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Actualités - ANALYSE

Scepticisme larvé sur les possibilités de changement politique à moyen terme

«Une fois retombée l’émotion, une fois épuisées les gammes mélodieuses de la lyre que la présence du Saint-Père fait retentir, on s’apercevra qu’au fond rien ne peut changer dans ce pays tant qu’il n’y aura pas eu de règlement global au niveau de la région...». L’ancien ministre sceptique qui s’exprime ainsi —répercutant en fait une antienne que l’on entend fréquemment dans divers cercles politiques — maugrée ensuite un peu contre «les rêveurs qui tentent de répandre à l’Est ou parmi les déçus de Taëf l’illusion que l’auguste visite va constituer un tournant capital enclenchant une rapide évolution interne vers l’entente nationale. Le système est en effet trop vicié à la base pour être réformé. Il faudrait le jeter aux orties pour en choisir un autre. Mais les gens qui en profitent et qui tiennent les commandes, ici ou ailleurs, ne le voudront jamais...». Et de relever qu’en tout cas «les dirigeants locaux, même s’ils en avaient envie ce qui n’est pas du tout certain, ne sont tout simplement pas «autorisés» à prêter une oreille trop attentive aux réflexions, aux recommandations du souverain pontife concernant la nécessité de consolider la coexistence par une correction de la trajectoire suivie jusque - là. On voit mal en effet la fine équipe en place promouvoir de nouvelles lois ouvrant la voie à la participation de toutes les composantes politiques du pays sans discrimination et permettant en même temps d’améliorer la qualité de la représentation nationale au sein de l’Exécutif comme à la Chambre. Les responsables connaissent parfaitement tous les défauts de la cuirasse, pour en avoir pâti eux-mêmes à tour de rôle d’une façon plus ou moins relative. S’ils n’ont pas pu les traiter — à supposer qu’ils en eussent la volonté — avant la visite du pape, ils ne le pourront pas non plus après, car l’événement, pour important qu’il soit, ne modifie en rien les données régionales de base qui conditionnent étroitement la situation interne. L’hypothèque pèse sur le Liban depuis la création du Fateh et son installation dans le Arkoub en 1967, en passant par les deux invasions israéliennes de 1978 et de 1982. Nul n’ignore, nul ne disconvient que ce sont les contradictions régionales, le bras de fer entre les Fedayine et les Israélo-Américains pour commencer puis la lutte d’influence entre ces derniers et Damas et/ou Téhéran qui ont provoqué puis alimenté un drame libanais qui continue à se traduire aujourd’hui par de pénibles hoquets sur plus d’un front, dans plus d’un domaine. On dit généralement que Taëf offre le mérite d’avoir fait cesser les hostilités intestines et que c’est tout ce qu’on lui demandait. On oublie qu’en fait à l’époque, on en attendait également qu’il sépare le volet intérieur du volet régional. Or c’est tout à fait le contraire qui s’est produit, la mauvaise application — délibérée — de cet accord rendant le premier encore plus tributaire du deuxième... On a sans doute sauvé l’Etat, mais pas encore la nation car les coups de force blancs qui se sont succédé ont démoli peut-être un «camp haï» des décideurs mais plus sûrement la coexistence et l’entente ce qui à la longue met en péril la survie d’un Liban effectif et non plus virtuel comme c’est le cas présentement... L’effet actuel du pourrissement est donc de plonger une bonne partie des Libanais dans le désarroi et l’ensemble du pays dans une crise socio-économique très dure. L’incroyable laxisme de la communauté internationale et des Américains qui en dix- neuf ans n’ont pas trouvé moyen de faire appliquer la 425 prolonge d’autant les épreuves de ce pays. Il est en effet évident (et l’association désormais admise par Beyrouth avec le volet Golan en est une preuve) qu’il ne peut y avoir de dégagement sur aucun plan avant qu’Israël ne se soit retiré du Sud et de la Békaa-Ouest. Ce n’est qu’alors seulement que le Liban pourra déployer ses forces régulières sur l’ensemble de son territoire et récupérer sa souveraineté... Et il restera encore à définir le cadre de nos relations avec Damas, pour voir dans quelle mesure nous serions indépendants», conclut cette personnalité.
Plus optimiste mais aussi plus laconique, un autre pôle de l’Est observe pour sa part que «sans apporter de solution immédiate, la visite du Saint-Père peut jeter les bases d’une étape de préparation, en vue de la normalisation interne comme d’un net rapprochement de notre camp avec Damas, sans nécessairement attendre un règlement régional ou un fiasco définitif du processus de paix». Une espérance qu’en ce week-end béni on ne peut que partager...

E.K.
«Une fois retombée l’émotion, une fois épuisées les gammes mélodieuses de la lyre que la présence du Saint-Père fait retentir, on s’apercevra qu’au fond rien ne peut changer dans ce pays tant qu’il n’y aura pas eu de règlement global au niveau de la région...». L’ancien ministre sceptique qui s’exprime ainsi —répercutant en fait une antienne que l’on...