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Actualités - ANALYSE

L'opposition très sceptique devant le sursaut d'autorité du pouvoir ...

Le Conseil des ministres a adopté, aux dires du pouvoir, des «résolutions importantes» pour redonner à l’Etat toute autorité dans l’ensemble des régions libérées, en réprimant quiconque défierait la loi.
Fort bien, «mais, dit un opposant de marque, on se pose tout naturellement les questions suivantes:
— Le gouvernement est-il en mesure d’appliquer vraiment ces résolutions? Irait-il jusqu’à la confrontation armée avec les parties qui brandissent l’étendard de la révolte? Prendrait-il le risque des retombées sécuritaires, des troubles que cela pourrait entraîner?
— S’il est tellement soucieux d’autorité et de prestige de l’Etat pourquoi le pouvoir a-t-il attendu jusqu’à maintenant pour réagir? Pourquoi n’a-t-il pas empêché les manifestations et les meetings par la force, comme il l’avait fait pour la CGTL en juillet 95? Oui, pourquoi ne l’a-t-il pas fait puisqu’il disposait déjà des décrets d’intervention nécessaires utilisés deux ans auparavant?
— Pour le fond, le pouvoir ne comprend-il que la meilleure méthode pour contrer la rébellion c’est de traiter les problèmes socio-économiques qui la suscitent? Ne voit-il pas que pour apaiser les cultivateurs qui marchent derrière Toufayli, il faut leur assurer les débouchés agricoles qu’on leur a promis, sans les leur donner, pour remplacer la narco-culture interdite? Ne réalise-t-il pas qu’il doit cesser d’alimenter, par des décisions comme la forte flambée sur le prix des voitures, la cherté? Ne comprend-il pas qu’il faut d’urgence réduire le déficit budgétaire, le gabegie, le gaspillage, le détournement des fonds publics? Ne réalise-t-il pas que les Libanais n’en peuvent plus d’assumer une dette publique qui non seulement est trop lourde mais prive pratiquement le pays d’argent liquide, parce que tout va aux bons du Trésor émis pour couvrir le service de cette dette, c’est-à-dire les intérêts?
— Les dirigeants se croient-ils dans une cour d’école, pour jouer au jeu de «on efface tout et on recommence»? Ils veulent faire respecter la loi, disent-ils, et ils continuent eux-mêmes à l’ignorer allègrement. En effet les gesticulations, les menaces, les appels subversifs à la révolution, qui se poursuivent d’ailleurs comme si de rien n’était, le refus de fermer des médias non autorisés, sont autant de crimes en termes de droit pénal qui ne sont couverts par aucune prescription pour le moment. Ils devraient donc être réprimés sur l’heure et la seule résolution que le Conseil des ministres aurait dû prendre c’était de donner l’ordre d’un coup de filet immédiat...»

Continuité

«Le pouvoir, poursuit cette source, se met totalement dans l’illégalité quand il décide d’éponger l’ardoise et qu’il affirme que l’application de la loi se fera «à partir de maintenant». De plus, il porte de la sorte à l’autorité de l’Etat une atteinte plus grave que toute rébellion car il laisse entendre que l’application de la loi peut connaître des moments ou des cas de suspension, donc être arbitraire. Il est inimaginable que la mise en vigueur effective des lois nécessite un arrêté du Conseil des ministres et ne puisse pas avoir de caractère permanent et d’effet rétroactif. Il y a là un manque de respect total des devoirs de l’Etat à l’égard du peuple, victime finale dans le fond de toute violation de la loi. Sans compter que le pouvoir se place dans une position des plus ambiguës: que va-t-il faire par rapport aux constructions qui sont en train de s’édifier dans la région de Baalbeck-Hermel sans permis de construire, à l’incitation de Toufayli qui délivre lui-même des «licences» pour mieux se moquer de l’Etat? Oui, que va-t-il faire, détruire ces bâtisses, se contenter de les taxer, d’infliger des amendes aux propriétaires et que ferait-il si ces derniers refusaient de se laisser faire?
— Donc, conclut cette personnalité, au lieu de parler, le pouvoir aurait dû agir. Et c’est parce qu’il préfère parler qu’on doute aujourd’hui qu’il veuille jamais agir. Au nom de la loi...»
En réalité, la seule question qui se pose est de se demander pourquoi le système se montre aussi pusillanime... Mais là, la réponse n’est pas difficile à trouver: c’est tout simplement qu’il est difficile, peut-être même impossible, de mettre au pas des «rebelles» qui sont protégés par plus d’une partie. Et peut-être même encouragés à jouer les trouble-fête. Et ce n’est sans doute pas un hasard si la dernière escalade de Toufayli, qui juste auparavant semblait vouloir s’assagir, a coïncidé avec la levée d’un embargo U.S. qui, dans la conjoncture régionale crispée d’aujourd’hui, ne représente pas forcément, aux yeux des décideurs et de leurs alliés iraniens, un «bon point» pour les dirigeants de Beyrouth. Et ce n’est sans doute pas un hasard non plus si le chef du gouvernement a annoncé le report de la visite qu’il devait effectuer, dans la foulée du chef de l’Etat syrien, à Téhéran...
On ne peut s’empêcher, pour conclure, de citer cheikh Mohammed Hussein Fadlallah selon qui «le Liban est voué à évoluer comme un poussah, ce jouet pour enfant où un personnage trône sur une boule de caoutchouc lestée de plomb: il titube tout le temps mais ne tombe jamais. On impose donc à ce pays de vivre toujours en état d’équilibre instable, sans jamais chuter. Il reste malade, ne guérit pas mais ne peut pas non plus et ce n’est pas de sitôt qu’on le laissera se rétablir...»

E.K.
Le Conseil des ministres a adopté, aux dires du pouvoir, des «résolutions importantes» pour redonner à l’Etat toute autorité dans l’ensemble des régions libérées, en réprimant quiconque défierait la loi.Fort bien, «mais, dit un opposant de marque, on se pose tout naturellement les questions suivantes:— Le gouvernement est-il en mesure d’appliquer vraiment ces...