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Actualités - CHRONOLOGIE

L'élection du bureau exécutif aura lieu le 6 juillet La Ligue maronite se prépare à une véritable bataille Plusieurs candidats déjà en lice

Dissensions, luttes intestines, campagnes discrètes et réunions conciliatoires, c’est une image assez trouble que donne la Ligue maronite à la veille de l’élection, le 6 juillet, des 15 membres de son conseil exécutif dont le président et le vice-président. Les 600 membres (sur 1300 inscrits) ayant acquitté leur cotisation (50000 L.L. par an) et pouvant donc voter apparaissent plus divisés que jamais entre de grands blocs et de petits candidats, chacun affirmant avoir toutes ses chances.
C’est que cette année — et pour la première fois depuis longtemps — les élections au sein de la Ligue font bouger la scène maronite. Il est vrai qu’elles interviennent après la publication de l’exhortation apostolique et l’appel du pape à renforcer les structures laïques qui devraient épauler l’Eglise dans sa mission. Les partis chrétiens — anciens ou nés avec la guerre — étant plus ou moins discrédités, ils tentent aujourd’hui, aux côtés des piliers traditionnels de la Ligue, de se tailler une place au sein du prochain conseil exécutif. Résultat: les élections en préparation s’annoncent particulièrement complexes, défaisant d’anciennes alliances et en créant de nouvelles.

Tentative d’assainir
les rangs

«C’est un signe de vitalité et de démocratie», déclarent les plus optimistes. Et de fait, au sein de la Ligue, fondée en 1952 et qui, depuis la guerre, avait été plutôt marginalisée, les événements se précipitent.
Tout a commencé il y a deux mois avec une première initiative lancée par l’ancien député Fouad Saad. Avec l’aide de Me Emile Rahmé et, naturellement, de M. Pierre Hélou, il avait voulu réconcilier les partis chrétiens ennemis, dans une tentative d’assainir les rangs chrétiens à la veille des élections au sein de la Ligue. D’ailleurs, la Ligue maronite avait proposé de parrainer ces réunions, mais les participants avaient préféré tenter d’abord leur chance sans tutelle.
Ainsi, tantôt chez Fouad Saad et tantôt chez Pierre Hélou et Emile Rahmé, des représentants du parti Kataëb, du Bloc national, du PNL et même des ex-FL, du courant aouniste et de l’opposition Kataëb, se sont réunis à plusieurs reprises pour essayer de trouver un consensus qui permettrait finalement leur entrée harmonieuse au sein de la Ligue, forts d’un candidat consensuel.
D’ailleurs, au cours de l’une de ces réunions, le chef du PNL, Dory Chamoun, a proposé le nom de l’ancien député Pierre Hélou au poste de président de la Ligue. L’homme qui jouit d’un vaste crédit, tout en ne pouvant être targué d’être proche du pouvoir (en général et en particulier), a donné son accord de principe tout en souhaitant que sa candidature soit unificatrice et non pour diviser encore plus les rangs maronites. Naturellement — et comme c’est souvent le cas dès qu’il y a une échéance interne — certaines voix, notamment celle du général Michel Aoun, se sont élevées pour s’opposer à cette candidature, car, selon elles, M. Pierre Hélou fait partie de ceux qui ont appuyé l’accord de Taëf et, par conséquent, il ne doit pas se retrouver à la tête de la Ligue. Ces allégations — qui ont commencé à se répandre comme des rumeurs — ont créé un certain flottement et M. Chamoun, qui doit se rendre à la fin du mois en Australie, a chargé M. Robert Khoury de s’occuper de régler l’affaire.

