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Actualités - ANALYSE

Liban-sud : le malentendu Damas-Paris dissipé...

Ce sont des entretiens utiles que le président Rafic Hariri a eus au Vatican puis à Paris.
Reçu à deux reprises à l’Elysée en une semaine, M. Hariri a eu droit à des éclaircissements sur la position française concernant le Liban-Sud, sur les présumés contacts israélo-français au sujet de l’envoi d’un contingent français pour combler le vide en cas de retrait israélien. Pour dissiper tout malentendu, le président Jacques Chirac a pris son téléphone et il a appelé le chef de l’Etat syrien M. Hafez el-Assad. Il lui a dit que la France ne ferait rien qui puisse porter atteinte au jumelage syro-libanais... «Cette conversation téléphonique, affirment à Beyrouth des sources loyalistes, a suffi pour rassurer la direction syrienne qui commençait à soupçonner Paris de traficoter dans son dos un arrangement avec Netanyahu pour l’application de sa devise «Liban d’abord», se traduisant par un retrait israélien mettant hors jeu Damas et Beyrouth. M. Hariri a contribué à faire remettre les pendules à l’heure, tout d’abord en expliquant avec précision au chef de l’Etat français la position commune syro-libanaise et ensuite en amenant les Syriens à ne plus douter des Français. Il a souligné devant M. Chirac que le Liban ne peut en aucun cas négocier avec les Israéliens, même leur retrait du Sud, en tenant la Syrie à l’écart, le sort du Sud étant lié à celui du Golan. Il a répété que d’ailleurs pour le Liban il n’y a rien à négocier du moment que la 425 ordonne un retrait israélien inconditionnel du Sud comme de la Békaa-Ouest et que le seul engagement que ce pays peut prendre est qu’après le retrait il n’y aura pas d’attaques contre la Galilée à partir du territoire libanais. Prenant acte de ces constantes, la France a fait savoir qu’elle ne tremperait dans aucune tentative de règlement qui ne tiendrait pas compte de la volonté du Liban et du nécessaire aval syrien. Cependant Paris continue à travailler, de concert avec les Etats-Unis, pour le redémarrage du processus de paix dans la région à travers la reprise des pourparlers syro-israéliens. Laquelle devrait se faire en base des résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU et des principes de la conférence de Madrid. Paris n’en dévie pas, n’a pas de plan spécial pour le Sud, ne coordonne pas avec Israël dans le dos des Syriens et des Libanais et n’est disposé à envoyer une force-tampon que si toutes les parties le lui demandent expressément. Ceci à partir d’un incontournable accord triangulaire syro-libano-israélien, du moment que le Sud et le Golan sont associés et qu’en dehors d’un tel cadre on ne peut régler le cas du Hezbollah...»
Ces loyalistes soutiennent ensuite que «l’action extérieure de M. Hariri est venue compléter la large offensive diplomatique lancée tous azimuts ces derniers temps par Damas, en direction des pays arabes comme des occidentaux, Etats-Unis en tête. Il s’agit de réaliser les objectifs communs libano-syriens concernant l’opération de paix dans la région. Il faut pour cela intensifier la solidarité panarabe qui doit soutenir à fond la position syro-libanaise face aux provocations de Netanyahu. Tous les pays arabes du Golfe ou du Maghreb doivent donc impérativement remiser au placard la normalisation de leurs rapports économiques et commerciaux avec l’Etat hébreu entamée sous le règne de Rabin-Pérès, quand on croyait qu’Israël voulait vraiment la paix. Il faut faire face en un front uni, après l’accord sur Hébron, la visite de Netanyahu à Washington et la relance de la colonisation juive de Jérusalem-Est qui peut avoir de redoutables conséquences politico-sécuritaires mettant en péril sérieux le projet de paix dans la région».

Rome

Dans la Ville éternelle, M. Hariri, laissent entendre les loyalistes, a tenté d’effectuer une sorte de contrôle préalable. «Il a voulu s’assurer, disent-ils, que l’exorde papal qui sera prononcé en mai à Harissa et devra couronner le synode pour le Liban tenu à Rome en 95 ne comportera pas des passages qui pourraient froisser certaines parties. Une crainte qu’explique le fait que le communiqué final du synode avait braqué les pro-syriens parce qu’il avait réclamé «l’évacuation», terme jugé offensant, des troupes syriennes cantonnées dans ce pays. Sans vouloir bien évidemment dicter son texte au Saint-Père, le président du Conseil a tenu à rappeler que tout propos qu’il tiendrait lors de sa visite au Liban s’adresserait forcément à l’ensemble des Libanais, les musulmans se sentant aussi concernés que les chrétiens. Leur point de vue comme leurs sentiments doivent être également pris en compte, si l’on ne veut pas semer la discorde sur la scène nationale ce qui n’est certainement pas l’intention de l’auguste visiteur».
«M. Hariri, ajoutent ses proches, a cru comprendre que la proclamation pontificale, qui représente la seule conclusion officielle du synode, ne sera pas aussi détaillée que le manifeste précédemment publié par les congressistes. D’inspiration essentiellement religieuse, cet exorde transformera en grandes lignes d’orientation les conclusions, les résolutions des différentes commissions de travail formées durant le synode pour traiter d’une infinité de questions ou de problèmes intéressant l’Eglise catholique et les chrétiens d’Orient comme du Liban. M. Hariri pense que le texte fera parvenir les messages souhaités aux différentes parties concernées sans provocation, sans froisser les susceptibilités locales ou régionales. Il est dès lors possible que le traitement de la question du retrait des forces non libanaises se résume à l’affirmation du droit du Liban à une pleine souveraineté sur l’intégralité de son territoire dans une totale indépendance d’Etat, une parfaite autonomie de décision. Il est évident en tout cas, soulignent pour leur propre compte les haririens, que c’est provoquer un contre-effet que d’affirmer, comme l’avaient fait les synodistes, que la paix intérieure passe par le départ des Syriens car une déclaration aussi abrupte ne peut aller sans réactions virulentes de l’autre partie libanaise. Le pape ne vient pas diviser mais unir et c’est bien pourquoi M. Hariri affirme qu’il n’y a pas meilleur homme de paix. Il faut, par un dialogue serein, rapprocher les Libanais les uns des autres et consolider par l’entente la stabilité du pays. Tous les Libanais veulent voir le Sud libéré, la 425 appliquée et les accords de Taëf entièrement concrétisés, le pays devant pouvoir alors se passer du soutien sécuritaire syrien sans problème. Mais, concluent ces sources, il est évident aujourd’hui que notre problème est englobé dans le processus régional et que la récupération du Sud est conditionnée par les progrès sur la voie d’un règlement global, bien qu’elle puisse intervenir avant. Il faut donc œuvrer pour aider à l’élaboration de ce règlement général et attendre que cela se dégage de ce côté pour aborder les autres points...»

E.K.
Ce sont des entretiens utiles que le président Rafic Hariri a eus au Vatican puis à Paris.Reçu à deux reprises à l’Elysée en une semaine, M. Hariri a eu droit à des éclaircissements sur la position française concernant le Liban-Sud, sur les présumés contacts israélo-français au sujet de l’envoi d’un contingent français pour combler le vide en cas de retrait...