaitent parvenir à un consensus général mettant leur région hors d’atteinte des conflits et des surenchères de toutes sortes...

MM. Azar et Kanaan avaient demandé audience spéciale au président Berry, lors de la réunion du bloc parlementaire sudiste lundi dernier. Il leur a sèchement répondu qu’il n’était pas disposé à tenir une telle réunion. Et cela sous l’extraordinaire prétexte, géographiquement incorrect et politiquement ahurissant (surtout venant de la part du numéro deux de la République, juriste de surcroît) que Jezzine ne serait pas une affaire locale mais «régionale»! Une justification que M. Berry a toutefois atténuée de suite en observant que Jezzine ne doit pas être considérée comme un cas isolé, puisqu’elle fait partie du Sud occupé. Mais M. Berry n’a pas été au bout de cette logique et n’a pas proposé qu’on tienne une assemblée élargie pour discuter de tout le dossier, Jezzine comprise... Résultat pratique: le chef du Législatif, en refusant de leur parler, dénie toute représentativité à ses collègues de Jezzine, pourtant élus sur sa propre liste. Rappelons d’ailleurs que M. Nadim Salem a été pour sa part mis au ban du bloc Berry pour «insubordination» car il a continué à participer aux réunions de Mar Roukoz. Pour couronner le tout, le président de la Chambre a averti MM. Azar et Kanaan qu’il se charge lui-même du dossier pour entreprendre des contacts internationaux notamment avec les Américains afin qu’ils exercent des pressions de retenue sur Israël. Une façon de rassurer un peu les deux parlementaires mais aussi de les prier de cesser de s’occuper de ce qui les regarde, de s’agiter à gauche et à droite pour sauver leur ville...

Apaisement

Reprenant ses explications, M. Berry a affirmé à MM. Azar et Kanaan qu’il cherche à atténuer les tensions, à calmer les susceptibilités au Sud en évitant tout traitement à caractère sectaire et en donnant au problème sa dimension communautaire. Ce qui peut vouloir signifier que le chef d’Amal ne veut pas contrarier le Hezbollah, partie impliquée à Jezzine. Il précise ensuite qu’il faut avant tout ménager «les frères et maintenir la coordination avec eux au plus haut point, sans leur causer du tracas... et aussi sans nous embarrasser de telles questions». Il confirme ensuite qu’il n’approuve pas du tout la formation d’un Rassemblement de Jezzine et les assises de Mar Roukoz, ajoutant qu’il avait suggéré qu’au moins on déplace le lieu de rencontre (trop symbolique sans doute: c’est là que jadis le Front libanais se réunissait) afin que d’autres puissent s’y rendre. Encore une remarque étonnante de la part d’un dirigeant de la Deuxième République qui a aboli toutes les barrières entre les régions...
Bien entendu, le président Berry s’est montré tranchant mais courtois. Il n’en va pas exactement de même de certains de ses lieutenants, parlementaires et autres, qui ont développé de violentes diatribes contre les notables de Jezzine, les traitant au passage de tous les noms d’oiseaux...
Heureusement, tous les cercles officiels ne sont pas de cet avis et le ministre des Affaires étrangères, M. Farès Boueiz, a pour sa part soutenu et encouragé le Rassemblement de Jezzine, soulignant combien la campagne immunitaire qu’il mène est légitime et rappelant que l’objectif n’est pas de parler de «Jezzine d’abord», ni de négocier avec l’ennemi ou ses agents, mais bien de chercher à diminuer une tension qui risque de provoquer l’exode de la population, exode qui ne peut servir que les desseins de l’occupant israélien...
Alors, pourquoi l’attitude hostile du camp Berry? «Tout simplement parce que le leader d’Amal veut garder l’initiative et ne veut pas que la ville échappe à son influence», estime une source opposante. Un jugement qui paraît toutefois un peu sommaire parce que, sur le plan populaire, il est évident que Jezzine n’est pas dans l’orbite de M. Berry ou de son mouvement. Alors, il faut sans doute trouver l’explication dans ce que M. Berry lui-même fournit comme indication: ménager les frères...
Le cas échéant aux dépens des siens.
Ph. A.-A.
I.D.
En 93 et en 96 la tragédie du Sud, l’exode massif de cette région, avait été comme on sait un ferment d’union nationale. Aujourd’hui, à cause en partie des pratiques confessionnalistes accumulées sur tous les plans par les gens du pouvoir, le climat n’est plus le même et, à tout propos, une sourde hostilité oppose les communautés. On voit ainsi le désaccord se...