Nombreux médiateurs

De nombreux médiateurs sont alors intervenus, notamment Me Emile Rahmé et M. Rachad Salamé, et les négociations se poursuivent. Mais déjà, le Rassemblement national (qui regroupe le PNL, le courant aouniste, le BN et d’autres) a publié un communiqué dans lequel il affirme laisser ses membres libres de choisir leur candidat aux élections de la Ligue. Ce qui est un pas en faveur de M. Hélou. De toute façon, celui-ci est déterminé à maintenir sa candidature et il mène déjà une campagne dynamique pour gagner des voix.
Il n’est toutefois pas seul en lice. En face de lui, il y avait jusqu’à hier l’actuel président de la Ligue, M. Ernest Karam. Un peu en réaction aux assises de Saad, Hélou et Rahmé, il avait organisé l’importante «rencontre de La Cigale» qui avait regroupé quelque 80 personnalités maronites. Au départ, l’homme voulait annoncer sa candidature et gagner des voix. Mais selon certains observateurs, M. Karam serait désormais convaincu d’avoir un sérieux handicap, dû à sa candidature aux élections législatives de l’été dernier. Celle-ci avait été perçue comme un défi par une certaine base chrétienne. Certes, d’autres membres de la Ligue avaient présenté leur candidature, mais n’étant pas le président de la Ligue maronite, cela n’avait pas eu le même impact.
Face à cette conjoncture, M. Karam aurait, dit-on, décidé de se désister en faveur du candidat Pierre Hélou. Ce qui donnerait à ce dernier un atout supplémentaire. Sans pour autant lui garantir la victoire car il doit encore affronter d’autres rivaux.
Le plus sérieux est, pour l’instant, M. Neematallah Abi Nasr qui, selon ses compagnons, est considéré un peu «comme la tête brûlée de la Ligue». Ses positions en flèche et son action suivie—notamment dans le domaine des naturalisations — lui valent une certaine popularité au niveau de la base et des électeurs. Mais de là à le voir à la tête de la Ligue, il y a encore un pas, qui n’a pas encore été franchi.
Et comme, en matière maronite, il faut toujours s’attendre à tout, il se pourrait bien qu’une troisième candidature sérieuse apparaisse, celle de l’actuel vice-président de la Ligue, M. Hareth Chéhab. Représentant personnel du patriarche maronite au sein du comité du dialogue islamo-chrétien, l’homme jouit d’un grand crédit sur la scène chrétienne et libanaise. Connu pour sa discrétion, il n’en a pas moins toujours œuvré en faveur de l’entente et de la réconciliation.
Il pourrait bien présenter sa candidature au cours des prochains jours, dans un souci évident d’éviter toute politisation de la Ligue — qui, selon lui, devrait rester une instance unificatrice_ et en même temps de lui donner un nouvel élan et d’en faire réellement une instance active sur le plan maronite.
Enfin, il y a encore d’autres candidats, tels que M. Joy Tabet, qui se considère comme un des piliers de la Ligue, dont il est membre depuis un quart de siècle, ainsi que quelques individuels, qui n’ont pas vraiment de chances, mais qui souhaitent simplement faire parler d’eux.
Ce qui est sûr, c’est qu’à un peu plus de deux semaines des élections, la bataille est bel et bien engagée. Et cela ne peut être que bénéfique pour les maronites, qui, de boycott en désenchantement, avaient un peu perdu l’habitude des élections démocratiques. Ils ont certes un peu cherché au début à s’entendre sur un candidat consensuel, mais les dissensions étant ce qu’elles sont, cela n’a pas été possible. les maronites — ou du moins les membres de la Ligue — ont donc décidé d’assumer leurs divergences. Et, selon ses visiteurs, le patriarche maronite, Mgr Sfeir — qui ne s’est pas encore prononcé en faveur d’une candidature particulière — serait pour une bataille saine et démocratique. Et si, pour certains, l’enjeu n’est pas assez important, vu le rôle secondaire joué par la Ligue ces dernières années, celle-ci pourrait bien être appelée à avoir un nouveau destin, en l’absence d’autres structures crédibles sur la scène maronite.
A condition toutefois que les partis et autres composantes chrétiennes, qui ont décidé d’y adhérer — et donc de mener la bataille électorale — n’y transposent pas leurs divergences...

Scarlett HADDAD
Dissensions, luttes intestines, campagnes discrètes et réunions conciliatoires, c’est une image assez trouble que donne la Ligue maronite à la veille de l’élection, le 6 juillet, des 15 membres de son conseil exécutif dont le président et le vice-président. Les 600 membres (sur 1300 inscrits) ayant acquitté leur cotisation (50000 L.L. par an) et pouvant donc voter ...