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Actualités - ANALYSE

La circonscription Mohafazat, une formule que les chiffres mêmes désavouent ...

Les partielles, notent des pôles avertis, permettent de dégager à chaud les premières observations suivantes:
— La formule de la circonscription-mohafazat ne résiste pas à l’épreuve pratique. Les chiffres montrent en effet qu’au sein de ce corral trop large, les électeurs des cazas où ne se présentent pas de candidats boudent carrément les urnes. C’est ce qui explique qu’au Nord on n’a enregistré que 20% de votants, alors que le taux atteignait les 55% à Jbeil qui, faisant partie du Mont-Liban «disloqué» par la loi électorale, votait en tant que caza. A dire vrai, la faille s’explique sans doute par le «bâtardisme» de la formule mohafazat: les députés s’y présentent en effet, strictement, sur base — de plus confessionnelle — du caza dont ils sont issus. Le fait qu’ils recueillent éventuellement les voix de gens des autres cazas qu’ils ne vont pas effectivement représenter ne fait que compliquer, voire fausser, le jeu démocratique. Et sur ce plan la réaction la moins civique en apparence, à savoir l’abstention des électeurs des cazas non concernés, est probablement la plus saine...
— Les mêmes constatations s’appliquent, en plus large encore, si l’on devait faire du Liban une circonscription unique, surtout en l’absence d’un système de partis et de laïcité politique. Les têtes de série s’entendraient alors comme elles voudraient, en écrasant sur leur passage les éléments régionalement représentatifs, pour recruter des nantis qui paieraient leur place ou des fidèles inconditionnels qui n’auraient pas besoin d’être connus pour passer... Il n’y aurait en réalité et en définitive qu’une liste unique, celle des puissants. Un premier exemple en a été donné dimanche au Nord où des instructions ont été données à tous les leaderships d’appuyer Fawzi Hobeiche et Khaled Daher ou de se tenir à l’écart. C’est exactement ce qui se passerait au niveau national si on devait unifier toutes les circonscriptions.
— Dans les partielles, l’enjeu étant aussi limité que serré et intense, les «grands chefs», membres ou non du Parlement, ont quand même eu du mal, visiblement, à obliger leurs bases à adopter des têtes «étrangères» qui ne leur reviennent pas. On peut en outre se demander, autre méfait de la formule mohafazat, quelle représentativité a en réalité un député élu par 15 ou 20% des voix exprimées, alors que dans beaucoup de pays, le scrutin est recommencé quand les urnes n’ont pas été remplies à au moins 40%, dont il faut de plus obtenir pour passer au mois les 25%.
— Par contre, la carte électorale individuelle, expérimentée pour la première fois dimanche, a largement prouvé son utilité. Il n’y a pas eu de rush pour l’obtention d’extraits d’état civil comme en 96 et les erreurs se sont révélées moins fréquentes dans les listes d’électeurs. Il ne fait aucun doute que l’adoption de la carte électorale magnétique, permettant à chacun de voter dans le plus proche bureau de vote, assurerait un taux de participation bien plus élevé qu’actuellement.
— Les résultats au Nord et à Jbeil apparaissent comme un désaveu des arrêts d’invalidation du Conseil constitutionnel, dont le ministre de l’Intérieur, Michel Murr, s’est d’ailleurs empressé de réclamer la réforme. Et si dans la Békaa-Ouest Henri Chédid a renoncé à se battre pour retrouver son siège, c’est parce que le Hezbollah lui a retiré son appui...
Pour l’ensemble donc, ces récentes partielles ont largement augmenté, par leurs chiffres mêmes, le nombre des partisans de la circonscription-caza, plus représentative. L’argument-clé des défenseurs du mohafazat, à savoir le brassage confessionnel, a été battu en brèche dès 96 dans la Békaa où Zahlé et Baalbeck, qui jusque-là se regardaient avec bienveillance, chacune restant chez soi, se sont dressées l’une contre l’autre pour briguer le leadership de la plaine... En mélangeant de force les communautés, on ne les fait pas voter ensemble, mais voter les unes contre les autres, ce qui n’est pas le meilleur moyen de servir la cause de la coexistence.

E.K.
Les partielles, notent des pôles avertis, permettent de dégager à chaud les premières observations suivantes:— La formule de la circonscription-mohafazat ne résiste pas à l’épreuve pratique. Les chiffres montrent en effet qu’au sein de ce corral trop large, les électeurs des cazas où ne se présentent pas de candidats boudent carrément les urnes. C’est ce qui explique...