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Actualités - CHRONOLOGIE

Affaire Abou Rizk : démarches en vue d'une solution honorable Hamdane a rencontré le leader syndical à l'hôpital le qualifiant de représentant de la CGTL à l'OIT

Après le durcissement des premiers jours et la rocambolesque libération de Yasser Nehmé, l’affaire dite Abou Rizk est apparemment en voie de règlement. Les parties concernées — aussi bien les autorités politiques, judiciaires et syndicales que les instances internationales du travail — s’emploient actuellement à trouver un scénario qui permettrait de sauver la face du pouvoir et de sa centrale syndicale, sans pour autant faire d’Abou Rizk un héros. Et s’il faut pour cela beaucoup d’imagination, l’entreprise n’est tout de même pas impossible.
Pour commencer, l’envoyé de l’Organisation internationale du travail à Beyrouth — qui est aussi le coordinateur du bureau régional de l’OIT basé au Liban —, M. Walid Hamdane, a entamé, hier discrètement, une mission de médiation visant à obtenir en premier lieu la libération du responsable syndical. M. Hamdane — dont la mission au Liban est officiellement contestée par le chef de la centrale loyaliste, M. Ghanim Zoghbi, qui se trouve à Genève — est resté très discret sur la nature des entretiens qu’il a eus, hier, avec le procureur général près la Cour de cassation, M. Adnane Addoum, avec Abou Rizk lui-même qu’il a visité à l’hôpital en compagnie de l’avocat Boustany et avec divers responsables syndicaux.
Tout en refusant de préciser la nature de sa mission, il a tout de même laissé entendre — contrairement à ce qu’a déclaré M. Zoghbi dans une conférence de presse tenue à Genève — (VOIR PAGE 4) que celle-ci existe bel et bien, puisqu’il n’est pas venu prendre ses fonctions à Beyrouth. Au contraire, il doit quitter la capitale libanaise mardi pour retourner à Genève, y présenter son rapport et reprendre sa participation aux travaux du 85e congrès international des travailleurs.
A Beyrouth, Hamdane a déclaré qu’à ses yeux, la priorité reste d’obtenir la libération d’Abou Rizk, qui, a-t-il dit, «est membre du conseil d’administration de l’OIT et a été élu l’an dernier le représentant de la CGTL au sein de l’OIT». Son mandat étant de trois ans, selon lui, il conservera cette fonction pour deux ans encore.
Tout en considérant que les décisions de la commission de vérification d’identité, relevant de l’OIT, n’ont aucune portée juridique, puisqu’il s’agit d’une simple formalité interne, M. Hamdane a annoncé aux journalistes qu’il avait expliqué au procureur Addoum la position de l’OIT qui consiste à refuser qu’un syndicaliste soit arrêté dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.
A son tour, le procureur général près la Cour de cassation a expliqué à M. Hamdane que le parquet n’a strictement rien contre M. Abou Rizk et que les poursuites contre lui n’ont été engagées qu’à la suite de la plainte présentée par M. Ghanim Zoghbi. D’ailleurs, des sources judiciaires précisent à ce sujet que M. Zoghbi voulait déposer sa plainte immédiatement après les élections du 24 avril, mais que les autorités lui avaient conseillé d’attendre. Toutefois, lorsqu’il a vu qu’Abou Rizk continuait à se comporter en tant que chef de la centrale syndicale et comptait se rendre à Genève, il s’est décidé à porter plainte. Dans ce cas, le parquet est obligé d’enregistrer la plainte et comme l’usurpation de titre et de pouvoir est un crime, il est aussi obligé, à son tour, d’engager des poursuites contre le suspect.
Après avoir expliqué ces questions juridiques, M. Addoum a donné à MM. Hamdane et Boustany des autorisations pour pouvoir rencontrer M. Abou Rizk, détenu dans la chambre 505 au cinquième étage de l’hôpital orthodoxe.
