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Actualités - CHRONOLOGIE

Le premier ministre a longuement évoqué ce dossier avec Assad à Damas L'escalade au sud : guerre d'usure ou prémices d'une conflagration ? Le chef de l'état redoute une invasion de la Békaa ouest mais Hariri exclut un dérapage régional (photos)

L’escalade perceptible depuis plusieurs jours au Liban-Sud s’inscrit-elle simplement dans le cadre de l’interminable guerre d’usure dont le Sud est le théâtre depuis de nombreuses années ou constitue-t-elle, au contraire, le prélude à une opération militaire de grande envergure que l’Etat hébreu serait tenté de mener pour diverses considérations en rapport aussi bien avec la conjoncture régionale qu’avec la situation interne en Israël même? Les points de vue divergent à ce propos dans les hautes sphères du pouvoir et les dirigeants ne semblent pas avoir, manifestement, la même perception de l’évolution de la situation dans la région méridionale du pays.

Le président Elias Hraoui et le chef de la diplomatie Farès Boueiz n’excluent pas qu’Israël se livre à une opération d’envergure au Sud ou dans la Békaa. Le chef du Législatif Nabih Berry écarte, par contre, une telle possibilité. Ce point de vue a été repris en soirée par le premier ministre Rafic Hariri qui a exclu toute «guerre dans la région», à son retour de Damas où il a conféré hier pendant trois heures avec le président syrien Hafez el-Assad. A son arrivée à Beyrouth, M. Hariri s’est rendu chez M. Berry pour un large tour d’horizon des développements en cours sur la scène locale.
Si les hauts responsables n’ont donc pas la même analyse de l’évolution de la situation au Sud, il n’en reste pas moins que sur le terrain l’escalade se poursuit sans répit. Dans la journée d’hier, un soldat israélien a été tué et trois autres blessés au cours d’une attaque menée par les combattants du Hezbollah contre une patrouille israélienne dans la «zone de sécurité». En outre, trois civils libanais ont été blessés par une salve de «Katioucha» qui a visé le village SOS de Sfaray, près de Jezzine.
Samedi, l’aviation israélienne avait mené deux raids: l’un contre une base du Hezbollah près de Baalbeck, où un combattant intégriste avait été tué et trois autres blessés; et le second contre une base du FPLP-CG d’Ahmed Jibril à Raïet, au sud-est de Baalbeck, où un combattant palestinien avait été blessé.
Cette multiplication des raids aériens contre certains secteurs de la Békaa et de Baalbeck a poussé le président Hraoui à émettre l’hypothèse d’une invasion militaire israélienne qui viserait la Békaa. «Je n’exclus pas une opération israélienne qui aurait pour but d’occuper la Békaa-Ouest», a notamment déclaré le chef de l’Etat au cours d’un dîner offert par le vice-premier ministre Michel Murr à Bteghrine en son honneur. «Israël sait qu’une opération de ce genre au Sud lui coûterait très cher, a déclaré le chef de l’Etat. Par contre, la Békaa est une plaine, et une invasion de cette région n’entraînerait pas de lourdes pertes».
Exprimant son inquiétude pour les développements en cours au Sud, le chef de l’Etat devait accuser «une fraction palestinienne» d’avoir tiré, à la fin de la semaine dernière, des roquettes de type «Katioucha» contre le nord d’Israël afin de «faire le jeu d’Israël».
Ce point de vue avait été exposé samedi matin par le ministre des Affaires étrangères Farès Boueiz au cours d’une conférence de presse tenue à Ballouneh (VOIR PAGE 2). Pour M. Boueiz, ce sont les partisans de M. Yasser Arafat qui ont tiré les Katioucha contre le nord d’Israël (cette accusation a été reprise hier par un haut responsable du Hezbollah).
Soulignant qu’Israël cherche à provoquer une escalade au Sud et à «ouvrir un front contre le Liban et probablement contre la Syrie» afin de torpiller l’accord d’Oslo et les arrangements d’avril 1996, le chef de la diplomatie a accusé M. Arafat de se faire l’instrument de la politique israélienne sur ce plan en affirmant que les auteurs du dernier attentat-suicide de Jérusalem venaient du Liban. «M. Arafat fournit à Israël un prétexte pour justifier l’escalade au Liban-Sud», a affirmé M. Boueiz.

Hariri peu inquiet

L’inquiétude du président Hraoui et de M. Boueiz ne semble pas partagée par M. Hariri qui a exclu, à son retour de Damas, toute «nouvelle guerre dans la région». La situation au Sud a évidemment été l’un des principaux dossiers évoqués au cours de l’entretien de trois heures que le premier ministre a eu avec le président syrien. Cet entretien a porté, en outre, sur les dernières mesures prises par le gouvernement en vue de rétablir le «prestige» et «l’autorité» de l’Etat; ces mesures ont reçu l’appui et le soutien de Damas, selon les sources de M. Hariri.
Dans la déclaration qu’il a faite à l’issue de son entrevue avec le chef de l’Etat syrien, M. Hariri (qui a également rencontré M. Abdel Halim Khaddam) a rappelé, en réponse aux questions des journalistes, que «les agressions israéliennes contre le Liban se poursuivent depuis 1978». «Il n’y a rien de nouveau sur ce plan», a-t-il affirmé avant de «déplorer» les propos de M. Arafat selon lesquels les auteurs de l’attentat de Jérusalem venaient du Liban. S’inscrivant en porte-à-faux avec la déclaration de M. Boueiz, le premier ministre a souligné qu’à son avis les propos de M. Arafat n’ont pas été «inspirés par les Israéliens pour justifier une escalade au Liban».
Affirmant que les auteurs de l’attentat de Jérusalem étaient des habitants des territoires occupés, M. Hariri a fait assumer au premier ministre israélien Benjamin Netanyahu la responsabilité de l’attentat de Jérusalem. «Le Liban, a déclaré M. Hariri dans ce cadre, est contre tout acte de violence, de même qu’il condamne toute attaque contre les civils». En réponse à une question sur les tirs de Katioucha contre le nord d’Israël, M. Hariri s’est contenté de souligner que «le Liban a confiance dans le comité de surveillance du cessez-le-feu qui enquête sur ce genre de problèmes».