Si Me Boustany n’est resté à l’hôpital qu’une demi-heure, M. Hamdane, lui, a passé près de deux heures en compagnie du chef de la centrale opposante. A l’issue de cette longue entrevue, M. Hamdane a précisé qu’il avait trouvé M. Abou Rizk assez fatigué, souffrant notamment d’asthme et d’une infection des voies urinaires qui pourraient nécessiter une intervention chirurgicale urgente. Sans le dire explicitement, il a laissé entendre qu’il aimerait quitter le Liban en étant rassuré sur la libération prochaine d’Abou Rizk. Il a ainsi fait remarquer que M. Zoghbi — qu’il a qualifié de membre de la délégation officielle désignée par le gouvernement libanais — «devrait retirer la plainte qu’il a portée contre Abou Rizk, comme il a déclaré à plusieurs reprises être prêt à le faire».
Ce pourrait ainsi être l’un des scénarios trouvés pour régler l’affaire: sur la pression de l’OIT, Zoghbi retirerait sa plainte pour usurpation de titre et de pouvoir — ou commencerait par ne pas s’opposer à la nouvelle demande de remise en liberté présentée hier par Me Boustany —, ce qui faciliterait la libération d’Abou Rizk, tout en maintenant les poursuites engagées contre lui par le parquet. Mais M. Zoghbi est-il prêt à une telle concession sans obtenir en contrepartie une promesse de son rival de renoncer à son titre de chef de la centrale syndicale? Beaucoup de syndicalistes en doutent. D’autant que M. Abou Rizk ne semble visiblement pas prêt, de son côté, à renoncer à ses revendications.
Y a-t-il une autre issue possible? Selon des sources judiciaires, elle serait entre les mains du premier juge d’instruction M. Saïd Mirza. Les mêmes sources déclarent ainsi que la nouvelle demande de remise en liberté présentée par Me Boustany a peu de chances d’être acceptée, puisque le juge Mirza a convoqué six nouveaux témoins dans l’affaire de l’usurpation de titre et de pouvoir, quatre pour lundi et deux pour mardi. Il ne peut donc relâcher le suspect tant que l’enquête est en cours. C’est aussi l’argument qu’utiliserait (comme elle l’a déjà fait) la chambre de mise en accusation au cas où Me Boustany décidait de faire appel au rejet de la demande par le juge. Mais ce dernier, en clôturant son enquête, après avoir entendu les témoins, peut décider de libérer sous caution M. Abou Rizk en attendant l’ouverture du procès. Celui-ci traînerait en longueur, le temps que le juge de première instance, M. Nehmé Lahoud, qui doit statuer sur le recours en invalidation des élections du 24 avril présenté par des fédérations syndicales proches de M. Abou Rizk, émette son verdict.
Ce scénario a toutes les chances d’être retenu, car il est non seulement plausible, mais il respecte la crédibilité des juges, tout en maintenant une épée de Damoclès au-dessus de la tête de M. Abou Rizk, en attendant le verdict du tribunal civil. Mais il ne pourrait être exécuté avant le milieu de la semaine, afin que M. Mirza ait eu le temps de clore son enquête.
Ce ne sont bien sûr que des scénarios fictifs, nés de l’imagination fertile des analystes et autres théoriciens. Car comme M. Addoum ne manque pas une occasion de l’affirmer, la justice est indépendante et nul ne peut prévoir ce que décidera un juge, en l’occurrence M. Mirza. C’est du moins la version officielle. Quoi qu’il en soit, hier, au Palais de justice comme dans tous les milieux concernés par cette affaire, l’atmosphère était à l’optimisme. Il en était temps après huit jours de développements désastreux.

S.H.
Scarlett HADDAD
Après le durcissement des premiers jours et la rocambolesque libération de Yasser Nehmé, l’affaire dite Abou Rizk est apparemment en voie de règlement. Les parties concernées — aussi bien les autorités politiques, judiciaires et syndicales que les instances internationales du travail — s’emploient actuellement à trouver un scénario qui permettrait de sauver la face du...