Sur le terrain

Pour en revenir aux développements sur le terrain, la tension est montée d’un cran hier suite à la mort d’un soldat israélien dans une attaque menée par un commando du Hezbollah contre une patrouille israélienne circulant en bordure du secteur central de la «zone de sécurité». Trois autres militaires israéliens ont été blessés.
Les militaires israéliens ont été atteints au cours d’un accrochage d’une demi-heure avec des combattants intégristes qui s’étaient infiltrés près de Kfarhouné, selon des sources de sécurité.
Un porte-parole du Hezbollah à Beyrouth a revendiqué l’attaque et indiqué que les combattants de la formation avaient échangé des tirs à l’arme automatique et à la roquette antichar avec l’unité israélienne.
«Des hélicoptères israéliens se sont posés sur les lieux de l’embuscade et ont évacué les blessés criblés de balles et mourants», a-t-il ajouté.
Aussitôt, l’armée israélienne a répliqué. Son artillerie a tiré une centaine d’obus sur le bastion intégriste du massif de l’Iqlim el-Touffah, sans faire de victime.
Dans le même temps, deux hélicoptères israéliens ont survolé la Békaa-Ouest et tiré des fusées en direction des ravins empruntés par les combattants intégristes pour leurs infiltrations dans la «zone de sécurité».
Auparavant, une femme libanaise et ses deux enfants avaient été blessés par une salve de missiles «Katioucha» qui ont atteint le siège du Village SOS à Sfaray, près de Jezzine.
A Markaba, dans la «zone de sécurité», un autre civil libanais est sorti indemne de l’explosion d’une charge à proximité de son tracteur.
Les tirs contre l’orphelinat et l’explosion de la bombe n’ont pas été revendiqués.

La journée
de samedi

Dans la journée de samedi, un combattant du Hezbollah avait été tué et trois autres blessés au cours d’un raid aérien près de Baalbeck.
Quatre appareils israéliens ont largué six missiles air-sol sur un camp d’entraînement et un nid de DCA du Hezbollah, situés entre les localités de Janta et Nabichit, sud-est de Baalbeck.
«Un des missiles a touché de plein fouet une base du Hezbollah, qui a bouclé le secteur bombardé», a indiqué un officier de la police libanaise.
A Tel-Aviv, un porte-parole de l’armée israélienne a confirmé le raid contre une «base opérationnelle» du Hezbollah. Les pilotes ont fait état de la destruction de la cible visée.
Toujours dans la journée de samedi, des chasseurs-bombardiers ont largué deux missiles sur une base du Front populaire de libération de la Palestine-Commandement Général (FPLP-CG, d’Ahmed Jibril), à Raïet, non loin de Baalbeck, près de la frontière libano-syrienne.
«Un partisan de Jibril a été blessé par les éclats d’un missile tombé près de sa casemate», a indiqué un officier de la police libanaise. Vendredi la chasse israélienne avait bombardé une base du FPLP-CG à Naamé, sans faire de victime.
Signalons, par ailleurs, que deux soldats israéliens ont été gravement blessés samedi, apparemment par des tirs d’autres militaires israéliens, au cours d’une opération au Liban-Sud.
Un des soldats blessés est dans un état qualifié de «critique» tandis que le deuxième a été gravement atteint.
L’incident s’est produit au moment où des soldats en patrouille ont ouvert le feu vers un combattant anti-israélien qu’ils avaient repéré. Ils se sont semble-t-il trompés de cible, a-t-on précisé de sources israéliennes sans donner d’autres précisions.

Le comité de surveillance

Sur le plan politique, le comité international pour la surveillance du cessez-le-feu a entamé hier matin à Naqoura, l’examen de neuf plaintes libanaises et israéliennes.
Le Liban a présenté cinq plaintes qui concernent des raids aériens et des bombardements israéliens, ainsi qu’une opération militaire israélienne hors de la «zone de sécurité». Au cours de cette opération, cinq intégristes du Hezbollah avaient été tués.
Les plaintes d’Israël portent sur la mort de civils libanais et de miliciens de «l’Armée du Liban-Sud» dans des explosions dans la «zone de sécurité», et la chute de roquettes sur une ville du nord d’Israël vendredi, faisant un blessé. La réunion du comité de surveillance est la quinzième depuis le début de l’année.


L’escalade perceptible depuis plusieurs jours au Liban-Sud s’inscrit-elle simplement dans le cadre de l’interminable guerre d’usure dont le Sud est le théâtre depuis de nombreuses années ou constitue-t-elle, au contraire, le prélude à une opération militaire de grande envergure que l’Etat hébreu serait tenté de mener pour diverses considérations en rapport aussi bien...